La semaine de Roselyne Bachelot
Lundi
Le premier anniversaire de l’élection d’Emmanuel Macron donne lieu à un véritable déferlement médiatique. Chacun, - politiques, journalistes, sociologues - y va de son analyse, en forme de bilan critique ou complaisant. L’événement est aussi l’occasion de revenir sur cette campagne présidentielle hors normes au travers de documentaires plus ou moins réussis. Il en est même un que ses auteurs ont baptisé le « casse du siècle », reprenant une expression qui aurait été utilisée par l’équipe de campagne de Macron. On ne peut qu’être stupéfait de voir les proches du président de la République promouvoir un concept qui laisse accroire que cette élection relèverait d’un mauvais coup organisé de bout en bout comme le braquage d’une banque. L’occupant de l’Elysée ne mérite ni cet honneur ni cette indignité. Qu’il ait saisi les opportunités que lui ont donné les lâchetés des uns et les faiblesses des autres, quoi de plus légitime. Paraphrasant Jean Cocteau, dans les Mariés de la Tour Eiffel, on pourrait dire que ces mystères l’ont dépassé et que certains feignent de croire qu’il en est l’organisateur. La vérité est beaucoup plus simple et elle ne ressortait qu’à la marge de toutes ces émissions. François Fillon aurait dû être élu s’il n’était pas tombé dans le guet-apens judiciaire qu’il a lui-même ourdi sous ses pas. Il est même assez confondant de constater qu’après une campagne de mise à mort médiatique d’une violence peu commune, son socle électoral ait été suffisamment solide pour le laisser à points du vainqueur. Au fait, pendant que j’y pense, cela fait bien un an et demi qu’est paru l’article du Canard enchaîné qui a valu convocation du Sarthois le jour même par le parquet national financier ? Pendant tout ce temps, les juges n’ont pas trouvé moyen d’aboutir sur une question aussi simple que la réalité du travail effectué auprès de lui par son épouse ? Ici, pas d’intermédiaires mafieux, pas de valises de billets, pas d’interventions d’Etats étrangers et pourtant les magistrats sont toujours incapables de boucler leur instruction soit par un renvoi devant la juridiction compétente soit par une ordonnance de nonlieu. Il est vrai que si la bombe à fragmentation lancée précipitamment le janvier par le parquet financier sur la dernière élection présidentielle aboutissait à un non-lieu, le scandale serait inimaginable et rejaillirait sur l’ensemble de l’institution judiciaire. De toute façon, il est plus que temps que tout cela se termine d’une façon ou d’une autre.
Mercredi
La France est sous le choc. L’écoute de l’enregistrement de l’appel au secours de Naomi Musenga au SAMU de Strasbourg laisse partagé entre l’effroi et l’indignation. La pauvre jeune femme est à quelques heures de mourir d’une défaillance massive de ses organes et la permanencière de régulation lui répond avec une brutalité dédaigneuse insoutenable. Toute la lumière devra être faite rapidement sur ce drame. Des réponses devront être apportées à des questions de plusieurs ordres.
D’abord sur le drame lui-même : l’opératrice mise en cause avait-elle une formation suffisante et exerçait-elle ses fonctions dans de bonnes conditions de travail ? Pourquoi n’a-t-elle pas passé cet appel au médecin régulateur comme l’ordonne la procédure ? L’autopsie demandée par l’équipe médicale pour faire la lumière sur les causes de la mort a-t-elle trop tardé ? Le corps at-il été conservé de manière digne ? Naomi Musenga aurait-elle pu être sauvée par une prise en charge plus réactive ? Des réponses devront aussi éclairer la transmission par le SAMU du dossier de la jeune femme à ses parents sans les accompagner, les laissant écouter, épouvantés, la prière d’agonie de leur petite. Mais de grâce, laissons se dérouler les enquêtes qui ont été diligentées. Le fait qu’il y ait à la fois une procédure interne à l’hôpital, une inspection des Affaires sociales et une instruction judiciaire est la garantie que toute la lumière sera faite. Avant même que ne soit connu le moindre élément de fond sur cet horrible drame, on a vu se précipiter devant les micros les sempiternels professionnels de la récrimination, mettant en cause comme toujours le manque de moyens ou la surcharge de travail. Il serait évidemment stupide de ne pas reconnaître que cela puisse exister, même si nous sommes sur le podium mondial des dépenses hospitalières. En l’occurrence et pour l’instant, nous n’avons aucune preuve d’une telle défaillance. Dans un système complexe qui met en action plus d’un million d’agents, des fautes individuelles sont commises chaque jour. Comment en serait-il autrement ? Chacune doit faire l’objet d’un retour d’expérience précis, d’une mise en place de procédures
garantissant un « plus jamais ça » et si des fautes graves ont été commises, des sanctions doivent être prononcées qui ne sauraient se réduire à un simple changement de poste comme c’est trop souvent le cas.
Jeudi
Vous ne connaissez pas Nathalie Loiseau ? Ne vous excusez pas, vous êtes nombreux dans ce cas ! Madame Loiseau, ministre en charge des Affaires européennes, fait partie des nombreux inconnus de ce gouvernement de « techniciens ». Elle vient d’acquérir une notoriété dont elle se serait bien passée. Le débat sur le droit d’asile au Sénat a été l’occasion de revenir sur la procédure dite « de Dublin ». Cette procédure veut qu’un migrant demande l’asile dans le pays par lequel il entre dans l’Union européenne. Ce n’est pas insulter ces candidats à l’asile que reconnaître qu’ils ont en général des projets d’installation bien différents quand ils arrivent dans l’Union. On le voit à Calais avec ceux qui font tout pour éviter d’être « dubliné » ailleurs qu’au Royaume-Uni pour pouvoir aisément s’y installer. Certains vont même jusqu’à s’arracher la chair du bout des doigts pour qu’on ne puisse pas prendre leurs empreintes digitales et ainsi les pister dans leur errance. Les textes européens désignent ainsi sous le terme de « asylum shopping » cette démarche de migrants qui rentrent par des pays à frontières poreuses comme la Grèce ou l’Italie mais avec le rêve avoué de vivre à Londres ou à Stockholm. La ministre, très au fait de ses dossiers mais piètre politique, a donc repris la formule et parlé de shopping de l’asile. Que cette expression soit malheureuse, sans doute, qu’elle eût mérité qu’on ouvre des guillemets
explicites, assurément, mais elle désigne une problématique qui ne peut se résoudre par des protestations de bons sentiments. Hou là ! La meute bien-pensante s’est néanmoins mise à hurler, a sommé Madame Loiseau « de sortir de son ghetto doré », a jugé que ses propos donnaient « envie de vomir » et poussé devant soi le migrant sur le mode « plus généreux que moi, tu meurs ». On voit là les limites d’une gestion gouvernementale trop souvent purement technique qui ouvre des failles béantes où s’engouffrent des oppositions pourtant peu crédibles en termes de propositions opérationnelles.
Samedi
Quelle semaine ! La France insoumise empêche des étudiants de passer leurs examens, la CGT organise un référendum à la SNCF pour masquer le dépérissement du mouvement revendicatif, les salariés d’Air France sont tout contents d’avoir dégagé leur patron, les commentateurs se posent une question fondamentale : Macron est-il arrogant ? Toutes ces polémiques sont soudain apparues vaines et presque puériles devant le choc pourtant attendu de la dénonciation par Donald Trump de l’accord sur le nucléaire iranien. Une période de graves incertitudes s’ouvre au Moyen-Orient et les analyses des meilleurs experts sur ces questions sont tellement contradictoires qu’il vaut mieux s’abstenir de prédictions définitives. Une seule chose est sûre : une guerre commerciale sans merci s’est ouverte entre les États-Unis et l’Europe sur fond d’une augmentation du pétrole gravement préjudiciable à la reprise de notre économie. N’en déplaise aux europhobes de tout poil, notre seule chance de nous faire entendre face à Sa Majesté dollar réside bien dans notre monnaie commune et dans le renforcement de l’unité européenne. C’est une condition indispensable, mais il n’est pas sur qu’elle soit suffisante. Hélas…
« François Fillon aurait dû être élu s’il n’était pas tombé dans le guet-apens judiciaire qu’il a lui-même ourdi sous ses pas. »