« On veut réformer tout le monde, sauf soi-même » Interview
Si l’histoire est, selon le recueil de citations choisies et commentées par Sophie de Menthon, un Eternel Recommencement, la présidente d’Ethic a sa vision bien à elle de la société
De passage à Cannes, Sophie de Menthon, présidente du mouvement Ethic, chef d’entreprise et chroniqueuse, en a profité pour présenter Éternel Recommencement..., un recueil de citations qu’elle a choisies et commentées. L’occasion aussi de poser un regard sans concession sur notre société. Verbatim avec une libre-penseuse.
Que pensez-vous du Festival du film ? La libérale que je suis était violemment contre l’exception culturelle française et les subventions au cinéma. On a financé un nombre incroyable de navets mais force est de dire qu’on est le cinéma mondial et qu’on a sauvé cette industrie en France. Tous les ans, je suis fascinée par les sélections du festival. Ils prennent ce qu’il y a de plus ennuyeux et en regardant celle de cette année, j’ai eu pitié de tous ces gens qui allaient voir ces films pseudointellos, violents avec des causes.
Mais le festival attire beaucoup de monde… Oui, parce que c’est un rendez-vous économique et de stars. Mais assez peu celui des films. Les films populaires et à succès ne sont pas à Cannes.
Vous venez de publier chez Fortuna Editions Éternel Recommencement..., un recueil de citations que vous avez choisies et commentées. L’éditeur m’avait demandé d’écrire les miennes. J’ai trouvé plus intéressant de reprendre les citations d’autres auteurs en y « La nature humaine change peu », selon Sophie de Menthon.
ajoutant un commentaire sur notre époque. Tout ce qui a été dit au travers des siècles est le reflet des qualités et des défauts d’aujourd’hui. La nature humaine change peu. Je ne pense pas qu’il faut s’en réjouir.
Vos choix sont très éclectiques. Vous citez Sénèque comme Cocteau, Pierre Dac, Marx, Alain Madelin, Confucius ou Voltaire… Quelle est votre citation préférée ? Celle qui me ressemble le plus est de Paul Valéry: « Je ne suis pas toujours de mon avis » .Iln’yaque (D.R.)
les imbéciles qui ne changent pas d’avis. Mais aujourd’hui, il n’y a pas d’ouverture mais un politiquement correct que l’on retrouve beaucoup au Festival de Cannes. C’est la mort des nuances. Tout ce qui nous fera progresser est dans la nuance.
Une autre citation ? J’aime aussi celle de Pascal «La vraie morale se moque de la morale» parce qu’elle correspond à Ethic, le mouvement que je préside. Ce sont les pires entreprises qui font des chartes éthiques impeccables sur papier glacé. Adhérer à Ethic est une caution, donc nous étudions les motivations de ceux qui veulent nous rejoindre. Une entreprise éthique n’a rien à voir avec les chartes. Il faut observer le patron et son comportement envers ses salariés. On a peut-être avec Emmanuel Macron un homme qui va faire mentir ce propos. Il a été élu avec sa capacité à rompre avec le politiquement correct. Une réforme est forcément impopulaire et le président commence à l’être, ce qui est bon signe et la preuve qu’il n’a pas cédé. En France, on veut réformer tout le monde, sauf soimême…
On entend de partout dire qu’il est le président des ultrariches… Qui dit ça ? La presse. Pardon, mais c’est insoutenable. Il y a une confusion entretenue par les journalistes. Je suis inquiète de l’image que l’on souhaite donner à Macron. C’est la presse qui l’a fait élire, qui l’a encensé et elle s’est pris une beigne comme une femme trompée parce qu’il a dit qu’il ne verrait pas les journalistes tout le temps. On sait ce qu’est une femme amoureuse trahie. J’en appelle à la presse qui a le destin de notre pays entre ses mains. On a besoin d’une presse objective. Pour répondre à votre question, un ultrariche est un entrepreneur qui a gagné de l’argent grâce à l’entreprise. Alors oui, Macron est le président des entrepreneurs.
Comment voyez-vous la France dans les années à venir ? Avec Macron, elle a misé sur le bon cheval. Mais c’est une course et on n’est pas arrivé. On doit se réformer et les Français le savent. Si on ne l’avait pas fait, on serait mort.
Les réformes ne sont pas encore en place… Oui mais il y a une volonté de le faire. En revanche, il y a au pouvoir une technocratie qui n’a pas été touchée. On pourra réformer tout ce que l’on veut dans l’entreprise, mais tant qu’on n’aura pas changé la mentalité de ceux qui nous contrôlent, ça ne fonctionnera pas… Je suis aussi pessimiste quant au temps. Le temps de l’État n’est pas celui de l’entreprise, du monde et des nouvelles technologies.