Terrorisme : l’hasardeuse tentation des slogans
Ce serait risible si l’enjeu n’était aussi dramatique. C’est devenu un gimmick. Ni une ni deux. L’attentat de l’Opéra tout juste commis, Laurent Wauquiez et Marine Le Pen sont illico remontés au créneau, indignation en bandoulière. Pour réclamer en choeur et l’internement des fichés S les plus dangereux, et l’expulsion immédiate de ceux qui sont étrangers. Ils l’ont fait d’autant plus volontiers que les sondages, ces omniprésents juges de paix de la démocratie moderne qui prolifèrent chaque jour par dizaines, témoignent des craintes des Français et de leur aspiration légitime à une fermeté accrue. Sauf que chacun, tout en sollicitant davantage de sévérité, perçoit confusément les limites de mesures brandies comme des slogans publicitaires, dont on voit mal comment elles pourraient trouver une application juridique satisfaisante. Wauquiez et Le Pen ont beau tonner, à raison, qu’à situation exceptionnelle, il faut dégainer des remèdes hors normes, de telles dispositions relèveraient d’un casse-tête propice à tous les dérapages, sans garantie d’efficacité surtout. Derrière les formules toutes faites de l’opposition, derrière la bonne volonté empêtrée de l’exécutif, la réalité nous explose hélas jour après jour à la figure : pas plus les uns que les autres n’ont de recette miracle face à une folie meurtrière qui, parce qu’elle divinise le martyr, est d’une complexité insondable à combattre. Nos gouvernants tâtonnent depuis plusieurs années, submergés par une menace qui, pour l’instant, nous dépasse. Tous. Il ne se trouve d’ailleurs plus aucun Charles Pasqua pour s’aventurer à fanfaronner qu’il va « terroriser les terroristes ». On en est très loin. Malgré la mobilisation générale, malgré les mesures déjà prises depuis , nous sommes à peu près toujours aussi vulnérables. Plusieurs attentats ont certes été déjoués, mais nous ne sommes en rien à l’abri d’une attaque, isolée ou d’envergure. L’idée que nous nous faisons depuis toujours d’un État protecteur nous pousse à le croire doté d’une baguette magique qu’il ne détient plus. Et pas davantage ceux qui crient plus fort que les autres. C’est difficile à accepter. Mais il faut l’avoir en tête pour mieux réfléchir. Collectivement.
« Plus aucun Charles Pasqua ne s’aventure à fanfaronner qu’il va “terroriser les terroristes”. »