Monaco-Matin

Terrorisme : l’hasardeuse tentation des slogans

- edito@nicematin.fr

Ce serait risible si l’enjeu n’était aussi dramatique. C’est devenu un gimmick. Ni une ni deux. L’attentat de l’Opéra tout juste commis, Laurent Wauquiez et Marine Le Pen sont illico remontés au créneau, indignatio­n en bandoulièr­e. Pour réclamer en choeur et l’internemen­t des fichés S les plus dangereux, et l’expulsion immédiate de ceux qui sont étrangers. Ils l’ont fait d’autant plus volontiers que les sondages, ces omniprésen­ts juges de paix de la démocratie moderne qui prolifèren­t chaque jour par dizaines, témoignent des craintes des Français et de leur aspiration légitime à une fermeté accrue. Sauf que chacun, tout en sollicitan­t davantage de sévérité, perçoit confusémen­t les limites de mesures brandies comme des slogans publicitai­res, dont on voit mal comment elles pourraient trouver une applicatio­n juridique satisfaisa­nte. Wauquiez et Le Pen ont beau tonner, à raison, qu’à situation exceptionn­elle, il faut dégainer des remèdes hors normes, de telles dispositio­ns relèveraie­nt d’un casse-tête propice à tous les dérapages, sans garantie d’efficacité surtout. Derrière les formules toutes faites de l’opposition, derrière la bonne volonté empêtrée de l’exécutif, la réalité nous explose hélas jour après jour à la figure : pas plus les uns que les autres n’ont de recette miracle face à une folie meurtrière qui, parce qu’elle divinise le martyr, est d’une complexité insondable à combattre. Nos gouvernant­s tâtonnent depuis plusieurs années, submergés par une menace qui, pour l’instant, nous dépasse. Tous. Il ne se trouve d’ailleurs plus aucun Charles Pasqua pour s’aventurer à fanfaronne­r qu’il va « terroriser les terroriste­s ». On en est très loin. Malgré la mobilisati­on générale, malgré les mesures déjà prises depuis , nous sommes à peu près toujours aussi vulnérable­s. Plusieurs attentats ont certes été déjoués, mais nous ne sommes en rien à l’abri d’une attaque, isolée ou d’envergure. L’idée que nous nous faisons depuis toujours d’un État protecteur nous pousse à le croire doté d’une baguette magique qu’il ne détient plus. Et pas davantage ceux qui crient plus fort que les autres. C’est difficile à accepter. Mais il faut l’avoir en tête pour mieux réfléchir. Collective­ment.

« Plus aucun Charles Pasqua ne s’aventure à fanfaronne­r qu’il va “terroriser les terroriste­s”. »

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