« Vous êtes comme une bougie qui vacille » Actu
Le 12 mai, c’était la Journée mondiale de la fibromyalgie, une maladie lourde et mal connue. Sylvie, une Varoise de 54 ans, témoigne pour qu’enfin, on comprenne ce que les malades endurent
J’ai toujours eu une vie très active. J’adorais mon métier que je conciliais avec ma vie de famille – j’ai deux enfants. C’est arrivé à un moment de ma vie où j’étais surchargée car je devais m’occuper de mon père malade. » Ce qui est arrivé à Sylvie, habitante de La Valette-du-Var, c’est la fibromyalgie, une pathologie complexe et mal connue, marquée par des douleurs intenses. La Varoise raconte : « Les premiers symptômes, je n’ai pas voulu les voir. Pendant dix mois, quelque chose se passait dans mon corps : j’avais mal aux jambes, la sensation qu’elles ne me portaient plus… Mais je n’ai pas consulté, parce que je savais qu’on me trouverait quelque chose… » Pour cette femme alors âgée de 47 ans, impossible de songer à s’arrêter. Alors elle s’entête : «Je me suis vraiment inquiétée le jour où je n’ai pas réussi à soulever mon mug de thé. »
« Ma maladie était bien réelle »
En septembre 2011, elle doit passer la visite médicale du travail. Une formalité, en principe. Finalement, non : le médecin, qu’elle connaissait, l’arrête sur-le-champ pour un mois. « Vous êtes en train de mourir à petit feu », s’entendelle dire. Un électrochoc, et le début d’un long parcours de soin. « Mon généraliste avait du mal à comprendre ce qu’il m’arrivait. J’ai consulté des spécialistes. Certains m’ont répondu Sylvie a trouvé dans la peinture plus qu’un exutoire : une thérapie. (Photo DR)
que c’était dans ma tête ! Je ne pouvais pas l’admettre, car la douleur était bien présente. Un jour, mon médecin a évoqué la fibromyalgie. Je n’en avais jamais entendu parler. » Sylvie se rend dans un centre antidouleur à Marseille pour une consultation. Elle sera finalement hospitalisée : son cas est sérieux, elle souffre de fibromyalgie sévère. «Paradoxalement, ça m’a soulagée de l’entendre. On me disait enfin que ma maladie était bien réelle. » À l’instar de nombre de patients, la Varoise souffrait du manque de
reconnaissance et de prise en compte de sa douleur. Avec ce diagnostic, ce n’était plus « dans sa tête ». Mais Sylvie n’est pas au bout de ses peines. « Lors de cette première hospitalisation à l’automne 2011, je pensais qu’une fois sortie, je serai guérie et que je pourrais retourner travailler. J’avais calculé que je reprendrais mi-décembre. J’en ai parlé au médecin qui m’a répondu : “Si vous le voulez bien, on en reparle au printemps.” Ça a été un choc. Sept ans plus tard, j’en suis à 11 hospitalisations ! » Finalement, elle n’a jamais pu retravailler, et a dû réorganiser toute sa vie. Pudiquement, elle confesse ne plus traverser le centre-ville de sa commune, là où elle travaillait. Elle accepte difficilement qu’on puisse la voir souffrante et diminuée. « La fibromyalgie engendre une solitude terrible, elle désocialise totalement. »
« Je vis avec un corps capricieux »
Et n’hésite pas à employer des mots encore plus durs : « Elle m’a mutilée en me privant de mon travail. Je vis avec un corps qui n’est pas fiable, capricieux. Quand je me couche le soir, je ne sais pas comment je serai le lendemain. » Mais elle parvient tant bien que mal à gérer. «Je me suis tournée vers la médecine traditionnelle. Je suis devenue mon propre coach. Je me suis formée au reiki, à la méditation. Je reste optimiste. » Sylvie s’est également découvert une passion pour la peinture. « Je peins par besoin. Ça me fait un bien fou. La bulle du temps et de la douleur n’existe plus. J’en ai fait ma thérapie. La fibromyalgie est une maladie très particulière : vous êtes un peu comme une bougie qui vacille sans cesse… » Sylvie a tenu à témoigner afin que les gens comprennent ce qu’endurent les malades. «Si la fibromyalgie ne se voit pas, la souffrance, elle, est bien réelle. »