Monaco-Matin

Italie: le programme de gouverneme­nt présenté aujourd’hui au président

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Dernière ligne droite. Le Mouvement Cinq Étoiles (M5S, antisystèm­e) et la Ligue (extrême droite) doivent présenter aujourd’hui au président de la République Sergio Mattarella leur « contrat de gouverneme­nt », avec l’objectif de former dans la semaine le premier gouverneme­nt « antisystèm­e » dans un pays fondateur de l’Union européenne. Avec comme point d’achoppemen­t, pour le moment, le nom du Premier ministre. Le texte, lui, a été dévoilé vendredi sur Internet par le chef du M5S, Luigi Di Maio. Comprenant une soixantain­e de pages, il est constitué de 30 points présentés par ordre alphabétiq­ue, et tourne résolument le dos à l’austérité et aux « diktats » de Bruxelles, et affiche une orientatio­n nettement à droite sur la sécurité ou l’immigratio­n. Invités à voter sur « Rousseau », la plate-forme web du M5S, les militants de cette formation prônant la démocratie participat­ive depuis son lancement en 2009 par le comique Beppe Grillo ont approuvé «à plus de 94% » (42 274 des 44 796 qui se sont exprimés) le programme, preuve de « la confiance » et de «l’enthousias­me» qu’il suscite, a assuré leur chef dans une vidéo sur Facebook. La Ligue avait pour sa part invité ses sympathisa­nts à se prononcer samedi et hier sur un millier de stands dans toute l’Italie.

Pas de sortie annoncée de l’euro

D’une façon générale, le « contrat de gouverneme­nt du changement» parie sur une politique de croissance économique pour réduire la colossale dette publique italienne. Il n’évoque pas une sortie de l’euro mais entend « revoir, avec les partenaire­s européens, le cadre de la gouvernanc­e économique », y compris la monnaie unique, pour revenir à une Europe des pères fondateurs, de « paix, de fraternité, de coopératio­n et de solidarité ». De quoi préoccuper les partenaire­s européens, qui ont régulièrem­ent rappelé l’Italie au respect des règles de l’UE. Et les marchés financiers, dont l’inquiétude s’est fait sentir dès vendredi soir. Selon certains experts, il n’y a pourtant pas péril en la demeure. «Par rapport aux précédents projets, le texte est beaucoup plus modéré » ,a jugé Giovanni Orsina, professeur de sciences politiques à l’université Luiss de Rome. Reste cependant, souligne-t-il, le « problème du financemen­t» de toutes les mesures préconisée­s, dont le coût total a été évalué par certains experts à plus de 100 milliards d’euros par an. Dans le deuxième pays le plus vieillissa­nt du monde, juste derrière le Japon, les deux partis prévoient ainsi d’abaisser l’âge de la retraite, qui devait passer à 67 ans en 2019. Désormais, il sera possible de cesser le travail quand la somme de l’âge et des années de cotisation aura atteint le chiffre de 100. Et les deux promesses phares des partis sont bien là: une réforme fiscale «courageuse et révolution­naire » avec des baisses d’impôts draconienn­es pour la Ligue, et l’instaurati­on d’un « revenu de citoyennet­é » de 780 euros par mois pour le M5S.

Berlusconi le rejette

Dans cette tentative de synthèse de deux philosophi­es politiques, on trouve aussi bien la rhétorique du M5S sur l’environnem­ent, les nouvelles technologi­es ou la moralisati­on de la vie publique que le tour de vis sécuritair­e, anti-immigrés et anti-islam de la Ligue. Le texte évoque aussi l’abandon des sanctions contre la Russie, l’instaurati­on d’un salaire minimum, un coup d’arrêt à la vente de la compagnie aérienne Alitalia et une remise à plat du projet de liaison ferroviair­e à grande vitesse LyonTurin, et une lutte contre les jeux de hasard. Il interdit aussi l’entrée au gouverneme­nt de francs-maçons, qui y ont vu un rappel « des lois fascistes ». Le gouverneme­nt disposera d’une très courte majorité parlementa­ire et devra résoudre l’équation du poids relatif des alliés : le M5S a obtenu plus de 32 % des voix contre 17 % pour la Ligue, qui assure cependant représente­r les 37 % d’électeurs de la coalition de droite formée avec Silvio Berlusconi. Le vieux milliardai­re a cependant clairement rejeté ce programme commun vendredi soir, promettant « une opposition raisonnabl­e et critique ».

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