Au coeur d’une folle séance d’essais avec Renault
Nous avons suivi les essais libres depuis le balcon de l’écurie française. Aux premières loges pour le crash de Verstappen et en immersion totale avec les pilotes frappés du losange. Grandiose
On ne va pas y aller par quatre chemins. On s’est régalé hier midi ! Non pas au restaurant du motor-home Renault – quoi qu’aussi – mais en assistant aux essais libres depuis les stands flambant neufs de l’écurie française. Cachottières, voire suspicieuses, les écuries n’ont pas la réputation d’ouvrir leur garage au premier venu. Encore moins à la presse. Pourtant hier, c’est à bras ouverts et sans langue de bois que les Jaune et Noir nous ont accueillis. Seules restrictions: ne pas photographier les écrans des ingénieurs et les coques en carbone et autres composites travaillées au rez-de-chaussée par une armée de mécanos. Armée car une écurie est une fourmilière où jusqu’à 90 (!) petites mains s’affairent simultanément. Les mécaniciens, les ingénieurs mais aussi des postes plus méconnus comme les account managers, aux petits soins pour les guests, sponsors comme people avides de l’adrénaline de la F1 (lire ci-dessous).
Un oeil dans le rétro
Après avoir jeté un oeil curieux et passionné dans le sacro-saint garage, direction l’étage non sans attraper au passage casque et talkie-walkie, soigneusement rangés par nom sur un mur dédié. Nous voilà en connexion avec le Team Renault. Dans la confidence… Juste avant de lâcher les chevaux sur le manège monégasque, le directeur sportif, Alan Permane, s’attable volontiers, détendu. Jeudi, Ricciardo et Red Bull ont fait tomber le record absolu de la piste, Carlos Sainz Jr. (Renault) promettant alors de «folles» qualifications sur un asphalte taillé sur mesure pour les nouveaux pneus hyper-tendres. Alors Alan, prêts vos garçons? « Nous avons vécu une bonne journée d’essais jeudi et ce qui est bien à Monaco, c’est qu’on a le vendredi libre, ce qui peut aussi être une forme de frustration donc, là, nous sommes prêts ! » Comprenez, impatients d’en découdre ! Après 20 minutes à tourner sur le circuit, Hülkenberg et Sainz, respectivement 6e et 10e, confirment les bonnes dispositions actuelles de Renault. «Carlos et Nico travaillent dur ensemble et on a franchi un joli cap depuis la saison dernière. On est actuellement la quatrième voiture la plus rapide du championnat, c’est fantastique!», confiait ainsi Alan avant la séance. Dans nos casques, une voix monocorde s’invite à intervalles réguliers pour livrer leurs temps de passage aux pilotes. Ceux de la concurrence directe aussi. Romain Grosjean et Stroll (Haas) et les Toro Rosso de Gasly et Sirotkin, particulièrement en vue durant ces essais. Du balcon, la vue plongeante sur la pit lane et ses ballets de mécanos relève la saveur d’une expérience unique. Sous nos yeux se joue, dans le détail, une chasse aux millièmes. Quelques mètres plus loin, la bataille du rail version panoramique, de la sortie du virage de la piscine à La Rascasse. Une fenêtre sur course brisée par le crash spectaculaire de Verstappen, alors en tête et qui finira la journée en bout de grille.
Fenêtre sur course
Pendant que les mécanos de Red Bul s’arrachent les cheveux et que Verstappen inspecte lui-même son véhicule à quatre pattes sur l’asphalte, les Renault ressortent du garage avec les crocs. Tentent de surgir dans le trafic à un moment opportun, stratégique, dans la chasse au chrono. Des ambitions qui ne gomment pas la courtoisie. Au passage de Sainz à la piscine, la voix résonne. «Bottas est dans un tour rapide, laissele passer». Sainz s’exécute. Mercedes rendra la pareille. Rabaissée par rapport à Barcelone et modifiée au niveau des suspensions frontales, la monoplace Renault semble répondre aux plans des ingénieurs. 9e et 14e, Sainz Jr. et Hulkenberg ne cassent pas la baraque mais la sérénité règne dans les stands. À peine le drapeau à damiers tombé, Carlos Sainz Jr. rejoint son père et Alain Prost à l’étage pour débriefer ses perfs, graphiques en mains. «Les ingénieurs vont dépouiller toutes les datas avec les pilotes, faire les derniers réglages, et ensuite les mécanos vont regarder tous les détails de la voiture», décrypte Louis Bordes, directeur communication de Renault Sport Racing. Des détails passés au tamis à des centaines de kilomètres, en temps réel, dans les fameuse « ops room ». Des équipes en usine qui traitent les datas depuis Viry-Chatillon pour la partie moteur et depuis Enstone pour la partie châssis. Près de quarante personnes sur le pont pour un « téléguidage » fructueux . Deux heures plus tard, en qualif, Sainz et Hülkenberg se classeront 8e et 11e. Maintenant, à eux de jouer! «Oui mais qu’ils ne le fassent pas de trop près», plaisante Alan Permane.