Ô Chrysalides à Fréjus
Dans l’Est-Var, trois jeunes femmes portent le projet d’une « école autrement », où la construction et l’épanouissement de l’enfant retrouveraient toute leur place. «Au départ, c’était une réflexion personnelle. » Kelly Joseph-Auguste poursuit : « Une réflexion en tant que professeur, puisque j’enseigne depuis maintenant dix ans, mais aussi en tant que parent…» La jeune femme s’interrompt et se tourne vers Aurélie Dacunha : « Notre rencontre est totalement fortuite. C’était il y a un an. Assises dans la salle d’attente d’un cabinet d’orthophonie, en engageant la conversation, nous avons recoupé nos parcours, nos vies de mamans d’enfants particuliers et notre vision de l’éducation. » Les deux femmes se rejoignent alors sur l’idée d’une « école autrement ». « Que je partage, sourit Jennifer Mayer, jeune enseignante démissionnaire. Aujourd’hui, l’Éducation nationale ne peut plus répondre aux besoins de notre jeunesse. J’ai enseigné durant six ans en région parisienne et, avec des classes de trente élèves, je ne trouvais plus les moyens de bien faire mon métier. Les conditions ne sont pas adaptées. L’humain est complètement oublié, la priorité n’est pas mise sur la construction de l’enfant. Et les réseaux d’aides que nous avions à disposition, je les ai vus fondre d’année en année. À côté de ça, on nous surcharge de considérations administratives qui n’ont aucun sens. » Elle secoue la tête. « Je me sentais dépassée, alors je suis partie. Et j’ai posté une annonce pour donner des cours particuliers ici, dans le Sud. »
Une école autrement
À ce moment-là, Kelly, dont l’enfant précoce est déscolarisé, décroche le téléphone… Et, quelques semaines plus tard, le trio ainsi formé, le projet Ô Chrysalides voit le jour. « Une école autrement, soulignent les jeunes femmes, visant la qualité et, avant tout, la construction de l’enfant. Certes, nous respecterons le code de l’éducation et les programmes scolaires, mais appliqués selon notre philosophie de l’enfant.» C’est-à-dire ? « D’abord lui redonner confiance afin qu’il fasse éclore tout son potentiel ! » Kelly mime l’envol du papillon. « D’où le nom Ô Chrysalides. » Concrètement, comment le trio voit-il ce projet ? « Pour commencer, il concerne tous les enfants. Précoces ou pas. Nous conserverons les quatre cycles classiques : maternelle/CPCE1-CE2/CM1-CM2-6e/5e-4e-3e. Mais les niveaux seront mixés, ainsi que les programmes. Nous appliquerons un enseignement évolutif permettant à l’enfant d’acquérir des compétences solides sur trois ans. » En effet, « un petit peut être au CP et savoir très bien lire. De même qu’un élève de CE1 peut être bon en lecture et avoir un niveau plus faible en maths. Cette organisation, plus adaptée, permettra aux enfants de travailler à leur rythme. Chaque cycle comptera douze élèves, pour un total de quarante-huit places, là où l’Éducation nationale en a plusieurs centaines. Ainsi complémentaires, ils pourront s’aider les uns les autres et s’enrichir. Et, de notre côté, cela va nous permettre de connaître leurs intérêts. Prenons l’exemple d’un enfant qui n’aime pas lire mais adore le rugby… Il sera certainement plus enclin à lire un livre sur ce sport ou écrire un article après avoir rencontré un rugbyman. » Qu’en sera-t-il des notes? « Il y en aura, mais ce ne sera pas notre priorité. On tient vraiment à ce que l’enfant ne retienne pas pour retenir, n’ait pas des compétences pour avoir des compétences, mais puisse les assimiler et les transférer à son tour par la suite. Que l’enfant devienne acteur de ses apprentissages. »
Cette organisation permettra aux enfants de travailler à leur rythme ”