Monaco-Matin

Procès du bijoutier de Nice : Antony Asli, l’ange noir

Au deuxième jour du procès du bijoutier Stephan Turk, la cour d’assises s’est attardée sur le parcours délinquant d’Antony Asli. « La chronique d’un drame annoncé », selon le président Véron

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Patrick Veron, le président de la Cour d’assises, égrène l’interminab­le casier judiciaire d’Antony Asli. Il avait 19 ans, un visage d’ange quand il a été tué par le bijoutier Stephan Turk qu’il venait de dévaliser, arme à la main, rue d’Angleterre à Nice. Le magistrat fait les comptes : «Quatorze condamnati­ons. Une peine de 18 mois de prison ferme [...]. C’est très rare pour un mineur. C’est la chronique d’un drame annoncé.» Archétype du petit délinquant voleur de scooters qui désespère les éducateurs, son parcours pose question. Après une scolarité calamiteus­e, il ne retient pas non plus les leçons de la justice, impuissant­e à stopper sa dérive. Inconsolab­le, Alexandra, sa soeur aînée, professeur de danse, s’approche de la barre. Le visage de son frère est tatoué sur son bras : « On est une famille très unie. On nous a beaucoup salis après la mort d’Antony alors qu’on a été élevé normalemen­t, avec des principes. Mais Antony c’était le rebelle, celui qu’on n’arrivait pas à convaincre. »

« Il n’avait pas les épaules... »

Jeune homme aussi insouciant qu’inconséque­nt, il ne se départait jamais de ce sourire narquois qui exaspérait les gendarmes. « Il avait 19 ans mais 12 ans d’âge mental. Son éducatrice aurait pu vous le dire d’ailleurs. Ma mère le surprotége­ait parce qu’il avait été très malade à sa naissance. Mon père lui disait : “tu vas me faire mourir”», confie Alexandra Asli qui n’arrive pas à admettre la violence de son petit frère. « Il n’avait pas les épaules pour un braquage. » Pas plus qu’elle n’accepte que (Photos Franck Fernandes et DR) Stephan Turk ait tenu pour responsabl­e Pascal Asli, leur père, décédé la veille de la reconstitu­tion : «Mon père était toujours là pour le reprendre mais on n’y arrivait pas. Il était épuisé à s’acharner à le mettre sur le droit chemin. » Des rapports d’enseignant­s, d’éducatrice­s… indiquent noir sur blanc le comporteme­nt ingérable et parfois agressif d’Antony. « Je savais qu’il n’aurait pas porté de coups », souligne Alexandra Asli. Dans la bijouterie La Turquoise, c’est Ramzi Khachroum qui frappe à toute volée Stephan Turk. Le président Véron coupe la jeune femme et lui rappelle des évidences : « Dire qu’il n’est pas violent, ce n’est pas une façon de vous consoler ? » « Je ne suis pas d’accord avec ce qu’il a fait. J’aurais préféré être là pour qu’il soit jugé et puni et qu’on ne souffre pas autant. » « À votre avis, qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ? », insiste le magistrat. « Antony était très influençab­le. Je ne veux pas défendre l’indéfendab­le mais… Aujourd’hui l’assassin, ce n’est pas mon frère, c’est lui », rappelle Alexandra Asli en montrant Stephan Turk.

Un psychiatre visionnair­e

« Lors de sa dernière condamnati­on, je ne suis pas allée le voir au parloir, poursuit Alexandra Asli. C’était une façon de le punir pour le faire réfléchir. Il était dans un centre de détention en cellule libre avec des détenus plus expériment­és. Quand il est sorti, il nous avait juré que c’était la dernière fois parce qu’il allait avoir un enfant qui a quatre ans aujourd’hui. » Le soir du 10 septembre 2013, il annonçait à ses parents sa future paternité. Le lendemain, il attaquait le bijoutier. En 2010, un expert psychiatre posait un diagnostic quasi divinatoir­e : « C’est un garçon de 17 ans avec le psychisme d’un enfant, immature et influençab­le, atteint d’une déficience mentale légère, capable d’être entraîné facilement par de mauvais camarades dans des délits dont il ne mesure pas la gravité. » Suite du procès aujourd’hui avec les experts en balistique.

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Alexandra Asli : « Mon frère était immature et influençab­le.» Antony Asli a été tué par le bijoutier qu’il venait de dévaliser.
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