Monaco-Matin

« Faire évoluer les mentalités »

- RECUEILLI PAR C. ROUX

Philippe Bozon est un monument. Le  mai, la Fédération l’a propulsé successeur de Dave Henderson, néoretrait­é, à la tête des Bleus. Une évidence. « Boz »,  ans, va boucler la boucle. Son CV se devait d’être toujours plus clinquant. Après  sélections officielle­s, quatre participat­ions aux Jeux et douze Championna­ts du monde (), ne manquait qu’un poste de sélectionn­eur pour un bonheur parfait. Le Chamoniard, premier joueur français de l’histoire à évoluer aux Etats-Unis et dans la prestigieu­se NHL (StLouis, ) a signé pour  ans. Préféré à Luciano Basile (coach de Gap annoncé favori) pour son passé en Bleu, Bozon restera en parallèle coach de Bordeaux en -. Il entend convaincre les joueurs de NHL de s’engager à ses côtés.

Philippe, cette nomination, c’est une fierté… Oui, depuis que j’ai commencé à entraîner, j’ai toujours eu pour objectif de coacher l’équipe de France. Pour moi, c’est particulie­r. Mon père a porté ce maillot. J’avais  ans lors mes premières sélections. J’ai fini ma carrière aux Jeux de Salt Lake (, ndlr) mais je n’ai jamais vraiment quitté les Bleus. J’ai été consultant pour Canal + sur les Championna­ts du monde pendant plus de douze ans. J’ai été proche de l’équipe quand Tim (son fils) a commencé à avoir quelques sélections. Il y avait toujours la flamme, ce maillot tricolore, la fierté. A quoi ressembler­a un mandat réussi ? D’abord, il faut que les joueurs aient adhéré aux valeurs de l’équipe de France et viennent sans rechigner ou en posant des conditions. Que la sélection soit au-dessus de tout. Ensuite, l’objectif prioritair­e, c’est retrouver les Jeux (à Pékin en ). Les derniers, c’était en . On a besoin de promouvoir le hockey. Personne dans le groupe actuel n’y a participé. Ça doit être un bel objectif pour les gars. Un quart au Mondial ? Ça dépend de tellement de choses. Il faut avoir de l’ambition, c’est dans mon caractère, mais il faut aussi rester humble. Enfin, je veux faire évoluer les mentalités. C’est-à-dire ? Depuis trois-quatre ans, l’attitude me plaisait. Avant, au Mondial, on se concentrai­t sur les matchs couperet pour le maintien et on ne jouait pas toujours les autres à fond. On commençait à voir un changement de mentalité. Ça a permis de battre le Canada, la Finlande, la Russie ces dernières années. En  (au Danemark du  au  mai) ,onest retombé dans nos travers. J’étais un peu déçu. Il faut retrouver notre mentalité. Comment convaincre les joueurs de NHL d’adhérer au projet, comme Antoine Roussel (en fin de contrat à Dallas) qui n’a pas participé au Mondial ? Je dois les contacter individuel­lement. C’est dans mes premières intentions de mobiliser les meilleurs qui sont à l’étranger, leur vendre les valeurs de l’équipe de France. C’est à eux d’incarner la fierté de porter ce maillot. J’ai eu une carrière. J’ai vécu ce qu’ils sont en train de vivre et ce n’est pas pour autant que j’ai tourné le dos à la sélection. On a besoin qu’ils jouent leur rôle d’ambassadeu­rs à l’étranger mais qu’ils soient aussi des leaders en Bleu. Même si vous avez votre carrière en NHL, en KHL, performer en équipe de France peut toujours vous apporter quelque chose. Où en êtes-vous de la constructi­on de votre staff ? C’est la priorité du moment. On avance. J’espère le finaliser avant le  juin. Je cherche une pointure comme adjoint. Les pistes ne sont pas françaises. On va intégrer aussi deux anciens internatio­naux très proches du groupe. Ils feront le lien avec le staff. Ils effectuero­nt un roulement. Pour l’instant, on se heurte à leurs clubs. Vous avez été choisi pour l’amour du maillot que vous comptez inculquer, mais d’autres vous décrivent individual­iste… Je ne l’ai jamais été. Depuis que je coache, j’ai toujours fait passer le groupe d’abord. Dès que je terminais avec Saint-Louis, je prenais l’avion pour porter le maillot des Bleus au fin fond de l’Italie par exemple. Je ne pense pas que ce soit un comporteme­nt individual­iste. Que retenez-vous de vos dernières expérience­s à Epinal puis Bordeaux ? Je n’ai peut-être pas assez donné de crédit et de responsabi­lités aux stars. Il y a parfois un décalage entre mon exigence et la manière de faire des joueurs français. Le grand questionne­ment, c’est comment on peut changer ça et comment je peux

J’ai toujours eu pour objectif de coacher l’équipe de France. ”

m’adapter. Il faut garder l’ADN des Bleus, la camaraderi­e mais on ne peut pas avoir que ça. Je demande à être le plus pro possible alors que les joueurs parlent de plaisir. Les Finlandais, les Suisses, les Suédois ont une hygiène de vie et ça fait la différence aujourd’hui. On a reproché à Dave Henderson d’appeler surtout des joueurs de grands clubs français. Aurez-vous la même politique ? Je veux redistribu­er les cartes, donner sa chance à tout le monde. Si les joueurs sont performant­s, ils seront appelés, mais il faut qu’ils soient lucides sur leur niveau. Il y aura des commentair­es au sujet du fait que je reste coach de Bordeaux, mais gérer le club et la sélection ne me fait pas peur. Je suis un bourreau de travail. Ce sera un avantage, je vais continuer à voir les joueurs de Magnus au quotidien. On vous oppose aussi votre manque d’expérience et de titres… On parle de quelle expérience ? Depuis que j’ai arrêté, je suis de très près les équipes nationales. J’ai été dans les vestiaires de la NHL pour voir ce qu’il s’y fait. J’ai vu les préparatio­ns changer. Aller aux mondiaux, aux entraîneme­nts et voir ce que font les nations, ça c’est du vécu. J’estime avoir cette expérience.

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