Monaco-Matin

Vers une pénurie de papier journal

- S.F.

Les papetiers sont-ils en train de porter l’estocade finale aux journaux et imprimeurs? D’après le quotidien belge Le Soir, entre fin 2017 et janvier 2018, le prix de la tonne de papier journal est passée de 450 à 500 euros. Soit une augmentati­on de 11 %. En cause: une demande bien plus forte que l’offre proposée par les papetiers. Certains profession­nels du secteur, souhaitant garder l’anonymat, n’hésitent pas à parler de « pénurie ». En 2016, Holmen, géant suédois du papier, vendait son usine madrilène de production de papier journal. Résultat : une réduction annuelle de la production européenne de près de 300 000 tonnes…

L’influence de la demande chinoise

Et le phénomène ne date pas d’hier. « C’est entre 2002 et 2003 que la production de papier graphique (utilisé notamment pour les magazines et les journaux, Ndlr) a commencé à diminuer », glisse Jan Le Moux, directeur économie circulaire et politique produits à la Copacel, l’Union française des Industries des cartons papiers et celluloses. Le développem­ent du numérique et la diminution des ventes de journaux papiers passent par là. « Au niveau européen, voir mondial, il y avait des surcapacit­és de production, poursuit Jan Le Moux. Des usines ont fermé, certaines n’ont pas survécu. Les sites se sont restructur­és, notamment vers l’Allemagne et l’Europe de l’est.» Et la baisse de la production de papier pour la presse s’est poursuivie, jusqu’à aujourd’hui… Entre 2016 et 2017, « la production française de papier graphique est passée de 2,58 à 2,23 tonnes », détaille Jan Le Moux. Au niveau européen, « la production s’établissai­t à 33, 9 millions de tonnes en 2016, en diminuant de 3,8 % entre 2015 et 2016. » Soit une baisse d’1,3 million de tonnes sur un an. Les profession­nels ont alors délaissé le papier pour le carton, beaucoup plus porteur avec le développem­ent du e-commerce. «En 2016, les emballages représenta­ient 56 % de la production française, contre 28 % pour le papier graphique », compte Jan Le Moux. En 2002, d’après la Copacel, cette proportion était de 45 % - 44 %. Parallèlem­ent, un événement imprévu a fait irruption lors de l’été 2017. La Chine a en effet décidé de ne plus accepter les déchets de papier et de cartons mélangés en provenance du reste du monde, jugés trop polluants. Sans matière première à acheter, les fabricants chinois se sont alors tournés vers du papier journal « classique ». Tirant alors la demande vers le haut. Et visiblemen­t au-delà de ses capacités…

Une nouvelle hausse dans l’année

Les industriel­s ont-ils alors trop délaissé le papier journal pour le carton? « Les ajustement­s réalisés ont peutêtre été trop forts», estime Jan Le Moux, tout en assurant (Photo François Vignola)

n’avoir jamais entendu parler de pénurie. Concernant les hausses du prix du papier journal, la fédération des profession­nels assure qu’elle n’est pour ces derniers qu’une façon de « se reconstitu­er des marges ». Plusieurs journaux français sont pourtant touchés (lire ci-contre), et la crise semble mondiale. En avril, c’est la presse sénégalais­e qui n’a pas pu paraître pendant quelques jours, faute de papier. Au Canada, des éditeurs sont en difficulté économique. La suite, elle, ne s’annonce pas rose. Une nouvelle hausse des prix est prévue dans l’année, tandis que la baisse de la production de papier journal, même moins forte en 2017, est jugée « continue ».

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La tonne de papier journal a augmenté de  % entre fin  et début 

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