Le Dr De Botton à la tête de Médecins du Monde
Philippe de Botton, médecin endocrinologue installé à Menton depuis 1992, est militant de cette ONG depuis 1989. La justice sociale est au coeur de tous ses combats
Vous ne trouverez plus le docteur Philippe de Botton dans son cabinet mentonnais situé en plein centre-ville, avenue Félix-Faure. Parti à la retraite depuis fin 2017, ce médecin endocrinologue et diabétologue a été élu, il y a quelques jours, président de Médecins du Monde France, succédant ainsi à Françoise Sivignon. Une nouvelle étape dans la vie de cet inlassable militant des droits humains, engagé dans l’organisation de solidarité internationale depuis 1989. « Je suis entré à Médecins du Monde par le biais du bénévolat à Paris », indique Philippe de Botton. Alors marié et père de deux jeunes enfants, le médecin décide de s’investir dans les Missions France, et c’est sans doute ce premier engagement en faveur des personnes les plus défavorisées au coeur de la capitale qui orientera tout son combat de militant.
« Je me sentais plus en phase avec le milieu associatif que politique »
Philippe de Botton participe d’abord à la mise en place du premier programme d’échanges de seringues à Paris (quartier de Barbès), afin de réduire les risques de transmission du virus du sida chez les toxicomanes. Plus tard, en 1994, il crée le même programme de solidarité face aux risques de substances psychoactives dans les Alpes-Maritimes (Cannes, Antibes et Nice). Il est aussi à l’origine de la création d’un programme de promotion de la santé et de réduction des risques en milieu festif (notamment dans
les rave-party), toujours dans le département, où il s’installe à Menton en 1992. Développant aussi dans les années 2000, entre Nice et Marseille, des centres de soins au moment de la mise en place de la CMU (couverture médicale universelle, NDLR), « principe inconditionnel de justice sociale ». Ces missions le confortent dans ce qu’il est et souhaite profondément : permettre aux populations marginalisées et stigmatisées d’accéder aux droits et aux soins. « Je sentais bien qu’il y avait un facteur d’injustice, que des gens
n’avaient pas accès aux soins en raison de barrières sociales ou financières. Et surtout, je me sentais plus en phase avec le milieu associatif que politique », indique Philippe de Botton pour expliquer son parcours. Après trente ans d’engagement, où il est passé de simple bénévole à délégué régional Paca en 2008, puis membre du conseil d’administration de Médecins du Monde France en 2012 à trésorier en 2016 avant la présidence, Philippe de Botton reste plus que jamais fidèle aux «valeurs de respect et de dignité que porte Médecins du Monde».
En France comme à l’international. «Partout, on est dans une médecine très biomédicale, aujourd’hui, nous devons aller vers une médecine médico-sociale », clame-t-il, conscient que les choses évoluent dans ce sens au nom d’une démocratie sanitaire, « où le patient est mieux pris en charge et où le médecin n’impose pas une vision unique et dominante ». C’est cette même justice sociale que le docteur Philippe de Botton met au coeur de son engagement international : « Médecins du Monde est présent dans 42 pays et mène plus de 120 programmes», rappelle-t-il, lui qui a été responsable d’un programme de prise en charge nutritionnelle et dentaire au Burkina Faso pendant six ans. « Afin d’accompagner le changement social, il est indispensable de renforcer nos partenariats avec les acteurs locaux de la société civile des pays du Sud. Il est même impératif de mettre au coeur de l’action humanitaire la capacité des personnes à être maîtresses de leur destin. »
« Il faut qu’on arrête de criminaliser les migrants »
Mais c’est aussi vers la frontière franco-italienne que tous ses regards ont convergé ces dernières années, à quelques mètres de son cabinet. Une « catastrophe totale… Nous vivons une crise de l’accueil et de la solidarité qui ne va pas se terminer », évoque-t-il. « Depuis la fermeture des frontières en juin 2015, on s’est mobilisé avec deux associations locales pour assurer des consultations médicales trois fois par semaine à Vintimille… », explique le docteur De Botton, qui a vu des personnes « en grande détresse, épuisées, souvent en état de sidération ». « Il faut qu’on arrête de criminaliser les migrants et de les mettre en danger… Il ne s’agit pas d’une invasion migratoire mais d’un problème que l’Europe doit régler sans posture idéologique, ni politique, mais avec efficacité et pragmatisme. C’est un problème de courage et de volonté politique. »