Monaco-Matin

Charlotte Valandrey: «N’ayez plus peur de ce qui n’existe pas»

La comédienne publie un nouvel ouvrage sur les épreuves qu’elle a traversées et, surtout, sur les choses qui l’ont aidée. Cinq cents pages sur ce qu’elle nomme son «optimisme vrai»

- AMÉLIE MAURETTE amaurette@nicematin.fr

Quotidienn­ement sur TF1 dans la série Demain nous appartient, avec Ingrid Chauvin et Alexandre Brasseur – qu’elle vient d’ailleurs présenter ce week-end au 58e Festival de télévision de Monte-Carlo, à Monaco – après une longue traversée du désert, Charlotte Valandrey mesure sa chance. Et a envie de la faire partager. Ou plutôt de partager les clés qui lui ont permis d’en arriver là, en pleine possession de ses moyens, à 50 ans, alors qu’on lui donnait six mois à vivre à 19 ans, en lui diagnostiq­uant sa séropositi­vité. Chaque jour, comme l’indique le titre de son dernier livre, la comédienne écoute battre son coeur. Ce coeur qu’on lui a greffé en 2003 et qui a été victime de plusieurs infarctus depuis. « Je suis passée par l’enfer et aujourd’hui je suis vivante, je rejoue même la comédie» , résume celle qui a déjà écrit plusieurs ouvrages sur son parcours. Cette fois, à grand renfort de citations, mariant sans complexe Schopenhau­er et Johnny, Charlotte Valandrey décrit ce qu’elle appelle son « optimisme vrai ».

C’est un livre de développem­ent personnel. Vous aviez déjà écrit là-dessus, pourquoi le refaire aujourd’hui ? Dans N’oublie pas de m’aimer, oui, je donnais quelques conseils, mais c’était glissé comme ça, entre les pages. À l’époque, les gens m’avaient dit que ça les aidait, leur donnait de l’espoir. Et aussi envie de mettre de côté les petits problèmes. À chaque fois, on me dit : « Mais comment vous faites ? » À l’époque, je n’étais pas capable de l’expliquer ; aujourd’hui, oui. C’est l’année de mes  ans, c’était le moment de me replonger dans mon passé et de compiler les clés dont je me suis servie pour survivre et pour vivre. Cinquante ans, pour moi, c’est une belle victoire.

Vous allez jusqu’à proposer un concept, l’optimisme vrai, et une méthode que vous nommez Adiva. Pourquoi théoriser ? Pour être simple et pour pouvoir aider ceux qui en ont besoin à dépasser les petites et moyennes épreuves. Pour les grosses épreuves… je n’ai pas la recette du bonheur et je ne suis pas psychothér­apeute. Ça aide les gens d’avoir des exercices, des exemples. Et puis, c’est une méthode que je m’applique, en laquelle je crois. C’est surtout une invitation à l’introspect­ion. Je n’ai pas passé mon bac mais j’ai étudié ce que je suis, et l’être humain à travers moi, pendant des années. Et je veux donner envie aux gens de se poser quelques questions qui pourraient les amener, je l’espère, à être un peu plus heureux : vivre dans le présent, se débarrasse­r de la culpabilit­é, ne plus avoir peur de ce qui n’existe pas encore.

Vous mettez en garde contre le « business du mal-être » et les charlatans. Et invitez aussi, « même dans ce livre », à ne retenir que ce qu’on veut… C’est important. Une clé va nous parler, une autre moins. Il faut que ça reste ludique, il n’est pas question d’inciter les gens à faire ce dont ils n’ont pas envie. Et je mets en garde, oui, car en cas de nécessité, il faut aller voir un psychothér­apeute de confiance. Il ne faut pas s’arrêter au premier, d’ailleurs ; il faut en voir deux, trois, et choisir celui avec lequel on se sent bien.

Ne surfez-vous pas sur cette tendance du développem­ent personnel ? Il se trouve que c’est maintenant que je peux en parler, je n’ai pas choisi d’avoir cinquante ans aujourd’hui. Moi, je fais cette introspect­ion depuis , et je suis seulement capable d’en parler aujourd’hui. Si c’est dans l’air du temps, tant mieux, cela veut dire que les gens ont envie d’aller mieux. On est dans une société où l’on perd confiance, où l’on a peur souvent, et j’ai juste envie de dire que ça ne sert à rien. Vous répétez votre âge, et dites que vous aimez vieillir. C’est rare! Parce qu’un demi-siècle, ce n’est pas rien ! C’est aujourd’hui que je suis la plus heureuse. On est moins con, plus sage, on connaît plus de choses, c’est là qu’on devrait profiter. Là et dans les années à venir. C’est pour ça qu’aujourd’hui, je n’aimerais vraiment pas mourir. En plus, comme mon corps a énormément morflé à  ans, j’ai l’impression d’avoir gagné du temps là-dessus : je ne verrai pas mon corps vieillir de  à  ans, je n’ai plus à m’occuper de ça, je l’ai déjà accepté !

Vous avez beaucoup de recul sur votre corps, d’ailleurs... J’en ris souvent, oui. Les médicament­s m’ont transformé­e. Je me disais : « J’ai l’air d’une grenouille », j’en riais avec ma fille. Un jour, je ne sais plus quelle activité je faisais, je pleurais sur mon apparence, la personne qui me donnait le cours m’a dit : « Mais votre corps a tenu debout pour vous, il a souffert et pourtant il vous porte, il fonctionne ». Je suis sortie en disant : « Mais c’est vrai, merci mon corps ! » Vous évoquez votre retour à la télé et avouez que vous avez eu peur de le rater… Au début, oui, j’avais peur. Pour ma mémoire, notamment. Je ne l’avais pas fait travailler depuis longtemps. J’ai eu peur de ne pas être à la hauteur, que les gens ne m’aiment plus… Retravaill­er m’a fait retrouver une légitimité. Je me suis battue ces  dernières années pour avoir une vie plus belle mais, au fond, c’était aussi pour retravaill­er.

‘‘ Pour les grosses épreuves, je n’ai pas la recette du bonheur ”

Ça dit quelque chose du monde du travail en général, et de la difficulté qu’on a à le retrouver en étant malade ou après l’avoir été ? Oui. J’ai eu peur en allant voir le médecin des assurances pour cette série : et s’il disait non ? Il a dit oui. Il y a une prime d’assurance et un contrôle tous les six mois…

Vous citez beaucoup d’auteurs, variés. Ils vous ont aidé ? Oui. J’adore les citations, qui résument en quelques mots des choses très intéressan­tes. C’est amusant de mêler les références. J’espère d’ailleurs donner envie aux gens d’aller lire des philosophe­s ou des résumés. C’est drôle de passer de Schopenhau­er, qui dit que l’on vit entre ennui et souffrance, à Spinoza qui dit qu’on vit pour le plaisir. J’ai eu des périodes Schopenhau­er, mais je suis arrivée à Spinoza !

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 ??  ?? Chaquejour,j’écoutebatt­remon coeur. Charlotte Valandrey. Éditions Le Cherche Midi. 416 pages. 18 €.
Chaquejour,j’écoutebatt­remon coeur. Charlotte Valandrey. Éditions Le Cherche Midi. 416 pages. 18 €.

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