Monaco-Matin

POUR L’ÉTERNITÉ

Ancienne déportée, icône de la lutte pour les droits des femmes et figure de la constructi­on européenne, la Niçoise a fait hier son entrée au Panthéon

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Simone Veil est entrée hier, avec son époux Antoine, au Panthéon à l’issue de l’hommage national présidé par Emmanuel Macron. Elle est la cinquième femme à reposer désormais aux côtés de grands personnage­s de la nation comme Marie et Pierre Curie, André Malraux, Jean Moulin, Jean Monnet...

Simone Veil est entrée hier avec son époux Antoine au Panthéon, où cette figure du XXe siècle reposera désormais parmi «les héros» qui ont fait « la France plus grande et plus forte » selon les mots d’Emmanuel Macron. Une intense émotion a marqué la cérémonie d’hommage qui a rassemblé des milliers de personnes un an après le décès, le 30 juin 2017 à l’âge de 89 ans, de l’une des personnali­tés préférées des Français. L’entrée au Panthéon de Simone Veil a été la décision de « tous les Français », qui le souhaitaie­nt tous « intensémen­t, tacitement», a déclaré le chef de l’État, dans son discours sur le parvis de l’imposant monument où reposent les « grands hommes» de l’histoire de France.

« Une boussole en ces temps troublés »

«Nous avons voulu que Simone Veil entre au Panthéon sans attendre le passage des génération­s pour que ses combats, sa dignité, son espérance restent une boussole dans les temps troublés que nous traversons », a précisé Emmanuel Macron. Massés sur les trottoirs, de nombreux anonymes ont essuyé des larmes lorsque les deux cercueils, recouverts du drapeau tricolore, sont entrés par le portail monumental. Les Français ont été invités à lui rendre hommage sous la coupole jusqu’à ce Simone Veil est seulement la cinquième femme à intégrer ce temple laïque dédié aux « grands hommes ». (Photo MaxPPP/EPA)

que les deux cercueils soient portés aujourd’hui dans le sixième caveau de la crypte. Le couple reposera aux côtés de

Jean Moulin, André Malraux, René Cassin et Jean Monnet, «quatre grands personnage­s de notre histoire» , qui « furent comme elle des maîtres d’espérance », selon le Président. Dans son discours, ce dernier est revenu sur la vie de combat de Simone Veil : la réconcilia­tion après la Seconde Guerre mondiale, au cours de laquelle elle a perdu ses parents et son frère en déportatio­n, la lutte pour les droits des femmes et l’engagement pour l’Europe.

« Combattant­e de l’Europe»

« Elle qui avait vécu l’indicible expérience de la sauvagerie et de l’arbitraire savait que seuls le dialogue et la concorde entre les peuples empêcherai­ent qu’Auschwitz ne renaisse sur les cendres froides de ses victimes. Elle se fit combattant­e de l’Europe », a-t-il déclaré. «Nous devons à Simone Veil de ne pas laisser les doutes et les crises qui frappent l’Europe atténuer la victoire éclatante que depuis 70 ans nous avons remportée sur les déchiremen­ts et les errances des siècles passés», a-t-il ajouté. Avant de lancer: « Puissions-nous sans cesse nous montrer dignes comme citoyens et comme peuple des risques que vous avez pris et des chemins que vous avez tracés, Madame. » Présent, l’ex-président François Hollande a estimé que l’entrée au Panthéon était «le meilleur message qu’on pouvait donner» à l’heure où l’Europe se déchire. Nicolas Sarkozy a, lui, appelé à retenir les leçons de « l’héroïne du XXe siècle ».

Rendre justice aux femmes

Pour Emmanuel Macron, cette panthéonis­ation permet de rendre justice aux femmes, qui n’étaient jusqu’à présent que quatre à y être inhumées : « Avec Simone Veil entrent ici ces génération­s de femmes qui ont fait la France sans que la nation leur offre la reconnaiss­ance et la liberté qui leur étaient dues.» Dans la foule, Béatrice, 43 ans, est venue avec ses enfants pour qu’ils se rendent compte de «la manière dont elle a oeuvré pour la liberté des femmes, pour qu’elles puissent choisir leur métier, d’avoir des enfants ou pas ». La cérémonie a été rythmée par la musique et les chants, comme l’Ode à la joie, de Beethoven, devenu l’hymne européen. L’émotion a été particuliè­rement palpable lorsque les jeunes choristes de la Maîtrise de l’Opéracomiq­ue ont, a cappella, chanté Nuit et brouillard, la chanson de Jean Ferrat consacrée aux victimes des camps de concentrat­ion. Simone Veil «portait sur le bras gauche le stigmate de son malheur, ce numéro 78 651 de déportée à Birkenau. Il sera gravé sur son sarcophage», a déclaré Emmanuel Macron. Avec elle, « c’est la mémoire des 78 500 Juifs et tziganes déportés de France qui entre et vivra en ces lieux ». Autre moment poignant : la minute de silence, « habitée » par la diffusion du «bruit du silence du camp » d’Auschwitz-Birkenau où a été internée Simone Veil. Un silence marqué par les bruits de la nature et le chant des oiseaux, seuls habitants des lieux. 1. En 1907, Sophie Berthelot, en tant qu’épouse du chimiste Marcellin Berthelot; en 1995, la physicienn­e et chimiste Marie Curie ; et en 2015, Germaine Tillion, ethnologue et résistante, et de Geneviève de Gaulle-Anthonioz, résistante.

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