Monaco-Matin

C’est dit

Adjoint de Roberto Martinez avec la Belgique, Thierry Henry retrouve les Bleus 20 ans après France 98

- MATHIEU FAURE

La photo a plus de dix ans. On y voit Thierry Henry à côté d’un môme qui a le sourire jusqu’aux oreilles. Ce gamin, c’est Kylian Mbappé. Demain, les deux hommes formés à l’AS Monaco se retrouvero­nt au même endroit, au même moment, avec le même objectif : se hisser en finale de la Coupe du monde. Mbappé débutera pour les Bleus et Thierry Henry prendra place sur le banc... de la Belgique. Car depuis deux ans, le champion du monde 1998, meilleur buteur de l’histoire des Bleus (51 buts), est l’un des adjoints de Roberto Martinez. Vingt ans après le sacre de la bande à Zidane, Henry retrouve les Bleus et son capitaine de l’épopée 1998, Didier Deschamps. Drôle de trajectoir­e. Un choix financier ? Pas du tout. L’ancien attaquant d’Arsenal perçoit de la part de la Fédération belge un salaire mensuel quelconque pour le monde du football (8 000 euros) et le reverse à des oeuvres caritative­s. Au vrai, Henry est en apprentiss­age. Depuis sa retraite en 2014, il a passé ses diplômes de technicien et dispose d’une licence de rang A, le grade nécessaire pour coacher une équipe profession­nelle. Une fois les crampons raccrochés, Henry a pris l’autoroute des consultant­s en intervenan­t de manière exclusive pour la chaîne Sky, le tout à un tarif 5 étoiles (5 millions par an). Une manière de rester près du terrain avant d’entamer la suite du processus. La suite, c’est la voie tracée par d’autres champions du monde 1998 avant lui, notamment Didier Deschamps, Laurent Blanc ou, plus récemment, Zinédine Zidane. Entraîner donc. « Quand tu es un bon joueur, tu te dis “je vais aller là plutôt que làbas”, tu choisis. Mais quand tu aspires à devenir coach, il faut que ton téléphone sonne, raconte-t-il à Canal + en début d’année. Mon téléphone a sonné ». Au bout du combiné, Roberto Martinez, le coach de la Belgique. Nous sommes en août 2016 et les Diables Rouges viennent de perdre en quart de finale de l’Euro face au Pays de Galles. Martinez lui propose alors un rôle d’adjoint, particuliè­rement en charge des attaquants car les Belges ne veulent pas passer à côté du Mondial 2018, surtout avec un tel matériel offensif : Hazard, De Bruyne, Mertens, Lukaku, Carrasco, Januzaj, Batshuayi... Sur le papier, Thierry Henry a tout gagné, tout connu : Coupe du monde 1998, Euro 2000 et Ligue des champions 2009 notamment. Il doit servir de guide à ce groupe de joueurs talentueux mais souvent hors du coup mentalemen­t dans le money time. « Thierry a un rôle énorme. Il a toujours ce haut niveau d’exigence qu’il avait lorsqu’il était joueur. Il a de plus ce savoir-faire et cette expérience d’avoir remporté une Coupe du monde, et ça n’a pas de prix pour nous qui devront abattre des barrières mentales pour y parvenir, estime Roberto Martínez dans une interview accordée au site de la FIFA. En équipe nationale, on passe peu de temps avec les joueurs et Thierry nous aide à optimiser le temps passé avec les joueurs avec sa qualité et son expertise. » A 40 ans, Thierry Henry reste un modèle. Gamin, Michy Batshuayi s’endormait avec des posters de «Titi» sur les murs de sa chambre. Et le passage de Zidane sur le banc du Real Madrid a confirmé la règle : on écoute toujours religieuse­ment une idole. Surtout quand elle a tout gagné. « Il a gardé une mentalité super jeune, et ça l’a aidé à gagner la confiance des joueurs. C’est aussi pour ça que Martinez a choisi quelqu’un comme lui, il est intergénér­ationnel » , explique Thomas Meunier à Sport/Foot Magazine. Romelu Lukaku, par exemple, semble transformé par sa collaborat­ion avec l’ancien Gunner .Denuméro 9 lourd et emprunté, le Mancunien est devenu un tueur, un joueur intelligen­t, collectif et destructeu­r au sens offensif du terme. Contre le Brésil, le tank Lukaku a massacré une défense que l’on disait jusqu’ici imprenable. « Romelu Lukaku doit encore améliorer sa capacité à marquer des buts quand les autres ne l’alimentent pas. S’il ajoute cet aspect à son jeu, il appartiend­ra à la catégorie des plus grands. Il ne se situe pas loin de cette catégorie », disait d’ailleurs Thierry Henry en mars dernier à propos de son poulain dans des propos rapportés par la RTBF. Pour d’autres, c’est surtout mentalemen­t que l’ancien capitaine des Bleus doit avoir de l’impact. « Peut-être qu’à un moment dans le tournoi, il va dire quelque chose qui nous aidera vraiment à un moment-clé », abonde le défenseur belge Toby Alderweire­ld. Voilà près de 22 ans que la Belgique n’avait plus eu les honneurs d’un dernier carré de Coupe du monde. Pour Henry, le match sera forcément particulie­r, notamment lors des hymnes nationaux. « Henry, ça a été un très très grand joueur, une icône du football. En espérant qu’il ne gagne pas cette demie. Si on gagne, je pense qu’il sera content. C’est avant tout un Français ! » a lancé Lucas Hernandez en conférence de presse. Mais « Titi » n’est pas du genre à

“Avec

Thierry, c’est différent parce que c’est mon entraîneur. On a des débats sur le football. Je regarde du football tout le temps et lui aussi. Il m’aide tellement avec tous les aspects du jeu : la compréhens­ion du jeu, la technique, les frappes…Je lui dois beaucoup.”

Romelu Lukaku, attaquant de la Belgique.

faire de sentiments, même si on peut toujours s’interroger sur le fait qu’il ait préféré parfaire son apprentiss­age avec la Belgique plutôt qu’avec les Bleus. Ou bien - et cela revient au même - pourquoi la Belgique a pensé à lui et non la France ? « On l’a un peu perdu de vue, il a peu de contacts avec la Fédération », déplore Noël Le Graët, le patron du football français, dans des propos relayés hier par Europe1. Le président de la FFF a ensuite embrayé sur la distance qui existe entre les Bleus et Henry aujourd’hui : « C’est la vie qui est comme ça. Il est en Angleterre depuis longtemps, j’ai moi-même très peu de contacts avec lui. » Henry, lui, est avant tout là pour poursuivre son apprentiss­age. Après le Mondial, il sera peut-être temps de prendre son envol sur le banc. Seul. Comme un grand.

Peut-être qu’à un moment dans le tournoi, il va dire quelque chose qui nous aidera vraiment à un moment-clé ”

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