Interdite de séjour, elle revient après sa sortie de prison
Qu’est-ce que vous faites encore à Monaco ? Vous faites tout pour retourner en prison ! Vous n’avez plus le droit d’y passer ! Malgré cette interdiction, on vous retrouve le 16 juillet, en plein milieu de la nuit, vers 23 h 50, dans la résidence « Le Bel Horizon», avenue Hector-Otto, avec votre petit chien où réside votre ancien compagnon… Il faut avoir un avis éclairé sur votre personnalité par un expert psychiatre. Un avis neutre ! Vous allez rester en prison d’ici là, jusqu’à vendredi. »
La cinquième fois en un mois !
Le président Jérôme Fougeras Lavergnolle a bien l’intention de mettre un terme aux incessantes allées et venues en Principauté de la prévenue malgré la mesure de refoulement notifiée le 28 avril dernier. Mais auparavant, il veut avoir la certitude qu’il juge une personne en possession de toutes ses facultés mentales. C’est une Estonienne de 36 ans, sans profession ni domicile fixe, fragilisée par une relation amoureuse interrompue au cours de l’année 2015. Depuis, son existence est une géhenne. Elle comparait, menottée, à l’audience de flagrance. Au moins pour la cinquième fois en un mois ! Et après trente-trois interventions des policiers au domicile conjugal. Efflanquée dans des vêtements portés à la diable, le teint blême sous une chevelure en désordre terminée par un chignon, cette femme montre une sensation d’oppression dans le box.
Elle fixe l’imposant crucifix placé au-dessus du siège présidentiel. Ses lèvres remuent. Implorerait-elle le Sauveur sur la croix afin qu’il lui épargne les tourments moraux qu’elle pressent et si difficiles à supporter qu’ils lui déchirent le coeur ? À moins de prier pour atténuer la confusion ressentie depuis que son ex-compagnon a renoncé volontairement à la poursuite de la vie commune ? Ses réponses rappellent toujours cette situation délétère. « Je connais les raisons qui m’ont poussée à revenir sur les lieux. Partie de Cap-d’Ail, accompagnée par une copine, j’allais chercher quelque chose à Beausoleil. Comme j’étais proche, je suis allée sonner chez mon petit ami. Vous savez, je vis depuis 2004 dans la région… Aujourd’hui, je ne travaille pas. Je n’ai pas d’adresse. Il m’arrive de dormir dans la rue. J’ai honte… » Il est clair que la prévenue a vécu une grande histoire d’amour, selon le procureur général adjoint Hervé Poinot.
« Il faut l’hospitaliser et non l’incarcérer… »
«Elle a mal fini. Madame n’arrive pas à s’en remettre. Venir et parler avec cet homme, pense-t-elle, lui permettrait de le reconquérir. Il a bien essayé d’aider son ex-compagne. Mais dès l’instant où elle a perturbé l’ordre public, il y a eu mesure de refoulement. Le parquet général ne veut pas la mort du pêcheur. Même les voisins sont importunés maintenant parce qu’elle le voit sur son balcon… Réfléchissez ! Passez à un mois ferme afin qu’on puisse la rapatrier vers l’Estonie où elle aura une vie meilleure. » Son avocat, Me Thomas Brezzo, va axer sa défense sur la demande «d’une véritable expertise médicale psychiatrique. Ordonnez-la ! Vous ne pourrez pas la condamner en faisant abstraction de cet examen. Peut-être ment-elle ? Mais essayons ! Il y a de la démence. Surtout ces derniers mois. La rupture l’a rendue instable. On ne peut pas continuer ainsi… » Vendredi dernier, à l’audience, c’est le président Florestan Bellinzona qui a lu le rapport médical. « Le praticien a conclu à un état dépressif atypique d’une reprise de la vie commune. Cette obsession délirante empêche toute activité sociale. C’est une personnalité fragile dans un état de démence. Il faut l’hospitaliser et non l’incarcérer… » L’Estonienne a bien compris pour le ministère public. Puisqu’elle bénéficie d’une relaxe, cette femme sera hospitalisée, puis rapatriée vers son pays. En espérant que les soins soient aussi bons qu’au CHPG.