Nuit sous tension dans le quartier des Moulins
Chaude nuit de dimanche à lundi à Nice. Caillassées, les forces de l’ordre ont riposté à coups de gaz lacrymogène. Un jeune de ce quartier Est venait d’être grièvement blessé en tentant de fuir à scooter
Les Moulins. Presque désert, hier après-midi. Et calme. Très calme. Place des Amaryllis, pourtant, tous les habitants ont en tête ce qui s’est passé dans la nuit. Une nuit mouvementée. Qui a fini en affrontement entre forces de l’ordre et jeunes des Moulins. Caillaissée, débordée, la police a fait usage de gaz lacrymogène pour disperser un groupe d’individus. « Une quarantaine de personnes », selon plusieurs habitants. Des tirs de LBD – lanceur de balles de défense – ont été entendus, créant l’émoi dans le quartier.
« Roulant à vive allure »
Ces violences urbaines ont éclaté après qu’un homme de 25 ans a été grièvement blessé à scooter. C’était vers 1 h 30. Selon une source policière, le jeune habitant de la cité de l’ouest de Nice circulait sur le boulevard PaulMontel, lorsqu’il a été repéré par un équipage de la police municipale. Repéré « car roulant à vive allure ». Toujours selon la police, le pilote aurait roulé sur la pelouse de la ligne 2 du tramway à hauteur du numéro 50 du boulevard. Il aurait alors dérapé sur l’herbe humidifiée par l’arrosage automatique, et percuté un arbre au milieu du terre-plein central. « Kick », comme on le surnomme dans la cité, aurait paniqué à la vue d’un deuxième véhicule de la police municipale arrivant en sens inverse. Le conducteur du scooter – une imposante cylindrée plus puissante qu’un TMAX –, « déclaré volé » selon la police, a été transporté sous bonne escorte à l’hôpital Pasteur 2 à Nice. « Il souffrait d’une fracture ouverte du fémur et d’une fracture à la hanche. Il a vraiment la jambe en très mauvais état », témoigne un pompier. C’est un équipage de la Bac qui lui a porté les premiers secours, alors que l’attroupement autour de l’accident grossissait, que la tension montait. Et que certains jeunes ont essayé d’extraire le corps de leur ami.
Une tout autre version
Dans le scooter, dont des dizaines de pièces étaient encore visibles au pied du palmier hier aprèsmidi, « une cagoule et une arme de poing » ont été découvertes, selon plusieurs sources policières. De quoi interroger sur les motivations de ce jeune homme connu de la justice. « Je ne comprends pas, ça m’étonne de lui. C’est un garçon tranquille, respectueux et rangé », affirme un riverain. « Il est vraiment gentil et pas du tout agressif », renchérit un « aîné ». « Ça n’étonne personne qu’il se soit pris un arbre, tout seul comme ça ? », interroge un jeune qui était sur place juste après l’accident. Un de ses amis assure : « Il n’a pas roulé sur le terre-plein, c’est la voiture de la police qui l’a percuté par-derrière ». Voilà la version qui circule aux Moulins... « C’est une bavure » ,jurent de nombreux habitants. Une version appuyée par la soeur de « Kick ». La jeune femme a contacté notre rédaction pour s’insurger contre la version policière. Et de s’étonner, photo à l’appui : « On ne voit aucun arbre à côté de lui ! Il ne l’a pas touché. C’est la voiture qui l’a touché. »
En garde à vue à l’hôpital
Le blessé a-t-il pu être projeté sous la violence du choc ? Ou traîné sur plusieurs mètres ? Selon nos informations, les images de vidéoprotection écarteraient toute collision entre la voiture de police sérigraphiée et le scooter. Pour Thomas Bride, le procureur de la République de permanence, « ce n’est pas une course-poursuite avec un véhicule qui roulait plusieurs dizaines de mètres derrière lui. C’est un scooter de 850 cm3 qui a pris la fuite, en empruntant les rails du tramway, et qui a percuté seul un arbre. Il n’y a pas de lien entre les repérages de la police municipale et l’accident. » Quant à l’usage du gaz lacrymogène, Thomas Bride l’estime, «en l’état, proportionné ». Hier soir, le jeune homme était en « garde à vue à l’hôpital, précise le procureur. Il est conscient, il a été opéré. Ses jours ne sont pas en danger. Il est en cours d’audition. » La sûreté départementale est saisie de l’enquête pour association de malfaiteurs, recel de vol et détention d’arme.