Monaco-Matin

-Juillet: il se tue avant la fin des poursuites pour terrorisme

Aleksander H., poursuivi pour avoir été l’un des maillons de la chaîne qui avait fourni les armes à Lahouaij Bouhlel, ne supportait pas d’être assimilé à un terroriste. L’Albanais s’est pendu en prison

- STÉPHANIE GASIGLIA

Aleksander H. a mis fin à ses jours le 8 juin à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis. Il a été retrouvé pendu avec un lacet dans sa cellule en début d’aprèsmidi. Cet Albanais de 38 ans était incarcéré dans la plus grande prison d’Europe, en banlieue parisienne, depuis décembre 2016, dans le cadre de l’enquête sur l’attentat du 14-Juillet sur la promenade des Anglais, à Nice. Sa détention provisoire venait d’être prolongée trois jours avant son suicide. Aleksander H. était mis en examen pour complicité d’associatio­n de malfaiteur­s en lien avec une entreprise terroriste et infraction à la législatio­n sur les armes en lien avec une entreprise terroriste. Terrorisme... ce mot qui le « traumatisa­it, selon son avocate, Maître Olivia Ronen. Cette implicatio­n qu’il niait avec force », assure-telle encore. Aleksander H. était soupçonné d’avoir joué un rôle périphériq­ue dans l’attaque terroriste au cours de laquelle le Tunisien Mohamed Lahouaiej Bouhlel a tué, sur la promenade des Anglais, 86 personnes et blessé plus de 450 autres. Le père de famille, né à Gjocaj en Albanie, qui vivait à Nice, était accusé d’avoir fourni un pistolet automatiqu­e et une kalachniko­v à un couple d’Albanais qui les avait ensuite vendus à un proche du terroriste de Nice. Aleksander H. s’est pendu alors que la justice s’apprêtait, selon son avocate, à abandonner les poursuites pour terrorisme.

« Catholique convaincu »

Et il le savait. « Mais ça n’a pas suffi, se désole Olivia Ronen. Les poursuites pour trafic d’armes restaient, bien sûr, mais plus celles l’impliquant dans une entreprise terroriste », précise-t-elle, très affectée par ce dossier. « L’instructio­n a beaucoup duré, il en était à la deuxième prolongati­on de sa détention provisoire. Il était à bout. » Depuis son interpella­tion, ce père d’un petit Ludovic, âgé aujourd’hui de trois ans et demi, s’était toujours défendu de sympathie pour l’islamisme. Bien au contraire. « C’était un catholique convaincu, bien loin des musulmans et encore plus de l’islam radical et du djihadisme », assure sa conseil. Ce funeste soir-là, il était même avec femme et enfant, sur la place Masséna. À quelques mètres du tueur. « Il voulait un avenir en France. Aleksander H. était poursuivi pour un rôle périphériq­ue dans l’attaque terroriste du -Juillet . (Archives Franz Chavaroche) Au départ, il avait espoir, il se disait que la vérité allait vite éclater et qu’on allait reconnaîtr­e que jamais il n’avait su à quoi allaient servir les armes», lâche Olivia Ronen. Et puis, il a perdu pied. En prison, sous régime spécial, dans une cellule, tout seul, «ilruminait. D’autant qu’il n’avait pas droit au travail à cause de son statut ». Son état mental, et son état de santé s’étaient considérab­lement détériorés.

Le corps d’Aleksander rapatrié en Albanie

Olivia Ronen a remué ciel et terre pour qu’Aleksander H. ne soit pas inhumé dans la fosse commune de Fleury-Mérogis. Et qu’il puisse être enterré en Albanie. Là ou sa femme et son fils sont partis s’installer après son incarcérat­ion. Elle y est arrivée. Elle souffle : « Mais au frais de la famille, je n’ai pas réussi à faire en sorte que l’ambassade d’Albanie prenne les frais de rapatrieme­nt du corps en charge. » Olivia Ronen est toujours en contact avec les proches d’Aleksander : « Nous sommes en train d’étudier les responsabi­lités engagées. » Avec, pourquoi pas, révèle-t-elle, « une suite judiciaire à donner ».

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