French Connection, héroïne de Roland Laurette
L’ex-professeur niçois de lettres et de culture générale, devenu écrivain, a recueilli les confessions d’Henri Malvezzi, principal chimiste du célèbre trafic de drogue
Etonnant et inattendu Roland Laurette ! Homme raffiné, cultivé, policé, très bien élevé. Et au milieu de cette distinction innée, une propension à écrire sur les voyous. Deux livres sur l’affaire Colonna et récemment, les confessions décryptées, commentées d’Henri Malvezzi, chimiste de la French Connection : Le paquet de gitanes bleues (Les Editions Ovadia). Trois livres aux antipodes de ses ouvrages déjà publiés. Roland Laurette. Fils de petits paysans du Sud-Ouest. Vivant à Nice. Passionné d’histoire de l’art. Agrégé de lettres modernes. Professeur de culture générale en classe préparatoire à HEC aujourd’hui à la retraite. Devenu écrivain à plein temps. Et donc, fasciné par les mauvais garçons ? Il lève la tête. Pointe le menton. Plisse les yeux. Ne dément pas. Argumente, amusé. « Je suis fasciné par les marginaux qui jettent sur le monde des gens ordinaires, un regard différent. Il y a chez eux, un refus des choses qui façonnent notre société. Mais au bout du compte, leur société parallèle possède les mêmes ressorts de fonctionnement que la nôtre.»
Humain et loyal...
La drogue. Devenue héroïne inédite sous la plume alerte de Laurette. Sniffée sous un autre angle. « Un jour, je suis dans un salon du livre. Quelqu’un me propose de rencontrer Henri Malvezzi, qui veut raconter sa vie. Oui, ça m’intéressait. » La rencontre entre le littéraire et « L’empereur de la came » a lieu à Marseille. « Il avait purgé 18 ans de prison. Il Roland Laurette a une propension à écrire sur les voyous. (Photo C. R)
avait payé sa dette et faisait partie des 4 ou 5 survivants de cette époque. » Malvezzi, jeune marin, beau gosse, croisant le chemin des plus grandes figures du banditisme. Bas-fonds. Règlements de compte. Parrains. Juge Michel. Coulisses d’un empire du milieu peu recommandable, mais avec ses codes. « Mon problème
était de comprendre le personnage. Ce qui m’a attiré, c’est son côté humain. Quand il a 18 ans, il est à bord d’un navire. Un jour, un copain marin, comme lui, se jette à l’eau. On essaie de le sauver. Malvezzi plonge de 18 mètres de hauteur au milieu des requins... Oui, c’est un voyou, mais c’est également un héros. Il nourrit une loyauté à l’égard de ceux qui appartiennent au même monde que lui.»
Témoignages intègres
Un livre tandem. Tantôt c’est Malvezzi qui cause, confie, exhume des secrets ou des cadavres. Tantôt, c’est Laurette, qui écrit. « Lorsque les caractères sont en italique, c’est moi qui parle. » Un roman noir au réalisme social, à l’écriture cinématographique, au style vivant, direct comme un coup de feu à bout portant, sincère et tendre comme on pouvait l’être sur le Vieux-Port de Marseille. Du grand banditisme aux témoignages intègres. Drôle d’alchimie sous morphine...