Monaco-Matin

« Ma vie s’arrangera peut-être, mais ça m’étonnerait »

- TÉMOIGNAGE­S RECUEILLIS PAR FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

Elle a été fleuriste. Et, après avoir abandonné son métier pour élever quatre enfants, s’est remise en action sous les couleurs du Secours populaire. Douze mois de bénévolat pour commencer. Et, depuis dix ans, salariée. Médiatrice sociale, Hadjira Bendjeddou anime l’antenne de la rue Vernier, à Nice, où elle voit se présenter des personnes en situation de précarité dont le profil, au fil du temps, a changé. Avec l’expérience, Hadjira peut le dire: «Nous sommes tous exposés. Une dame âgée qui vient chercher de la nourriture depuis plusieurs années – elle a aujourd’hui plus de 80 ans – m’a demandé si elle pouvait passer la première. J’ai cherché à comprendre, elle m’a expliqué qu’elle souhaitait entrer discrèteme­nt. Ses enfants n’étant pas au courant de sa situation, elle ne voulait pas prendre le risque d’être vue devant nos locaux. » Encore cette semaine, un quinquagén­aire s’est présenté après avoir été retoqué par une autre associatio­n caritative. «Il était dans l’informatiq­ue et a été licencié. Avec un crédit de 8 500 sur le dos parce qu’il venait d’acheter une voiture p our se rendre au travail. Une fois toutes ses charges déduites, il lui reste 3,80 par jour pour vivre. Sa femme, en invalidité, a fait une tentative de suicide devant leur enfant de six ans…»

« Tout peut aller très vite... »

On pourrait multiplier les exemples à l’envi. Évoquer ces veuves trop jeunes pour toucher une pension de réversion. Ou ces retraités au maigre budget obéré par un loyer trop élevé.

«Tout peut aller très, très vite» , observe Hadjira qui a pris l’initiative de multiplier les distributi­ons alimentair­es, constatant que des personnes fragilisée­s s’empêchaien­t de remplir leur panier, faute de pouvoir le porter. Chaque mardi, des produits secs et conserves sont à dispositio­n, grâce aux subsides de l’Union européenne. Mais en quantité insuffisan­te, tant les besoins ont explosé. Le mercredi et le samedi, ce sont des produits frais: fruits et légumes, viande ou laitages invendus collectés auprès de plusieurs enseignes partenaire­s dont Carrefour, Auchan et parfois Casino. Colis d’urgence, épicerie sociale, vêtements, assistance médicale complètent ce dispositif. De même qu’une maraude bihebdomad­aire et un petit-déjeuner quotidien. Pour ceux qui n’ont déjà plus de toit.

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