LE TRAVAIL DU DIMANCHE FAIT DÉBAT
Sujet épineux en Principauté, le travail du dimanche est sur le point d’évoluer sur le plan législatif. Une réunion entre le gouvernement et ses partenaires a permis d’en savoir plus
Autoriser les commerces du Carré d’Or et du Métropole Shopping Monte-Carlo à ouvrir dimanches par an : c’est l’un des axes forts du projet de loi en cours d’écriture. Voici tout ce qui pourrait changer.
Le travail du dimanche. Un dossier aussi épineux qu’attendu. D’autant plus dans un pays à obédience catholique, où le repos dominical est sacré. Gravé dans la loi. Toutefois, le contexte économique des régions voisines et les aspirations – parfois diamétralement opposées – des protagonistes sociaux et économiques de la Principauté poussent le gouvernement à revoir la législation. Tout en s’appuyant sur l’existant. Un beau micmac sur lequel planche le Département des Affaires sociales et de la Santé qui, ces derniers mois, a reçu tous les acteurs concernés, en tête-à-tête et en groupe. « Je suis pour une évolution sans àcoup, plutôt qu’un choc. Pas de coup de poing mais une solution adaptée. Je veux un projet de loi non agressif », confie Didier Gamerdinger, conseiller de gouvernementministre du Travail, de la Santé et des Affaires sociales. Lundi, il a rencontré une nouvelle fois les partenaires sociaux et les opérateurs économiques monégasques pour un point sur la réflexion engagée. Une copie presque ficelée, «à 90 %, assure-t-il, qui mérite encore quelques microréglages ». « Il nous reste la question de la grande distribution à régler. J’entends les demandes des gros mais je veux aussi être attentif aux petits. Je ne veux pas que les uns neutralisent ou tuent les autres. » On fait le point ici.
Que dit la loi actuelle ?
La loi n°822 du 23 juin 1967 modifiée, sur le repos hebdomadaire, pose le principe de l’obligation du repos dominical dans toutes les professions non visées par l’ordonnance souveraine n°11.145 du 5 janvier 1994 modifiée (lire page suivante). Des dérogations peuvent être accordées par l’Inspection du travail pour des périodes propices à l’ouverture dominicale comme les soldes, Noël ou le Monaco Sunday Experience (article 2). L’article 5, lui, mentionne que le repos hebdomadaire peut aussi être suspendu deux fois au plus par mois et au maximum six fois par an dans les établissements qui traitent des matières périssables ou qui ont à faire face, à certains moments, à un surcroît exceptionnel de travail.
Donner une base légale au Monaco Sunday Experience
Premier point figurant au nouveau texte en cours d’écriture: le Monaco Sunday Experience qui, depuis 2006, date de sa création, n’avait pas de cadre légal. À l’initiative du gouvernement, les commerçants de la Principauté sont invités à ouvrir neuf dimanches durant l’été. En contrepartie? Le remboursement d’une partie des charges patronales pour chaque dimanche ouvert durant cette période.
Deux zones touristiques
À l’instar de la France, « une approche intéressante », Didier Gamerdinger souhaite la création de deux zones. La première, dite «touristique saisonnière », qui couvrirait tout Monaco. «On autoriserait quinze dimanches par an, dont les fameux six de suspension. » La deuxième, une zone touristique internationale, dont le périmètre géographique engloberait le Carré d’Or et le Métropole Shopping Monte-Carlo, avec 31 dimanches d’ouverture dans l’année (dont les 6 de suspension). Une volonté d’autant plus marquée qu’en février ouvrira le complexe One Monte Carlo.
Le volontariat
« La loi mentionnera clairement qu’il doit être fait appel au volontariat. On peut être salarié et refuser de travailler un dimanche (...). Nous envisageons d’insérer une disposition indiquant que ce refus-là ne peut pas constituer un motif de licenciement», confie Didier Gamerdinger, faisant allusion à l’article 6.
Des contreparties adaptées
« Il faudra mettre en place des compensations. La loi le prévoira. Si vous travaillez un dimanche, on vous le doit un autre jour. L’idée, ensuite, c’est de compenser le salarié avec un jour supplémentaire ou une rémunération qui correspond à ce jour supplémentaire. Il faudra voir, en lien avec les opérateurs, si le salarié le prend directement dans la semaine ou s’il se constitue un capital pour s’offrir une semaine de vacances. Je pense qu’il faut être souple .»
La grande distribution
Si les protagonistes du dossier semblent – selon les dires du conseiller de gouvernement-ministre du Travail, de la Santé et des Affaires sociales – globalement satisfaits, reste la problématique de la grande distribution. L’enseigne Carrefour, par exemple, souhaite clairement une ouverture dominicale à l’année. «J’ai encore du travail, sourit Didier Gamerdinger. Ils sont en demande mais il ne faut pas qu’ils mettent à mal le petit commerce, les petits artisans. Il y a aussi une attente de la clientèle. Ce n’est pas facile.» Une réflexion qui doit, donc, encore être poussée et qui accouchera prochainement d’un texte. Lequel devra être approuvé par le gouvernement et le Palais. Avant d’être adressé au Conseil national pour être débattu, avant la fin de l’année.