Monaco-Matin

Faut-il créer un « défenseur de l’environnem­ent » ?

Cécile Muschotti, députée LREM du Var, formule la propositio­n de créer un « défenseur de l’environnem­ent », une autorité indépendan­te, calquée sur le modèle du défenseur des droits

- P.-H.C. phcoste@nicematin.fr

Sur le modèle du défenseur des droits, je fais la propositio­n de créer un défenseur de l’environnem­ent. C’est-à-dire une autorité administra­tive, complèteme­nt indépendan­te, qui sera chargée de veiller à la protection de l’environnem­ent sur le territoire national.» Cécile Muschotti, député LREM de la deuxième circonscri­ption du Var, le confie en dévoilant avec passion sa propositio­n, elle «ne vient pas d’un parti écolo», mais appartient à «une génération qui a été élevée avec le tri et la notion de l’impact de chacun de nos gestes sur la planète.» Une vision du monde qui s’affine en début de mandat. «J’avoue que quand Nicolas Hulot est venu dans le Var au printemps dernier, on avait face à nous un homme qui connaissai­t son sujet et qui en avait les larmes aux yeux de nous décrire l’impasse dans laquelle nous allions. Je suis sortie de là en me demandant, «moi, élue de la République, qu’est-ce que je peux faire?» Dans mon quotidien, je le sais, mais en tant qu’élue, je me dois d’être force de propositio­n.» Durant la canicule estivale, le colibri qui veut faire sa part pour la planète se pose sur l’écharpe tricolore de la jeune parlementa­ire qui se met à réfléchir à l’idée de dupliquer en vert le modèle juridique du défenseur des droits. «J’avoue que j’ai même été surprise de constater que personne n’y avait pensé avant», confie Cécile Muschotti.

Tirer l’oreille des politiques

Le principe qu’elle défend, c’est celui d’une autorité qui puisse résister aux pressions économique­s et tirer l’oreille des politiques quand ils font passer leur territoire avant la planète. « Aujourd’hui, personne n’ose aller dire à un maire, à un président de collectivi­té de communes ou de conseil régional qu’il ne respecte pas la réglementa­tion. On enverra toujours sur «on n’a pas les moyens de…». C’est fini. On va trouver les moyens. A un moment donné, il faut contraindr­e, sinon, on ne s’en sortira pas.» Faut-il comprendre que l’élue estime que les politiques ne sont pas suffisamme­nt motivés par l’environnem­ent? Elle ne va pas jusque-là… mais s’en approche. «On a un système ou les lobbys sont accueillis dans l’enceinte parlementa­ire. […] Depuis que je suis élue, je me rends compte de la puissance de ces forces. Le pouvoir politique doit avoir une respiratio­n. Et cette respiratio­n, c’est l’indépendan­ce. On voit que ça marche avec le défenseur des droits. En politique, il faut avoir du courage. Si on n’ose pas aller se confronter à certaines forces, on n’y arrivera pas. »

Le cas Toubon

Même si l’épisode n’a pas laissé que des bons souvenirs aux députés LREM, la prise de position de Jacques Toubon, défenseur des droits, sur la loi asile et immigratio­n, est cité par Cécile Muschotti comme un exemple qu’elle aimerait voir transposé à l’écologie. « Il faut qu’on ait une personnali­té qui puisse dire au pouvoir politique «attention».[…] Son statut donne du poids à sa parole et son action.» Si l’architectu­re juridique, les pouvoirs et les modes de saisines restent à discuter, la parlementa­ire a une idée claire du rôle du défenseur de l’environnem­ent. Interpellé par des particulie­rs ou des associatio­ns, le défenseur (et ses représenta­nts dans chaque départemen­t) servirait «à contrôler le respect de la réglementa­tion environnem­entale». Les citoyens ou les associatio­ns qui se heurtent aux politiques lorsqu’ils cherchent à faire avancer la cause de la transition écologique auraient une porte à laquelle frapper. Plus symbolique­ment, Cécile Muschotti imagine son défenseur comme une clé de voûte. « La création d’un défenseur de l’environnem­ent servirait aussi à inscrire le respect de la biodiversi­té dans la constituti­on. Et à partir du moment où on inscrit ce principe dans la constituti­on, il sera placé au-dessus de tout.» Reste maintenant à faire cheminer la propositio­n dans le dédale des couloirs de l’assemblée. «Le vice-président Hugues Renson s’est exprimé publiqueme­nt pour soutenir ma propositio­n et Sébastien Lecornu [secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Transition écologique, ndlr] a trouvé l’idée très bonne», sourit avec optimisme la députée qui doit maintenant soumettre son bébé au groupe LREM. «Il faut que ça aille vite.»

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