Régine Le Coz: «Les petites appellations à découvrir»
Sortir des sentiers battus, découvrir. « D’abord se faire plaisir », résume l’oenologue qui organisera le 2 mars 2019 la 13e édition du concours international Femmes et vins du Monde, à Monaco
Elle a découvert l’univers du vin à trente-deux ans. Une vocation relativement tardive et d’autant plus vive. « Auparavant, j’avais toujours cru que seuls les hommes et les curés pouvaient s’en occuper », s’amuse la Varoise Régine Le Coz qui, depuis son diplôme d’État en 2001, a exploré tous les recoins de l’oenologie. «Je suis la seule femme libre dans le monde du vin européen», dit-elle sans forfanterie. Formule audacieuse pour cet électron libre qui a fait étape dans la production, la recherche appliquée, le négoce et le conseil. Le côté obscur des foires aux vins ? «Des producteurs pris à la gorge quand leurs cuves sont encore pleines alors que la nouvelle récolte est annoncée, et des acheteurs qui en profitent pour tirer les prix vers le bas.» Pour le consommateur, c’est une aubaine: « Quand on sait que la grande distribution représente 60 à 70 % du marché, ces opérations sont synonymes de bonnes affaires et de belles découvertes. » Les chances sont minces pour un petit viticulteur d’être référencé toute l’année par les hypermarchés. Ceux-ci ont besoin de gros volumes incompatibles avec des surfaces très modérées. En revanche, des vignerons peuvent être tentés par une expérience ponctuelle : « C’est l’occasion de se faire connaître et de mettre en avant une appellation confidentielle. »
« Achetez au moins trois bouteilles »
C’est de ce côté-là, pense Régine Le Coz, que les consommateurs seraient avisés de regarder. D’autant que les foires aux vins permettent souvent de goûter, et donc de comparer. « C’est le moment où l’on peut se montrer curieux et se laisser surprendre. En se tournant vers des productions qui, de par leurs faibles volumes, n’auront jamais la tête de gondole. » Un conseil judicieux : « Achetez au moins trois bouteilles. La première pour faire goûter tout de suite à ses amis. La deuxième pour vérifier un peu plus tard la façon dont le vin s’est tenu et conservé. La troisième à conserver, lorsque ce test s’est révélé probant.» Autre suggestion: acheter un flacon, l’ouvrir à la maison et, s’il plaît, retourner au magasin, de préférence rapidement (DR) pour éviter une déception en cas de rupture de stock. En n’oubliant jamais cette vérité : « Le vin, avec ses mille composés, ainsi que le liège du bouchon, sont des produits vivants. Dont l’interaction peut avoir des incidences à ne pas négliger. » Régine Le Coz va plus loin : «Sur une caisse de six, chaque bouteille est unique. De même qu’entre deux barriques, le contenu peut différer. Si ce n’est à l’intérieur d’une même cuve, le vin n’étant pas tout à fait identique selon le moment où il est soutiré. » « Ne pas avoir d’avis tant que l’on n’a pas goûté », ajoute en conclusion l’oenologue qui regrette toutefois une tendance de ses contemporains à consommer toujours la même chose.
L’école du goût
D’où un appauvrissement certain de l’utilisation des sens, sauf chez les jeunes de 20 à 25 ans passés, justement, par ce que l’Éducation nationale appelle « l’école du goût ». L’odorat risquant cependant d’être mis à rude épreuve devant quelques « vins nature », donc sans sulfites ajoutés, mal maîtrisés. Le marketing les dope mais, souligne Régine Le Coz, « les uns savent faire, les autres non. »