Aéroport de Nice-Côte d’Azur: la comptabilité fait débat
Un nouveau système de comptabilité permet à l’aéroport de dissocier le produit de l’aérien des revenus issus du bâti, des parkings et des magasins. L’investisseur est gagnant. Quid des clients?
Un article de Tourmag, magazine professionnel du tourisme, a fait ces derniers jours l’effet d’un pavé dans la mare. Il y est révélé que le gouvernement, dans le courant de l’été, a autorisé l’aéroport de Nice-Côte d’Azur à modifier ses règles de comptabilité. Effectivement, un arrêté ministériel du 12 juillet lui permet de dissocier les recettes liées au trafic aérien de celles provenant de ses autres activités, dont le stationnement des voitures et les boutiques duty free. Le sujet est pointu. « Même les spécialistes s’y perdent », admet Jean-Pierre Sauvage, qui préside BAR France, une association regroupant des représentants de 70 compagnies. Celui-ci rappelle, « pour faire court », que les aéroports perçoivent différentes redevances rémunérant leurs services, à ne pas confondre avec la taxe destinée à financer la sûreté. Partout, le produit des dites redevances alimente une seule et même caisse. À une exception près: Charles-de-Gaulle. « Une première éraflure » ,déplore Jean-Pierre Sauvage, favorisée par un arrêté du 17 décembre 2009 au bénéfice d’ADP (Aéroports de Paris). «Cette disposition, nous l’avons toujours combattue. Selon nous, tout ce que le passager consomme doit venir abonder l’économie de l’aéroport et, ainsi, faire baisser les redevances. »
« Un échange de bons procédés »
Pour ce représentant des transporteurs aériens, retrancher de la comptabilité des éléments rémunérateurs revient à doper le retour sur investissement. Au profit notamment du groupe italien majoritaire Atlantia dont le titre a d’ailleurs plongé en bourse depuis l’effondrement du pont Morandi, à Gênes, dont il avait la gestion. «Nice se défend en arguant qu’il s’agit d’une décision de la ministre des Transports », observe Jean-Pierre Sauvage. «Ne faut-il pas y voir un échange de bons procédés (Photo Franck Fernandes) ? Un deal conduisant à une meilleure rentabilité, conclu lors des discussions sur la privatisation ? » Une autre question reste en suspens. Celle d’une éventuelle répercussion sur le prix des billets. « Cette crainte est infondée », promet-on du côté de l’aéroport de Nice-Côte d’Azur. Où la redevance sur les passagers au décollage, plafonnée en deçà du taux de l’inflation en été, sera minorée de 4 % durant les cinq mois de la période hivernale. Et cela sur cinq ans. « 4 % c’est bien, mais ce que nous réclamons, c’est une diminution d’au moins 6 % sur l’ensemble de l’année », rétorque le président de BAR France. « Il serait plus sain que les compagnies puissent abaisser leurs charges par un reversement des recettes commerciales dans la comptabilité de l’aéroport. Si l’on veut attirer des opérateurs, faisons-le avec des tarifs attractifs et non pas en chargeant la mule, comme on le fait actuellement. »