La guéguerre des Gaules
Dès la fin de l’été, Emmanuel Macron a cherché des noises à son peuple de Gaulois « réfractaires au changement ». La petite phrase, prononcée au pays des Vikings, était malheureuse. Surtout, elle épargnait ceux qui, dans ses propres rangs, incarnent si bien cet esprit rétif à l’autorité. Les mêmes qui depuis cinq semaines se bousculent à la sortie du camp de petitmacrum. Hulotix, Flesselix et surtout Collombix, trop pressé de regagner sa capitale des Gaules, préférant le rassurant aventin rhodanien au très hype capitole lutécien. Le cafouillage est de la taille d’un menhir. Il s’ajoute à la gestion calamiteuse de l’affaire Benalla, rappelant les spasmes médiatiques de la fin des précédents quinquennats. Il suffisait d’un vaste remaniement de rentrée, dès les premiers signes de lassitude. Trop simple, visiblement. Mais rien n’est perdu pour l’actuel président de la République. Le cap des mois n’est même pas atteint. Il reste trois ans et demi pour tirer le bilan définitif de son action. Qui donne à ce jour des résultats médiocres, poussifs, décourageants, bref ni pires ni meilleurs que ses prédecesseurs, avec un chômage entre et %, la croissance et une inflation autour des %. C’est bien le diable si l’une des réformes engagées cette année ne produit pas ses fruits. Sur les retraites, sur le chômage, sur la taille de la fonction publique. Déjà, les particuliers bénéficient de la baisse de la taxe d’habitation et des cotisations sociales. Déjà, les «premiers de cordée» profitent du nouveau calcul de l’impôt sur l’ISF, de contributions allégées sur les revenus du capital et les bénéfices des entreprises. Preuve que la colère des Français est contenue, c’est qu’elle ne déborde pas dans la rue. Et s’il fallait voter dimanche, rien ne dit, surtout pas les sondages, que La République en marche ne resterait pas le premier parti de France. Car Emmanuel Macron a cette chance, rare en Europe, d’avoir des opposants qui font tout pour ne pas rassembler au-delà de leur électorat naturel. En bons Gaulois qu’ils sont. Surtout, il joue en virtuose avec les règles de cette Ve République qui fête aujourd’hui ses soixante ans. Un formidable parapet de sécurité pour les Présidents fragilisés, sans être une assurance-vie politique tous risques. Charles de Gaulle, l’inventeur du concept, pourrait témoigner de ses avantages et des effets pervers, lui qui triompha dans les urnes puis qui quitta la vie politique en sur un non des Français à l’un de ses projets de réforme institutionnelle. Avant de discourir ce soir sur... la réforme des institutions, Emmanuel Macron se recueillera – quel hasard ! –, à Colombey-les-Deux-Eglises sur sa tombe. De Gaulle pour se réconcilier avec les Gaulois. Plus qu’un jeu de mots, un passage obligé.
« La Ve République ? Un formidable parapet de sécurité pour les Présidents fragilisés, sans être une assurance-vie politique tous risques. »