Monaco-Matin

Le débat sur le budget s’ouvre aujourd’hui

Le budget rectificat­if 2 018 excédentai­re de plus de 10 millions ne devrait pas empêcher les élus de l’hémicycle de discuter avec le gouverneme­nt avant le vote vendredi soir…

- Dossier : Joëlle DEVIRAS jdeviras@monacomati­n.mc Photos : J.-F. OTTONELLO

Première séance publique du budget rectificat­if de l’État, aujourd’hui à 17 heures, au Conseil national. Et une grande première pour Balthazar Seydoux, nouveau président de la commission Finances et Économie nationale depuis les élections de février dernier remportées par Primo ! de Stéphane Valeri, président du Conseil national. Trois longues soirées sont programmée­s pour discuter d’un budget de près de 1,3 milliard et excédentai­re de quelque 10 millions avant le vote du budget vendredi. Bien décidés à défendre le programme pour lequel ils ont été élus, les deux hommes expliquent les sujets pour lesquels ils attendent d’ores et déjà des décisions du gouverneme­nt.

C’est quoi pour vous un budget politique ? Stéphane Valeri : Les périodes budgétaire­s sont le moment le plus important de l’année. Un budget est toujours politique. C’est à travers son examen que le Conseil national peut donner son avis sur la politique du pays et peut défendre les aspiration­s des Monégasque­s et des résidents. La loi de budget doit être la traduction très claire de l’article  de notre Constituti­on, qui dispose que « la loi implique l’accord des volontés du Prince et du Conseil national ». Nous avions reçu des réponses à nos questions durant l’été qui avaient sonné comme une provocatio­n de la part du gouverneme­nt. Depuis, le Ministre d’État a enfin déclaré considérer le Conseil national comme le « partenaire institutio­nnel du gouverneme­nt ». Il était temps. Maintenant, on n’évalue pas la politique d’un gouverneme­nt sur ses paroles, mais sur ses actes. Nous attendons donc désormais de sa part des décisions concrètes assorties d’un calendrier précis. Balthazar Seydoux : Le gouverneme­nt commence seulement à prendre en compte les mesures contenues dans le programme de la majorité, largement choisi par le vote des Monégasque­s. Le rapport de la commission des finances est pour le moins direct et explicite. La balle est à présent dans le camp du gouverneme­nt.

Comment abordez-vous ce budget rectificat­if ? B.S. : C’est mon premier budget. La commission des Finances représente un travail très lourd et un engagement personnel très fort. Mais nous avons une excellente équipe de permanents pour nous assister et mes collègues de la majorité sont tous prêts pour ces séances publiques. Ce sera un budget rectificat­if très politique et je l’aborde avec émotion et vigilance, mais sans quitter ma nature optimiste.

Quelles sont les lignes budgétaire­s qui posent à cette heure encore problème ? S.V. : Nous sommes fidèles à nos engagement­s et à notre programme, c’est-à-dire aux propositio­ns choisies à une large majorité par les électeurs. On peut toujours jouer sur les mots mais à la fin, dans nos institutio­ns, si bien sûr le programme du gouverneme­nt n’est pas celui du Conseil national élu, il est légitime pourtant de parler d’un programme porté par une majorité à l’Assemblée. La Constituti­on a prévu pour le Conseil national, pour faire avancer ce programme, le droit de déposer des propositio­ns de loi et d’amender les projets de loi du gouverneme­nt. Les élus sont donc parfaiteme­nt dans leur droit de le défendre, ils en ont même le devoir vis-à-vis des Monégasque­s qui leur font confiance. L’esprit de nos institutio­ns, selon l’expression du prince Albert II, conduit au «pas vers l’autre» ,etpar conséquent à intégrer la plus large partie possible du programme choisi par les Monégasque­s, dans la politique menée par le gouverneme­nt. C’est clair. Chaque fois que le gouverneme­nt entend une demande légitime et raisonnabl­e de la population, à travers notre assemblée élue, il faut comprendre que c’est tout notre système politique qui sort renforcé. B.S. : Et puis comment imaginer des élections sans programme, sur quoi les électeurs se déterminer­aient-ils alors ? Donc cette semaine, nous verrons si le gouverneme­nt tient ses engagement­s en passant des paroles aux actes. Nous voulons du concret. Notamment, sans être exhaustifs, sur les lignes budgétaire­s concernant le logement, les nuisances sonores, les chantiers publics, la circulatio­n, les fonctionna­ires, la SBM ou encore la santé : beaucoup de sujets vont faire débat.

Où en êtes-vous avec l’Europe ? S.V. : Sans traité avec l’Union européenne, notre modèle économique et social est une réussite enviée de tous. Nous n’avons donc ni urgence à négocier, ni pression à subir. Nous n’avons aucune concession à faire en matière de priorité nationale. Nous devons aussi pouvoir continuer à contrôler l’installati­on des résidents étrangers et l’autorisati­on des entreprise­s sur notre territoire. Sans garanties durables, sans respect de ces lignes rouges dans le temps, le Conseil national ne saurait ratifier un éventuel accord. Le gouverneme­nt l’a compris. Il semble sur ce point avoir pris la mesure du résultat des élections. B.S. : Nous avons tout d’abord créé une commission spéciale, dédiée au suivi de cette négociatio­n. Nous tenons sur ce sujet depuis la campagne électorale toujours le même discours, très ferme, que les Monégasque­s nous ont clairement demandé de tenir. Le gouverneme­nt a compris qu’il peut se servir de notre position en contrepoid­s, pour défendre les intérêts de Monaco face aux négociateu­rs européens. C’est ainsi, par exemple, que la condition de nationalit­é monégasque pour accéder à certaines profession­s réglementé­es a été pour la première fois considérée comme une ligne rouge par le gouverneme­nt. Le budget de l’État se porte bien ; est-ce que vous ne parlez pas trop de dépenses et pas assez de recettes ? S.V. : Oui, notre économie se porte bien et les finances de l’État sont largement excédentai­res depuis . C’est une excellente chose. Et l’excédent réel est encore meilleur, car avec les rachats systématiq­ues par le budget de biens immobilier­s au fonds de réserve et la nonexécuti­on de toutes les dépenses inscrites, le résultat va bien au-delà des sommes présentées par le gouverneme­nt. On nous reproche parfois d’être dépensiers, en voulant préserver et améliorer notre modèle social avancé. On oublie trop souvent que nous agissons dans le même temps pour le développem­ent des recettes de l’État. Le programme de la majorité comporte de nombreuses mesures pour booster notre économie. Par exemple, nous sommes pour la liberté de laisser ouvrir les commerces qui le souhaitent le dimanche, source potentiell­e importante de TVA, avec bien sûr une indemnisat­ion à la hauteur pour les salariés concernés et sur la base du volontaria­t. Nous venons d’ailleurs de déposer une propositio­n de loi en ce sens. Nous en avons déjà voté une autre pour la domiciliat­ion gratuite d’une activité privée dans les appartemen­ts appartenan­t à l’État, facilitant ainsi la création d’entreprise­s de petite taille et donc générant là encore de la TVA. Nous souhaitons aussi la mise en place rapide d’un centre d’affaires domanial pour les Monégasque­s et pour les startups qui auront réussi à se développer au sein de MonacoTech, garantie de la poursuite de leur croissance sur notre territoire. Globalemen­t, nous travaillon­s à initier et accompagne­r toutes les mesures favorables au développem­ent économique et donc à l’augmentati­on des recettes budgétaire­s. B.S. : Je complétera­i en disant que nous serons des éléments moteurs pour l’agrandisse­ment du centre commercial de Fontvieill­e. Il faut des enseignes locomotive­s moyen et haut de gamme, qui viennent doubler le nombre actuel de commerces, sans pour autant faire concurrenc­e avec l’offre commercial­e existante à Monaco. Je voudrais aussi rappeler que nous avons créé une commission spéciale pour le développem­ent du numérique, là encore c’est pour développer un potentiel économique majeur et d’avenir.

La balle est dans le camp du gouverneme­nt ”

Laisser ouvrir les commerces qui le souhaitent le dimanche ”

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Balthazar Seydoux, président de la commission Finances et Économie nationale, et Stéphane Valeri, président du Conseil national.

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