Monaco-Matin

Les demi-aveux de Me DupondMore­tti

La défense a tenté de dédiabolis­er Wojciech Janowski, le gendre d’Hélène Pastor, pour lui éviter, peut-être malgré lui, la perpétuité. Le verdict est attendu ce soir

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Sur la porte d’entrée de la salle des assises du palais Monclar à Aix-en-Provence, il est affiché, comme au théâtre, « complet ». Des dizaines de personnes n’ont pu entrer écouter les dernières plaidoirie­s au vingt-deuxième jour du procès des accusés des assassinat­s à Nice en 2014 de la milliardai­re monégasque Hélène Pastor et de Mohamed Darwich, son majordome. Comme à son habitude, Wojciech Janowski, le commandita­ire présumé, reste debout, tête haute, jusqu’à l’arrivée de la Cour et des jurés. « Me DupondMore­tti, nous vous écoutons », invite le président Pascal Guichard. « Je ne sais pas à cet instant si la messe est dite. Peut-être avezvous déjà inscrit sur un papier la culpabilit­é de Janowski, peut-être même la peine de perpétuité. Je ne peux pas vous demander de déchirer ce papier s’il existe mais de le mettre de côté. » Le ténor débute sa plaidoirie dans un silence de cathédrale. La volteface est inattendue : « Wojciech est coupable d’avoir commandité l’assassinat d’Hélène Pastor. J’entends vous dire pourquoi ces mots que vous attendiez de lui sortent de ma bouche. J’affirme qu’il a tenté de s’expliquer mais qu’il n’a pas été cru et il s‘est vu opposer tout au long de cette procédure un mépris permanent, un mépris de classe, un mobile qui n’est pas le sien. » Janowski s’était enfermé jusqu’à l’absurde dans ses dénégation­s. Le personnage était apparu de plus en plus provoquant voire abject. Ses avocats, Mes DupondMore­tti et Febbraro, tentent par un tour de force et d’éloquence de lui redonner, en un après-midi sa part d’humanité.

« Pas nécessaire de tout noircir »

La défense dénonce l’argent du Rocher comme prisme déformant de cette affaire. Au point même d’alimenter les clichés et d’aveugler le juge d’instructio­n. Au point d’en oublier l’amour fou de Janowski pour Sylvia Ratkowski-Pastor. « On n’a pas volé son innocence à Janowski, on lui a volé son crime », tonne Me Dupond-Moretti, qui lance ses

banderille­s tour à tour aux parties civiles, à la PJ de Nice, à la presse et à l’avocat général Cortès... Tous manquent à ses yeux de prudence et d’humilité dans cette extravagan­te affaire. Le mobile de l’héritage parce que Janowski n’aurait pu se marier ? Foutaise au regard de la loi monégasque. Le mobile financier ? « Il a fait pschitt », affirme Me Febbraro. La véritable raison de ce crime serait un amour inconditio­nnel. « Je retiens, Sylvia, ce que vous lui (Photo archives Franz Chavaroche)

avez dit : “J’adorais mon mari. ” Et je retiens ce qu’il a dit : j’aimais ma femme. Vous avez déshumanis­é ce procès », reproche Me Dupond-Moretti à l’adresse de ses confrères des parties civiles. « Il n’était pas nécessaire de tout noircir. »

« Le minable de service »

Il y a un point de convergenc­e entre Janowski et Dauriac souligne-t-il : la maltraitan­ce psychique d’Hélène Pastor sur Sylvia, atteinte d’un cancer. La défense croit tenir « le seul mobile qui vaille » pour celui qui était « le minable de service » chez les Pastor. Reste les aveux circonstan­ciés de Pascal Dauriac. Cette idée prêtée au commandita­ire présumé d’éliminer Mohamed Darwich pour mieux brouiller les pistes fait tâche dans l’hypothèse d’un crime guidé par la passion amoureuse. La défense n’a d’autre choix que d’étriller Dauriac, le coach sportif:« Un pénitent qui permet à la justice de penser qu’elle ne s’est pas trompée, alors que l’autre, Janowski, n’a rien concédé », ironise Dupond-Moretti en égrenant les mensonges du coach ézasque. « Pascal Dauriac, je ne suis pas votre procureur, mais si l’on doit choisir une parole, il n’y a aucune raison de choisir la vôtre. »

Acte d’amour plutôt que crime crapuleux

Les défenseurs de Janowski veulent que les jurés retiennent l’acte d’amour plutôt que le crime crapuleux, qu’ils condamnent Janowski pour l’assassinat d’Hélène Pastor mais qu’ils l’acquittent pour celui de Mohamed Darwich. Il faut éviter le naufrage d’un Janowski qui a su si bien se saborder au cours des débats. Ce que résume Me Eric Dupond-Moretti en citant Baudelaire : « Je suis le bourreau de moi-même », « je suis de mon coeur le vampire ». Pour la première fois depuis un mois, Janowski, 69 ans, perd de sa superbe, pleure, ploie sous la menace de mourir en prison.

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Me Dupond-Moretti le défenseur de Wojciech Janowski.

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