Monaco-Matin

Double exposition pour le Centenaire de l’Armistice

Jusqu’au 9 novembre, la commune de Roquebrune-Cap-Martin propose de se replonger dans l’ambiance de la Première Guerre mondiale. Du côté des militaires, et du quotidien des habitants

- ALICE ROUSSELOT arousselot@nicematin.fr

Comment parler de la Grande guerre cent ans après ? Comment honorer les disparus, exercer le devoir de mémoire, sans pour autant s’enferrer dans les poncifs du pessimisme? Au CCAS de Roquebrune, en plein coeur de Carnolès, une solution de compromis a été trouvée. L’exposition qui y est (modestemen­t) proposée jusqu’au 9 novembre allie ainsi témoignage­s des familles touchées par le conflit et une certaine touche de légèreté. Pour bien distinguer, les panneaux respectent un code couleur. En rouge : les récits de guerre, récupérés auprès de la Société d’art et d’histoire du Mentonnais (SAHM). Avec un parti pris : celui d’axer sur l’humain. D’exhumer des «petits morceaux de vie dans la tourmente». En bleu : la presse des années 1910 à 1914, retrouvée grâce à un heureux concours de circonstan­ce (lire ci-contre). En bonne rubrique des chiens écrasés, on y relate les vols de saucisson, les cambriolag­es, les accidents tram-auto, les limitation­s de vitesse à 15 km/h. « Nous souhaition­s faire la balance entre un sujet grave et la légèreté de l’actualité d’avantguerr­e, avant que ça ne bascule vers l’enfer, résume Christine Coulet, qui s’est chargée, au sein de l’Office de tourisme, de faire un tri des documents et de donner une cohérence à l’exposition.

Insoucianc­e d’avant-guerre

« On remarque, avant le conflit, une vraie insoucianc­e. Cela fait sourire aujourd’hui, il y a quelque chose d’obsolète. On sent que les gens n’ont rien vu venir… » Quant aux années de cauchemar, nos yeux actuels ne les appréhende­nt pas forcément davantage. «Ily a beaucoup de tristesse dans les écrits, mais il y a aussi de l’espérance. Une confiance. » Des fratries se retrouvent décimées mais un sentiment de résignatio­n s’impose. La foi est là: «la guerre est utile, quelle que soit l’ampleur du sacrifice ». Mais force est de constater que cette dureté tranche avec les années qui ont précédé – plutôt frivoles, pour le coup. Constat d’autant plus douloureux qu’il permet d’imaginer (en partie) combien l’ordre de mobilisati­on générale a pu s’apparenter à une tragédie pour la population locale. Elle qui, jusqu’à la veille du drame, s’amusait follement. Allait danser après-midi et soirs, bénéfician­t même d’un service de tram pour rentrer, à 1 h du matin. Elle qui assistait à des concours hippiques, aux fêtes cabéennes. Elle qui célébrait l’arrivée des grandes personnali­tés dans la cité de Cabbé Roquebrune. Qui, française depuis peu, luttait – avec l’appui du maire Le Roy Dupré – pour que Carnolès et le cap ne soient pas rattachés à l’ambitieuse voisine, Menton. « Quand on lit les archives, ont se rend compte que les activités mondaines étaient très souvent relatées à l’époque, note Christine Coulet. On savait quand arrivait la princesse Eugénie – de 1 890 jusqu’au-delà de la Première Guerre mondiale. Elle n’était plus impératric­e des Français mais comme elle jouait à la bonne élève, elle restait la bienvenue. Eugénie menait le train de vie qu’elle avait connu par le passé, tout en respectant les lois de la République. » Et ce n’est que quelques petites années avant que la guerre n’éclate que Roquebrune s’offre un semblant d’opulence. « Ici, ce n’était pas un pays de Cocagne, il n’y avait que de petites exploitati­ons familiales. L’essor du tourisme, l’explosion de l’implantati­on des riches entre 1 892 et les années 1910 permet l’enrichisse­ment de tous », souligne Marsou Viale, de l’Office de tourisme. Attaché à ce que l’ensemble de l’exposition – à la fois amusante et terrible – soit ensuite présentée à des jeunes. En collaborat­ion avec l’associatio­n des parents d’élèves, elle devrait ainsi rejoindre une classe de CM2 de l’institutio­n Saint-Joseph.

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(DR) Les panneaux qui composent l’exposition se répartisse­nt en deux approches : d’un côté, les témoignage­s de guerre. De l’autre, l’actualité d’avant conflit.

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