Ipsen Pharma Biotech rêve de décrocher l’or
Les coulisses Le 3e groupe pharmaceutique français, implanté à Signes dans le Var, rêve, en y associant ses salariés, de décrocher le Shingo d’or, le Saint-Graal international de l’excellence
Après Coca Cola Midi, c’est l’une des plus grosses entreprises du Var, installée sur le Parc d’activités de Signes depuis 1990. À la troisième place des laboratoires pharmaceutiques français, le groupe Ipsen réalise un chiffre d’affaires d’1,9 milliards d’euros pour lequel le site varois a une part stratégique puisqu’il produit, fabrique, commercialise et exporte ses deux produits phare qui sont Decapeptyl et Somatuline, des traitements innovants qui soulagent et améliorent la vie des patients atteints de cancer et de maladie grave (cancers du sein, de la prostate, acromégalie, syndrome carcinoïde et tumeurs neuro-endocrines principalement). C’est à Signes que sont produits près de 50 % des ventes de médicaments du groupe (près de 3 millions de boîtes par an), exportés à plus de 80 % dans plus de 70 pays. Le site est agréé par les principales agences du médicament dans le monde. Son chiffre d’affaires s’élève à 260 millions d’euros.
Une stratégie basée sur les salariés
Si le groupe compte plus de 5 000 collaborateurs, ils sont 260 à Signes, auxquels s’ajoutent une quarantaine d’intérimaires qui devraient être embauchés durablement en 2020. Parmi eux, « beaucoup de jeunes ont été intégrés depuis janvier 2018, confie son président-directeur général Pierrick Lefranc. La moyenne d’âge ici est de 44 ans et le turn-over n’est que de 0,2 %. Les gens se sentent bien ici », explique-t-il. La raison ? Un management avant-gardiste a été mis en place il y a cinq ans qui fait de l’excellence de la maison l’affaire de tous et pour lequel les employés sont des ambassadeurs. La qualité de vie au travail est au coeur des préoccupations du groupe. « Le taux d’engagement est de 87 %, ça signifie que les salariés sont engagés vers la stratégie de groupe et sont très contents. À 99 %, ils disent avoir confiance en leur manager. » Pierrick Lefranc parle de « dynamique vers le haut ». Les échelons hiérarchiques ont été gommés pour mieux faire passer l’information rapidement vers les employés. Davantage de responsabilités ont été confiées aux salariés et le comité de direction, appelé « site leardership transformation», comprend 14 personnes toutes dévouées à la cause et la réussite du site comme le reste de l’équipe. « On a basé toute notre stratégie sur les salariés », souligne Pierrick Lefranc. À tel point que le président de ce vaisseau amiral et son équipe se sont fixés un objectif de taille : décrocher en 2020 le Shingo d’or, le Saint Graal international qu’aucune entreprise en France n’a jamais obtenu. « C’est la certification la plus compliquée à avoir au monde», reconnaît Pierrick Lefranc. Quatre certifications sont nécessaires : il faut être excellent en terme de productivité, montrer une croissance continue sur les cinq dernières années, avoir une qualité irréprochable et que tous les salariés soient engagés dans cette cause. Pour mettre toutes les chances de son côté, Ipsen Pharma Biotech a déjà procédé à trois audits différents, dont celui réalisé en 2017 par l’Institut officiel du Shingo himself dont le résultat leur promet
l’argent. «Mais nous, on veut l’or, sourit le président. Nous avons des ambitions très élevées. Nous sommes extrêmement exigeants, il y a une charge de travail importante mais nos salariés savent pourquoi. Nous avons un objectif commun. Nous sommes One Ipsen.» Et ambitieuse, l’entreprise peut l’être. Elle compte déjà quasiment toutes les certifications internationales pharmaceutiques, parmi les plus exigeantes au monde. Reste à porter cette équipe derrière les buts. Verdict en 2020.
« Nous avons des ambitions très élevées. »
En coulisses, l’innovation n’est pas criante. Les secrets de fabrication de ces médicaments sont bien gardés et la sécurité est primordiale. C’est tout juste si l’on croise de temps à autre, dans les couloirs, un employé vêtu d’une charlotte, de chaussons et de gants de protection ou travaillant derrière de grands hublots en verre en tenue de scaphandrier, tant la discretion est de mise. « Chaque bâtiment est dédié à un médicament », explique Pierrick Lefranc. Les couloirs blancs et aseptisés rappellent ceux des hôpitaux. Chaque service explique sur un petit tableau son process par le menu: fusion, extrusion, granulation, tamisage, cryobroyage…
millions d’euros d’investissement en
D’autres grands tableaux recueillent les impressions des salariés, leurs idées pour améliorer toutes les petites choses de l’entreprise mais qui peuvent engendrer du bénéfice en terme d’économies pour le groupe, de bien-être au travail, d’ergonomie… On y retrouve les mots «identité, résultats, idées d’amélioration, moral, réalisations, taux d’absentéisme ». Les objectifs et résultats sont notés chaque jour dans différentes catégories : clients, coût, qualité, EEHS (énergie, environnement, hygiène, sécurité). Il s’agit de « management visuel ». Plus loin, une affiche représente une photo de groupe des salariés avec ses mots : « One Ipsen, fiers de nos accomplissements.» Dans les couloirs de chaque service, les visages des salariés les plus méritants figurent chaque trimestre en bonne place sur des « wall of fame » ou murs des célébrités pour récompenser leurs actions et idées. Derrière les vitres épaisses, des machines dernier cri et de haute technologie rappellent que l’on fabrique ici des médicaments essentiels à la santé des patients atteints de cancers. En 2018, 26 millions d’euros ont ainsi été investis. « La pharmaceutique est un marché en perpétuel investissement, dans des machines, pour protéger les patients, sécuriser les médicaments, intégrer de nouveaux produits pour améliorer la rentabilité du site de Signes », confie Pierrick Lefranc.
Travaux en cours et emplois à la clé
Des travaux conséquents ont d’ailleurs commencé à proximité des trois bâtiments originels. « Aujourd’hui, nous sommes dans une phase de déploiement de trois autres gros bâtiments qui devraient permettre la création d’une cinquantaine d’emplois identifiés - les intérimaires - et, au-delà de 2020, par la création d’une centaine d’emplois », précise le P.-d.g. Coût de cet investissement qui doit s’étaler jusqu’en 2020 : 50 millions d’euros.
« Une bouffée d’oxygène »
Les nouveaux bâtiments, dont le premier devrait être achevé à la fin de l’année, accueilleront un futur site de production de médicaments, un entrepôt ainsi qu’un grand centre de vie pour les salariés avec une cantine et une salle de réunion pouvant accueillir jusqu’à trois cents personnes. L’ambition est de faire d’Ipsen « un site vert » sans plus aucune voiture dans la zone. « On aura un site piéton et, pour éviter de laisser nos véhicules au soleil, ils seront protégés par des panneaux photovoltaïques», explique Pierrick Lefranc. Enfin, Ipsen a signé récemment avec la chambre de commerce l’acquisition de 46 000 m² supplémentaires. Une réserve foncière qui permettra de développer encore de nouvelles activités et de nouveaux produits. « On se donne ainsi une bouffée d’oxygène, confie le P.d.g. Aujourd’hui on est extrêmement compétitifs, on est moins cher tout en étant au fin fond du Var. »