La blockchain: pour qui, pourquoi? Grand angle
On dit de cette technologie qu’elle est une révolution aussi importante qu’Internet. Comment les entreprises peuvent-elles se l’approprier ? Que peut-elle leur apporter ?
La blockchain – chaîne de blocs en français – fait partie des technologies à surveiller dans les années à venir. Elle pourrait révolutionner plusieurs secteurs de l’économie comme la banque et l’assurance, mais pas que… Les entreprises sont donc les premières concernées. Que peut en attendre un chef d’entreprise ? Comment peut-il se l’approprier ? Les éléments de réponse de Joël Viale, architecte de solution blockchain chez IBM, et Florent de Staël de la startup monégasque 10to11, intervenant lors de la table ronde organisée à Nice par l’Edhec Business School.
Définition et promesses
Créée il y a déjà dix ans, la blockchain est un livre de comptes décentralisé. « Chaque bloc qui constitue la chaîne correspond à une transaction qui permet d’écrire des informations dans le registre. Il est lié aux autres par des technologies de cryptographie, simplifie Joël Viale. Pour que l’information soit écrite dans le registre, elle doit être validée par les membres participant au réseau. Elle devient accessible et transparente et, surtout, infalsifiable. On ne peut la modifier qu’avec l’accord de tous les participants. » L’un de ses points forts, ajoute Florent de Staël, « C’est qu’elle apporte de la confiance dans l’écosystème. Son but est d’inscrire des informations dans un registre pour éviter qu’elles ne soient contestées par la suite. » Il existe deux sortes de blockchain : celle publique et son exemple le
plus connu est le bitcoin. Cette cryptomonnaie est libre et ouverte : sa conception est publique, personne ne possède ni ne contrôle le bitcoin et tous peuvent s’y joindre. Viennent ensuite les blockchains privées ou permissionnées davantage adaptées au monde des entreprises. On connaît à l’avance les participants, aussi appelés noeuds.
Quels usages ?
Mis à part le bitcoin, à quoi peutelle servir? Joël Viale de donner des exemples : « A la traçabilité alimentaire comme le montre la blockchain IBM Food Trust qui englobe tous les acteurs de la chaîne alimentaire: fermiers, distributeurs, fournisseurs, logisticiens, consommateurs… Elle permet de tracer plus facilement un produit, de connaître sa provenance, son trajet et de gérer les rappels si une étape de la chaîne est défaillante. » La blockchain est aussi utilisée dans la certification des diplômes – «Le MIT l’a adoptée » – et elle fait l’objet d’expérimentation dans le shipping. Livres de comptes, factures, bulletins de paie… Elle peut sécuriser de nombreux documents.
Quels avantages ?
Pour quelles raisons une entreprise sauterait-elle le pas de la blockchain ? « Pour ses leviers de valeur, analyse Florent de Staël. Elle apporte de la digitalisation, de l’automatisation dans les process et de la confiance dans un écosystème. D’où une réduction des intermédiaires, de temps, de coûts, de risques de fraude. Elle crée aussi de nouveaux business models et services.» Les cas d’usage de l’économie du partage et collaborative s’adaptent particulièrement bien à cette technologie car il n’y a plus besoin de ce tiers de confiance pour réguler le marché. Ainsi, un livret d’entretien d’une voiture sur la blockchain montre sa traçabilité et ôte des doutes sur l’achat.
Pour tous?
« La technologie fonctionne, souligne le cofondateur de 10to11, et il existe des outils permettant aux entreprises de toute taille et de tout secteur de démarrer très facilement dans la blockchain. » Avant de tempérer «L’entreprise doit sélectionner le bon cas d’usage pour démarrer, celui qui amène de la valeur, un retour sur investissement assez rapide. » Pour cela, un accompagnement en amont est une étape fondamentale. Avant de se lancer, le dirigeant d’une entreprise doit se demander comment la blockchain s’insère dans son business, ce qu’elle peut lui apporter dans son écosystème. Par exemple, y a-t-il des étapes chronophages qui pourraient être automatisées ? « Pour participer à la blockchain, il y a deux méthodes, précise Joël Viale. Soit on crée son propre réseau, soit on rejoint un réseau existant. C’est ce que l’on verra de plus en plus dans les années à venir, prédit-il. La solution Food Trust d’IBM a démarré avec Walmart, le géant américain de l’agroalimentaire, et depuis, des partenaires ont rejoint sur le réseau. Une entreprise de taille moyenne peut ainsi rejoindre un réseau existant dans un écosystème donné.Il existera à l’avenir des catalogues de réseaux de blockchains : » Florent de Staël, 10to11
Et au CEO de 10to11 de conclure : « La blockchain est une technologie qui va sans doute avoir autant d’impact que l’Internet mais il y a beaucoup de pédagogie et d’accompagnement à faire. Le marché est encore très jeune. »