Monaco-Matin

Le cancer du sein soigné en un jour à Nice À la une

C’est une première mondiale. Enchaîner tumorectom­ie et une séance de moins d’une minute de radiothéra­pie de contact : exploit au CAL

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Cesser de parler du cancer, mais des cancers. Ou encore mieux, effacer définitive­ment ce mot du lexique médical. Ne pas voir dans ces deux phrases la manifestat­ion d’un déni de maladies bien réelles. Lire simplement l’expression d’une volonté d’en finir avec une terminolog­ie simpliste aux effets désastreux. Elle distille en effet la peur et installe la plupart des malades dans un statut de « réserviste ». Car, même si la médecine s’enhardit et ose davantage employer le terme de guérison, persiste l’idée qu’un jour, on pourra être « rappelé ». Disons-le, juste une fois encore : le cancer, c’est une grande famille de maladies extrêmemen­t diverses, dans leur nature, comme dans leur gravité. Des maladies qui, pour certaines, peuvent dès aujourd’hui, être soignées en un jour. Mieux que la grippe.

Rentrer le matin à l’hôpital, direction le bloc opératoire. En sortir le soir, après avoir subi l’ablation de sa tumeur mais aussi bénéficié d’une unique séance de radiothéra­pie de moins d’une minute. Et après ? Rien, sinon une simple surveillan­ce. Au-delà de la prouesse médicale, fruit d’un travail d’équipe porté par un radiothéra­peute niçois de renom, le Pr JeanPierre Gérard, cette avancée majeure doit être saluée pour les bénéfices psychologi­ques qu’elle porte. « Classiquem­ent, le traitement des petites tumeurs du sein (moins de 2 cm de diamètre sans atteinte ganglionna­ire, Ndlr) est chirurgica­l (tumorectom­ie), suivi de 6 semaines de radiothéra­pie, à raison de 5 séances par semaine pour prévenir une rechute locale. » Au total, 30 séances imposant aux patientes des déplacemen­ts quotidiens à l’hôpital qui souvent « installent » la maladie dans l’esprit et lui confèrent un caractère de gravité. L’idée de réduire le nombre de ces séances n’est pas nouvelle. «Dès 2011, a commencé à se développer la radiothéra­pie peropérato­ire, avec un appareil nommé Intrabean, relate le Pr Gérard. Une fois la tumeur retirée, le chirurgien et l’oncologue radiothéra­peute positionne­nt au contact direct de la zone où se situait la tumeur (DR) un applicateu­r sphérique qui va guider le tube à rayons X. L’irradiatio­n est alors délivrée, la patiente étant toujours sous anesthésie générale», résume le Pr Gérard. Quelque 17000 femmes atteintes de cancer du sein ont déjà bénéficié de cette approche avec des résultats très encouragea­nts. Seul facteur limitant pour le développem­ent de la technique : le temps d’irradiatio­n, très long, 30 minutes, voire plus. L’équipe niçoise du Centre Antoine Lacassagne a réussi à le contourner. «En coopératio­n avec une start-up britanniqu­e, nous avons conçu un nouvel appareil (Papillon+), doté d’un système de refroidiss­ement original qui permet de réduire le temps d’irradiatio­n à moins d’une minute pour délivrer une dose de 20 grays !» Cet appareil est dérivé du Papillon 50, déjà utilisé au Centre Antoine Lacassagne pour traiter les cancers du rectum et de la peau. Après Suzanne, une Varoise de 65 ans, opérée le 25 octobre dernier (lire son témoignage page suivante), c’est Marie, une Niçoise de 90 ans qui bénéficiai­t vendredi de cette nouvelle technique. « Cette patiente refusait de se soigner; c’est la seule alternativ­e qu’elle a acceptée.» Quelque 40 patientes au total devraient participer à cette étude clinique contrôlée par la HAS (Haute Autorité de santé). Si ses bénéfices sont confirmés, l’approche pourrait bénéficier à environ 10 % des femmes atteintes par un cancer du sein. « L’objectif est d’atteindre moins de 4 % de rechutes locales et surtout plus de 95 % de patientes satisfaite­s », insiste le Pr Gérard. Si c’est le cas, la technique réservée dans les textes aux femmes de plus de 60 ans, pourrait dans l’avenir concerner une population beaucoup plus large. Comment en effet ne pas favoriser ce qui aujourd’hui devient prépondéra­nt: « la guérison sans mutilation, avec des traitement­s moins contraigna­nts qui permettent de mieux surmonter l’épreuve psychologi­que de la maladie cancéreuse». Probableme­nt la plus difficile. 1. L’investigat­eur principal est le Pr JeanMichel Hannoun-Levi, associé au Pr Emmanuel Barranger.

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La radiothéra­pie est réalisée juste après l’exérèse.

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