Patrick Poivre d’Arvor, s’asseoir avec un livre Cannes
L’ancien présentateur du 20 h sera présent samedi à 15 h pour animer une table ronde à la médiathèque Noailles dans le cadre des Rencontres Cinématographiques
Journaliste, écrivain (Prix Interalliés pour L’Irrésolu paru en ), ambassadeur à l’UNICEF pour les pays francophones, vous vous voyez comme un défenseur de la langue française ? Pour moi la langue française est très importante. À chaque fois que je repère un anglicisme dont on pourrait se passer, ça m’attriste. Notre langue est menacée par rapport à la puissance de l’anglais. Alors affirmons ce goût que nous avons de la langue française. Nous sommes millions de locuteurs !
Depuis février , vous animez l’émission Vive les livres sur CNews. Quelques coups de coeur cette année ? Il y a eu beaucoup de bons livres mais il n’y en a pas eu un qui a surnagé. Peut-être Chien-loup de Serge Joncour ou La révolte de Clara Dupont-Monod.
Rimbaud ou Saint-Exupéry? Vous ne m’obligerez jamais à choisir [rires]. J’ai besoin de Rimbaud pour le jour et de St-Ex pour la nuit. J’ai bien connu la veuve de St-Ex qui était la meilleure amie de ma grand-mère, à Grasse. Elle m’a donné beaucoup de livres de son mari, elle m’a envoyé des cartes postales en m’appelant son Petit Prince. Rimbaud, j’en parle dans Éloge des écrivains maudits. J’ai une sorte de fraternité avec cet homme qui a été un météore dans notre ciel. J’ai suivi ses traces au Harar en Éthiopie, en Égypte et ailleurs…
Un livre qui a changé votre vie ? Le petit Prince ! Quand j’étais petit, à ou ans, j’avais ce goût du désert que j’ai gardé. Je vais partir dans le désert péruvien avec mon fils dans une semaine pour faire un trail de km en trois jours. J’adore ces endroits où on est peinards, coupé du monde.
Certains de vos livres ont été adaptés à l’écran… J’aime l’interprétation qui est faite, c’est normal, chacun est dans sa bulle et ces bulles se confrontent et existent différemment.
Vos goûts en matière de cinéma? J’aime le noir et blanc, notamment l’émission Le cinéma de la vers minuit. Revoir les films en noir et blanc, j’adore, ça ne se fait plus et c’est regrettable. Quai des brumes est sublime… Oui, c’était au printemps dernier, au Casino de Paris. On m’a demandé de jouer le rôle d’un metteur en scène d’opéra qui rencontre, entre autres, Mozart, Bach, Beethoven et Satie. Je crois que ça a aidé beaucoup de gens à venir à la musique classique.
Vous aimez jouer sur scène ? Je ne suis pas vraiment acteur. J’ai également fait quelques apparitions pour une pièce, Garde Alternée, ou encore dans Taxi , dans le rôle d’un présentateur du journal. La composition était relative, mais j’ai à peine vu mon metteur en scène [Gérard Krawczyk, Ndlr], que je vois cette semaine aux RCC, ans après [rires].
À l’écriture d’un nouveau roman ? J’en ai un qui va sortir tout début janvier, La vengeance du loup. Je suis en train d’écrire, ici, la suite de ce livre. Je ne peux pas m’empêcher d’écrire. Il relate l’histoire d’un petit garçon qui veut devenir président de la République.
Ça ne vous manque pas un peu ces débats politiques ? Les trois-quatre premiers mois après mon départ de TF, j’avais un peu de mal. Je suis d’ailleurs parti avec La Dépêche du Midi pour couvrir quand même l’élection d’Obama. Je connais un peu trop les ficelles de la communication institutionnelle. Je reste passionné, mais je ne suis plus bluffé.
Vous avez été l’homme du h pendant une trentaine d’années… à millions de gens nous regardaient à l’époque. C’était une réunion de famille. Aujourd’hui, la multiplication des chaînes, Internet, fait que l’info a été donnée en amont et on ne l’apprend plus au h. Plus d’info c’est bien, mais attention à la désinformation. Il faut multiplier les vérifications. Quand on demande aux jeunes où ils ont puisé l’info ils répondent « sur les réseaux sociaux » la plupart du temps.
Donald Trump cherche souvent à jeter l’opprobre sur les médias… On voit bien que la plupart de ces personnages ont été élus grâce à la détestation qu’ils ont du système dont ils sont pourtant des purs produits. Trump a été élu contre Washington et contre les médias. Il en fait un facteur majeur, et les gens applaudissent. Un discours qui engrange, aujourd’hui, de plus en plus de voix en Italie, en Hongrie, en Pologne, ou même en Allemagne et il faut y faire très attention.
millions d’euros de recette de la taxe sur les carburants réaffectés au budget général, un désaveu écologique après le départ de Nicolas Hulot du gouvernement ? Il a servi d’aiguillon pendant un bon moment, et je peux comprendre que les gens soient méfiants si de ce qui était supposé être une partie du soutien écologique vient renflouer les caisses de l’État. C’est compliqué à comprendre, on se demande quelles sont les causes défendues. Il y avait beaucoup de choses derrière tout ça et notamment un rejet des inégalités flagrantes.
Le gouvernement garde le cap… % de l’augmentation dépend du Qatar, de l’Arabie Saoudite, etc. Il faudrait donc automatiser une baisse de ces taxes pour éviter des augmentations comme ça, il faut aller vers la transition écologique mais avec des systèmes qui évitent que ceux qui ont le moins soient touchés ainsi. Macron a été formaté par l’ENA. Gérard Collomb et Jean-Yves Le Drian servaient à lui ouvrir les yeux, loin des schémas technocratiques. Aujourd’hui, c’est différent. Il manque une opposition forte face à lui. Le PS est inaudible, les Républicains sont divisés… La France Insoumise est une des seules vraies oppositions et a capté les suffrages de la gauche. Le Rassemblement national, ceux de la droite.
Le président ne veut pas de technocrates autour de lui ? Il a été élu contre eux, sans eux, mais aujourd’hui, l’ancien monde n’est pas si loin que ça. Il ne joue pas sur les corps intermédiaires comme les syndicats et les maires. Il a un peu saqué les maires au début et aujourd’hui ça lui retombe dessus. D’ailleurs, il ne va pas au rassemblement des maires de France. Il est orgueilleux, ne supporte pas qu’on lui impose, il se dit maître des horloges… jusqu’au jour où quelqu’un d’autre décide. Parfois, il faut savoir faire de petits pas de côté…
Macron est orgueilleux ”