Vrais ivoires mais faux certificats : trois ans requis
Deux hommes avaient tenté de tromper un commissaire-priseur de en lui présentant de faux certificats lors de la vente de deux défenses d’éléphant. Ils étaient jugés hier à Grasse
Jean, 78 ans, Auguste, 71 ans, René, 59 ans, comparaissent libres devant le tribunal correctionnel de Grasse. Mais lors de leur interpellation début 2014, ils avaient été placés, selon les cas, de trois à cinq mois en détention provisoire. Cher payé, estiment leurs avocats, dans une histoire non pas de trafic d’ivoire mais de faux certificats. L’affaire remonte à l’époque où un commissaire-priseur de Cannes s’était spécialisé dans la vente d’ivoire. De riches Chinois ou Qataris étaient prêts à payer très cher des défenses d’éléphants. Jean a voulu saisir l’aubaine en mettant en vente deux défenses spectaculaires « héritées, dit-il de son père ». Plus de deux mètres, pesant 55 kg chacune et pouvant se négocier entre 55 000 et 80 000 pièce. Le commissaire-priseur s’aperçoit très vite que le certificat délivré par l’administration pour autoriser la vente est un faux. Les gendarmes sont alertés. Quelques semaines plus tard, les quatre amis sont sous les verrous. Deux autres défenses et divers objets en ivoire seront saisis lors des perquisitions à Biot et dans l’Hérault.
« L’éléphant a accouché d’une souris »
Le procureur de la République Marie-Nina Valli souligne que les prévenus «ne peuvent justifier de la provenance de (Photo Eric Ottino) ces objets.» Le magistrat requiert trois ans de prison et 40 000 euros contre Jean et Auguste, 30 mois et 20 000 euros d’amende contre René et Gérard (ce dernier est absent de son procès). Si le parquet ne demande pas d’incarcération, c’est uniquement en raison «de l’âge et de l’état de santé des prévenus», précise-t-il. À la défense de René, Me Zapi ironise: «On nous a parlé de trafic. Le dossier s’est dégonflé. L’éléphant a accouché d’une souris.» Son client n’est pas, selon l’avocate, concerné de près ou de loin par les faux certificats. Elle plaide la relaxe. Me Gagliano (conseil d’Auguste) regrette qu’on stigmatise «un brocanteur issu de la communauté des gens du voyage qui n’a pas la moindre condamnation depuis 1990». En 2003, Auguste avait d’ailleurs obtenu de la préfecture de faire du négoce d’ivoire. «Il n’a jamais eu l’intention de fraude et n’a causé aucun préjudice et ces défenses n’ont pas été datées », souligne Me Gagliano qui plaide à son tour la relaxe. Me Candice Baudoux critique, en juriste, les poursuites pour tentative d’escroquerie. Elle aussi demande au tribunal de ne pas condamner Jean qui l’affirme: « Si j’avais su que ces certificats étaient des faux, je n’aurais jamais pris le risque d’aller en salle des ventes ». Le tribunal a mis en délibéré son jugement au 11 décembre.