Sur les traces de leur fils, disparu depuis 6 mois
Depuis août dernier, Régine et Luc Martin sont sans nouvelles de leur fils Émilien, que l’on connaît aussi sous le nom de « Querdal ». Sa dernière preuve de vie les a conduits jusqu’à Menton et en Italie
L’attente, interminable, depuis des mois. De trop longs mois. Depuis le 13 août dernier au matin, exactement. Ce jour-là, une employée municipale de la ville de Menton retrouve la banane contenant le téléphone portable et la carte bancaire de leur fils dans les rues de la ville. Puis, plus rien. « C’est sa dernière preuve de vie », souffle sa mère Régine Martin, épuisée. Le couple, qui habite dans le nord-est de la France près de Nancy, est de retour à Menton après un périple de 15 jours à travers l’Italie, sur les traces de leur fils. Car malgré le silence, l’espoir est toujours là.
« Onze mois à pied jusqu’en Italie »
Pour comprendre la détresse de ces parents, il faut revenir sur l’histoire de leur fils, Querdal, âgé de 31 ans. De son vrai prénom, Émilien. « Il s’était fait un cercle d’amis littéraires rencontrés il y a quelques années sur Internet. Ils s’étaient tous donnés des surnoms. Querdal est celui qu’Émilien avait choisi », explique son père, Luc Martin. Malgré deux masters de Littérature en poche, Querdal avait « du mal à trouver sa place dans la société, même s’il avait beaucoup d’amis ». Le 1er septembre 2017, il décide d’entreprendre un voyage d’onze mois à pied, seul. Parti de Compiègne, dans l’Oise, il va parcourir des milliers de kilomètres à travers les petits sentiers de la Suisse et de l’Italie. « Il suivait les chemins de la Via Francigena [voie de pèlerinage médiéval menant à Rome, N.D.L.R]. Son objectif était d’arriver tout au bout du talon de la botte de l’Italie », se rappelle sa mère.
Un voyage préparé minutieusement
Le voyage avait été préparé minutieusement. Six mois avant de partir, le trentenaire avait appris l’italien. « Tout ce qu’il transportait avait été soigneusement pesé. »
Et vint le jour du départ. « Il nous donnait régulièrement des nouvelles par SMS. Au début, il disait simplement dans quel village il se trouvait. Puis ses messages se sont multipliés. Il racontait des anecdotes, partageait ses sentiments. Il inscrivait tout dans des carnets qu’il nous envoyait au fur et à mesure. Comme il était parti sans appareil photo, il demandait aux personnes rencontrées sur son chemin, avec qui il avait échangé, de nous envoyer les images par mail. » De fermes alternatives en lieux de pèlerinage, Querdal avait l’air d’avoir trouvé sa place. « Il nous racontait l’incroyable nuit de Noël qu’il avait passée chez une famille rencontrée dans un monastère », se souvient sa mère. « Il y a une anecdote que j’aime particulièrement, poursuit son père, ému. C’est celle de l’épicier d’un village italien qui lui a offert les aliments qu’il était venu acheter en échange d’une carte postale qu’Émilien devait lui envoyer à sa prochaine étape. Devinez quoi, il l’a vraiment envoyée. »
Des textos mystérieux
Début août, Émilien est de retour en France après avoir traversé la Sicile, la Sardaigne et la Corse. Il pose son sac à dos le 5 août à Marseille, où il retrouve une de ses amies. « Je l’ai eu quatre jours après au téléphone, tout allait bien », confirme Régine Martin. Mais quelques jours plus tard, il rompt brutalement avec sa famille et ses amis.
Le 12 août au soir, Émilien envoie une série de messages mystérieux. « J’aurais bien aimé comprendre, écritil à ses parents. Tant pis, ce sera pour une autre fois. »
À son meilleur ami à Paris, il envoie les identifiants de tous ses comptes sur Internet. A celle qui l’héberge à Marseille, il laisse son chien – qu’il a adopté au cours de son périple, dans la région de Lecce – et l’ensemble de ses affaires. « Il a laissé un mot avec de l’argent en disant : “C’est pour le chien”. »
Dernières traces à Menton
Le lendemain, sa banane contenant son téléphone, sa carte bancaire et son dernier carnet de voyage, est retrouvée à Menton par une employée municipale. « On n’est pas partis tout de suite, on s’est dit que ses affaires avaient pu être volées à Marseille et retrouvées sur la Côte d’Azur », explique Luc Martin. C’est une des amies d’Émilien, Delphine, en vacances dans la région, qui se rend sur place en premier. « Elle est allée interroger des gens. Ça l’a menée au magasin “Super U” de Garavan. Un vendeur d’olives lui a confirmé qu’il avait vu Émilien. Apparemment, il cherchait à confier son sac à quelqu’un et paraissait paumé. »
Elle demande à consulter la vidéosurveillance du supermarché.
Les images confirmeront la présence du trentenaire. Pleins d’espoir, Régine et Luc Martin débarquent à Menton. « Pendant 5 jours, on a cherché dans tout l’arrière-pays et sur les plages au petit matin. » Rien. Deux jours avant leur retour, la police mentonnaise leur confie que leur fils a été arrêté le 13 août à Camporosso et pris en charge par la Croix Rouge italienne pour une blessure à la main. Mais là encore, la piste ne donne rien. Émilien est déjà reparti. La dernière et seule preuve de vie resteront les images de vidéosurveillance du Super U.
Une attente insoutenable
Depuis ce terrible 13 août, Régine et Luc multiplient les recherches. Malgré des reportages à la télévision italienne, ils n’ont jamais reçu une seule piste concrète. Ces derniers jours, ils viennent de boucler un autre reportage avec TF1 (lire ci-dessous) pour lequel ils ont sillonné l’Italie, jusqu’à Menton. Une attente insoutenable pour ces parents de trois enfants. « On a recontacté toutes les personnes qu’il avait rencontrées au cours de son voyage. Ça fait près de 80 numéros ou adresses mail. Nous sommes allés les voir pour certaines. Rien. » Hier matin, ils étaient reçus au commissariat de Menton. Malheureusement, l’enquête piétine. « Il n’y a pas de nouveaux éléments. Le dossier reste ouvert, regrettent les parents. Tout porte à croire qu’il s’agit d’une disparition volontaire. Il a visiblement organisé son départ. S’il ne veut pas rentrer, s’il ne veut pas nous parler, qu’il appelle quelqu’un, n’importe qui. On veut juste savoir s’il va bien. » Régine et Luc appréhendent désormais le retour chez eux. « On est dans l’action depuis des mois et surtout ces quinze derniers jours, à chercher Émilien dans chaque village où il a été. Maintenant on va rentrer… et attendre. Ça va être terrible. »
Toute personne susceptible de détenir une information permettant de retrouver Émilien Martin est invitée à contacter son père, Luc Martin, au 06.85.93.56.25.