La semaine de Roselyne Bachelot
Lundi
Mille pardons, j’avais promis que j’éviterais de ne parler que des « gilets jaunes », mais vraiment cette semaine, ce n’est pas possible…
Mardi
Les légitimes questions de sécurité publique rendent fous ceux qu’elles veulent perdre. Le gouvernement, pour des motifs purement politiciens, reprend une loi LR anticasseurs stupide et inefficace dans bien de ses dispositions, mais qui fait grimper aux rideaux tous les défenseurs autoproclamés des libertés, retrouvant ainsi un peu d’oxygène politique. Une chroniqueuse accuse les forces de l’ordre d’employer contre les manifestants le Zyklon B, le produit utilisé dans les chambres à gaz nazies. Certains soutiennent que le Parlement européen aurait voté une résolution condamnant l’usage par la France des LBD, les lanceurs de balles de défense. Vérification faite, la résolution condamne « l’usage disproportionné de la force contre des manifestants pacifiques » sans incriminer aucunement la France, mais pourrait plus utilement viser plusieurs pays de l’Union européenne, en particulier à l’est du continent. Emmanuel Kant, qui mettait la vérité comme la valeur suprême, doit se retourner dans sa tombe.
Jeudi
De à , une querelle sanglante opposa les adorateurs de l’opéra italien aux défenseurs de l’opéra français. Cette polémique fut baptisée la « Querelle des bouffons », en référence à l’opera buffa, l’opéra bouffe italien, mais la dénomination pourrait bien au premier degré s’adresser à Luigi Di Maio, le vice-Premier ministre italien qui a de fait intronisé le dénommé Christophe Chalençon comme interlocuteur politique de première grandeur en le rencontrant clandestinement à Montargis la semaine dernière. Voilà que le phare de la pensée jaune interrogé par Piazza Pulita, une émission italienne de télévision, soutient que le gouvernement
français cherche à l’assassiner
« d’une balle dans la tête » et que lui, Chalençon, prépare une insurrection et un coup d’État militaire. Pour faire bon poids, Emmanuel Macron sera alors guillotiné et Brigitte Macron « démontée » (?!). Rien que ça ! On attend avec intérêt les commentaires aux micros de Piazza Pulita du signor Di Maio, qui aura ainsi une bonne occasion de ne pas avoir à s’expliquer sur le désastre électoral que son parti « Cinque Stelle » vient de subir dans les Abruzzes.
Vendredi
Alain Juppé renonce à son mandat de maire de Bordeaux et entre au Conseil constitutionnel. Dans son allocution, empreinte d’une grande dignité et d’un vrai chagrin, il dénonce une vie publique
« difficile à vivre et lourde à porter ». Je vais plus loin que ces phrases policées : l’espace public est devenu un cloaque méphitique charriant des étrons nauséabonds. Les barrières de l’inhibition et de la bienséance sautent les unes après les autres, et les politiques font partie d’un troupeau de plus en plus dense qu’on mène ainsi à l’abattoir.
Les professionnels de santé sont
agressés, on frappe l’instituteur qui met une mauvaise note à son enfant, on menace les journalistes s’ils ne sont pas hagiographes de vos propres opinions, les scientifiques et les historiens sont contestés et insultés au bénéfice des plus fumeuses théories conspirationnistes. Il suffisait d’entendre dans l’émission de David Pujadas sur LCI mercredi soir une égérie du mouvement des « gilets jaunes » interpeller le Premier ministre avec une rare insolence, qui n’avait d’égale que l’inanité d’une proposition demandant l’amnistie pour tous les « gilets jaunes » auteurs d’exactions. Quand on pense que cette personne est présentée comme l’aile responsable et mesurée de la contestation, on frémit.
Samedi
Rappelez-vous : il y a quelques semaines, le politiquement correct exigeait, avant tout compte rendu sur les manifestations, d’indiquer que les violences étaient le fait de casseurs venus, selon l’inclination politique du commentateur, de l’extrême droite ou de l’extrême gauche, que les relents d’antisémitisme, d’homophobie et de sexisme ne relevaient que de quelques individus égarés. Pire, ceux qui pointaient l’origine de ces exactions
étaient accusés de jouer les supplétifs du pouvoir macronien. Était-ce de l’aveuglement, du conformisme, de la peur ? Pourtant, même les observateurs les moins avertis pouvaient lire, dès le début du mouvement, les pancartes obscènes qui ornaient certains ronds-points, les violences exercées sur les automobilistes qui refusaient d’obtempérer, les appels au meurtre à l’encontre des responsables politiques, les dégradations du patrimoine public. Fallait-il être à ce point frappé de cécité pour ne pas analyser les slogans « Macron, banquier Rothschild » comme les relents les plus ignobles de cet antisémitisme qui se dissimule derrière la lutte des classes ?
On ne peut reprocher aux historiens et aux sociologues d’avoir pris leur temps pour décrypter cette haine. Il leur fallait confronter et analyser les éléments épars d’un mouvement inédit.
Une remarquable étude de l’Ifop menée par Jérôme Fourquet, les travaux de la Fondation Jean Jaurès nous éclairent. Maintenant, nous savons que les forces du mal de toutes obédiences – de la plus fruste à la plus sophistiquée – ont embarqué nombre de nos concitoyens dans une violence qui fera in fine le malheur des plus pauvres. « Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire », plus que jamais la phrase célèbre d’Albert Einstein est à méditer.
« Les politiques font partie d’un troupeau de plus en plus dense qu’on mène à l’abattoir. »