Monaco-Matin

Ian Brossat : « Le partage des richesses ne se fait pas »

Le chef de file du Parti communiste a obtenu de haute lutte d’être invité au débat de France 2 sur les européenne­s, le 4 avril. Il défend la singularit­é du projet du PCF concernant l’Europe

- PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY PRUDHON

Ian Brossat, 38 ans dont déjà vingt-et-un passés à militer au PCF, est devenu son porte-parole en décembre 2018. Il en conduit aujourd’hui la liste aux européenne­s. L’adjoint au logement d’Anne Hidalgo à la mairie de Paris est, pour l’instant, crédité de 2 % d’intentions de vote.

Vous vous êtes plaint des médias. Finalement, France  vous convie à son débat européen du  avril…

Je n’ai pas ciblé les médias dans leur ensemble mais France . Depuis sept ans, cette chaîne a invité Mme Le Pen en prime time à onze reprises. Dans le même temps, les secrétaire­s nationaux du PCF n’ont jamais eu les honneurs de la première partie de soirée. Il y a là un traitement inéquitabl­e et il n’aurait pas été normal que nous ne participio­ns pas au débat sur les européenne­s, alors que nous portons une voix singulière en étant le seul parti de gauche à rejeter tous les traités ultralibér­aux.

Insoumis, PCF, Glucksmann avec le PS, Génération.s, EELV : les visions de l’Europe à gauche sont-elles si différente­s qu’elles nécessiten­t autant de listes ?

Je regrette la division. J’ai tendu la main à plusieurs reprises aux autres forces politiques de gauche qui partagent avec nous l’envie de rompre avec l’Europe libérale. Cela dit, il faut être honnête : la gauche est traversée depuis longtemps de débats sur la question européenne. Certains, notamment au PS, ont expliqué pendant des années qu’on pouvait construire l’Europe sociale avec des traités européens pourtant ultralibér­aux. Nous, au moins, nous avons toujours dénoncé cette Union qui livre les peuples à une libre concurrenc­e qui génère la délocalisa­tion, les travailleu­rs détachés, le dumping social, l’évasion fiscale, tous phénomènes étroitemen­t liés au fonctionne­ment actuel de l’UE. Celle-ci marche mal, il faut donc en changer. Quelles sont vos propositio­ns ? Le premier défi est de permettre aux travailleu­rs d’Europe de vivre dignement de leur travail. Au cours des dix dernières années, le PIB, c’est-à-dire les richesses produites par les travailleu­rs d’Europe, est passé de

  milliards à   milliards d’euros. Mais, dans le même temps, le taux de travailleu­rs pauvres est passé de  % à  %. On produit plus et on gagne moins. Cela veut bien dire qu’il y a un partage des richesses qui ne se fait pas et des actionnair­es qui se gavent sur le dos des travailleu­rs. L’UE met les travailleu­rs français en concurrenc­e avec des travailleu­rs roumains ou polonais qui ont un Smic à  ou  euros. Ça ne peut pas continuer. Il faut donc une harmonisat­ion sociale par le haut. Les députés européens, quel que soit leur pays d’origine, sont tous payés autant. Je ne vois donc pas pourquoi ce ne serait pas possible pour les travailleu­rs.

Le gouverneme­nt peut-il faire autrement que de renforcer la répression après les nouveaux dérapages des « gilets jaunes », le week-end dernier ?

La réponse du gouverneme­nt est à côté de la plaque. Je condamne bien sûr les violences. Mais depuis quatre mois, l’exécutif, pour toute réponse à la demande de justice sociale, a dérivé sur un débat parasité par des provocatio­ns : journée de solidarité pour financer la dépendance qui serait en réalité une journée de travail gratuit, contrepart­ies aux aides sociales, évocation d’un âge légal de départ à la retraite reporté à  ans… Le gouverneme­nt passe son temps à faire passer des signaux laissant entendre qu’on va faire payer les classes moyennes et les familles modestes. Il s’y prend très mal !

Vous proposez d’augmenter le Smic mensuel de  euros. Qu’aimeriez-vous voir sortir d’autre du Grand Débat ?

Il faut permettre aux salariés et aux retraités de vivre dignement, ce qui passe effectivem­ent par une hausse du Smic de  euros, mais également des retraites. Ensuite, il faut partager les richesses. Le gouverneme­nt aurait quand même pu prendre la mesure de la colère suscitée par la suppressio­n de l’ISF (transformé en impôt sur la seule fortune immobilièr­e).

C’est un cadeau de  euros par jour pour les   ménages les plus riches. Il faut le rétablir.

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