Hors des bains
Champion olympique de natation en et , Alain Bernard a rangé sa combinaison il y a ans. Toujours investi au cercle des nageurs d’Antibes, l’homme porte un regard bienveillant sur son sport.
On vient de vous voir dans une campagne sur la vigilance noyade.
J’ai un rôle à jouer là-dessus. J’ai eu la chance d’évoluer dans l’eau pendant de nombreuses années, de me découvrir aussi. J’étais tout grand, tout maigre, tout timide, introverti et le fait de faire de la natation, des compétitions et de répondre à des médias après une course m’a obligé à m’ouvrir. Cela m’a permis de devenir ce que je suis. En ayant passé autant de temps dans l’eau, en y étant si à l’aise, j’ai du mal à concevoir qu’en il y a encore des gens qui se noient par manque d’attention, parce que l’enseignement de la natation n’est pas prodigué partout de la même manière. On a malheureusement besoin d’avoir des images chocs pour sensibiliser les gens et les inciter à rester à proximité de leurs proches quand ils sont dans l’eau. J’y suis très sensible, ça va être mon cheval de bataille pour les années à venir.
C’était votre projet de reconversion ?
Pas forcément. J’avais envie de façon utopique de changer les choses, de délivrer un message. J’ai la chance d’être écouté grâce à mon parcours et je souhaitais améliorer les conditions d’entraînement des jeunes. Je me suis très vite heurté à la réalité du terrain où les infrastructures sportives et scolaires sont très politisées. Je ne souhaitais pas m’engager en politique et rayonner pour tout le monde, j’ai fait le choix de sensibiliser un maximum de personnes sur ce projet scolaire et sportif. On a la chance d’avoir les JO de Paris en derrière lesquels il faut fédérer. J’ai eu la chance, à la fin de ma carrière, d’être accompagné par des partenaires comme EDF et MP (la marque de Michael Phelps) qui me permettent de pouvoir faire du caritatif et de l’associatif.
Quel regard portez-vous sur la natation française ?
Le retour de Florent Manaudou va faire énormément de bien. Certes, on a Charlotte Bonnet, Jérémy Stravius, Mehdy Metella qui sont là et qui font des performances mais ils n’ont pas la même aura médiatique que Florent.
Ça va faire du bien à tout le monde mais surtout à la natation française car on l’a vu, quand on a des grands résultats internationaux, il y a un afflux vers les clubs de natation. Et c’est par ce sport de masse qu’on arrive à sortir des sportifs d’élite. Je leur souhaite le meilleur pour les championnats du monde de Gwangju (Corée du Sud). Ça laisse espérer de bonnes choses pour les JO de Tokyo même si nous n’avons pas de modèle qui est ancré. On n’a pas su identifier la façon dont on a réussi à être très performant. C’était un contexte générationnel que l’on n’a pas maîtrisé. Ce que
‘‘
Florent Manaudou a une aura médiatique”
l’on a fait compte tenu de nos infrastructures de bassin par rapport à l’Australie, les Pay-Bas, l’Angleterre et les Etats-Unis, c’est extraordinaire au sens premier car cela sort de l’ordinaire.
Quel est votre plus beau souvenir de nageur ?
C’est réducteur de ne parler que de la médaille d’or des Jeux même si c’est énorme. Mais un moment qui m’a marqué, c’est en à la fin de ma carrière quand je fais ma dernière course aux championnats de France. Je ne suis pas qualifié en individuelle mais uniquement sur les relais pour les Jeux de Londres et je viens de rater ma dernière qualification sur le
Manaudou à très bien en vivre mais j’ai eu mon premier contrat en , j’avais ans. Avant cela, il fallait bien vivre donc j’ai été surveillant de baignade et je donnais des cours de natation entre mes entraînements pour être autonome financièrement. J’ai eu de la chance et c’est pourquoi je souhaite qu’un réel accompagnement soit mis en place pour les jeunes nageurs pour ne pas qu’ils décrochent scolairement. Il faut toujours envisager une porte de sortie car si on se blesse ou qu’on ne gagne pas sa vie avec la natation, il ne faut pas se retrouver à ans, sans diplôme et sans expérience professionnelle.
Alain Bernard entraîneur, c’est possible ?
Égoïstement, comme c’est tellement prenant, j’aurai du mal à m’engager dans un projet qui me prend % de mon temps et de mon énergie. J’ai la chance d’avoir un nom qui me permet de rayonner dans divers secteurs. Entraîneur de natation, c’est s’occuper d’un groupe de nageurs du lundi au dimanche, semaines dans l’année.
L’eau vous manque ?
Assez peu même si quand je ne vais pas dans l’eau pendant un moment, je ressens ce petit manque. J’ai développé un lien particulier avec l’eau avec le temps.
Comment choisit-on une spécialité ?
On ne choisit pas vraiment. On a des prédispositions qui font que l’on est plus à l’aise en brasse, papillon ou dos. Pour ma part, j’étais très mauvais en papillon.
Le mètres me correspondait le mieux, par rapport à mon explosivité, mon allonge, mon tempo. C’est l’équivalent d’un m en athlétisme en termes de dépense d’énergie. On essaie de choisir notre spécialité le plus tard possible.