Monaco-Matin

« L’Ultim, un autre monde »

- PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTOPHE­R ROUX

Franck Cammas, c’est un CV long comme la coque d’un Ultim. Et, à  ans, l’Aixois n’a pas l’intention de laisser sa place à la barre. Après avoir mené le projet français lors de la dernière Coupe de l’America, en , le triple vainqueur de la Jacques Vabre a été lâché par son sponsor de toujours, Groupama, dans l’optique de l’édition . Un échec ? Pas pour un double marin de l’année (-). Le « Petit Mozart » a déjà repris la mer. Devenu conseiller technique chez Oman Sail, il a également convaincu la famille de Rothschild de lui confier Gitana, son Ultim dont il est co-skipper avec Charles Caudrelier. Au pays des merveilles et des bateaux volants, Cammas est «excité» comme un gosse.

Franck, vous étiez à Nice dimanche dernier, pour la clôture du Tour de France à la voile. Etes-vous satisfait des résultats des quatre équipages d’Oman Sail ?

L'objectif était le podium. On n'est donc pas entièremen­t satisfaits. Deux bateaux ont joué le général, avec de très bons barreurs (Stevie Morrison et Pierre Pennec, ndlr), mais terminer e et e ne leur suffit pas. Ils ont montré qu'ils étaient capables du meilleur, qu’ils n’avaient pas de complexe à avoir, mais ils n'ont pas réussi à être plus constants. On ne peut pas gagner le Tour comme ça.

En quoi consiste votre rôle de conseiller ?

Je donne des conseils sur la stratégie de course et dans le recrutemen­t des personnes impliquées sur le circuit Diam  et le Tour de France.

Transmettr­e aux Omanais, ça vous plaît ?

C’est toujours intéressan­t. J'ai aimé avoir des conseils quand je commençais ma carrière. C'est normal de donner le change dans ma position désormais. Avec mon expérience, je vois à peu près quoi faire pour les guider. Les sentez-vous réceptifs ? Certains se lancent corps et âme, d'autres un peu moins. Oman a une autre culture de la voile de compétitio­n par rapport à celle que l’on peut connaître en France. Ce n'est pas évident, au départ, de leur faire comprendre l'exigence que l'on doit fournir au haut niveau. On essaie de leur donner plus d'autonomie pour qu'ils n’aient pas besoin d’un étranger à bord. On veut amener des Omanais sur la Solitaire du Figaro et j'espère qu'on va y arriver l'année prochaine. Ça fait six mois qu'on travaille avec une équipe en Bretagne mais le chemin est long.

Votre actualité, c’est aussi la classe Ultim. Pourquoi vous tient-elle autant à coeur ?

Elle a tous les atouts. On parle des plus gros bateaux pour la course au large. Ils pèsent  tonnes, mesurent  m de long et sont en phase de développem­ent. On est en train de repousser les limites de la connaissan­ce grâce à eux. Ce sont les plus rapides au monde, ça veut dire qu’on peut faire des records. C’est excitant et passionnan­t, avec ces foils et cette capacité à voler. Tous les jours, il y a un progrès sensible. C’est ce qui m’a toujours plu. Les découverte­s techniques liées au challenge humain. Même si ces bateaux-là sont un peu inhumains (rire) parce qu’ils demandent des efforts inhumains pour les maîtriser seul. Voler dessus, c’est quand même une gageure.

C’est changer ses réflexes.

Voler et battre des records, on touche à vos rêves d’enfant non ?

Ce ne sont pas que des rêves d’enfant, même si c’est comme si j’avais  ans et que je découvrais la voile. Ce sont aussi des rêves d’adulte. Quand les spectateur­s regardent nos bateaux sur la Route du Rhum, ils sont fascinés.

Et nous dire que c’est nous qui sommes dessus et les mettons en vie, c’est tout aussi fascinant. Il y a quelques années, je n’aurais jamais imaginé faire de la course au large sur de tels bateaux.

Avez-vous peur, parfois ?

Forcément, comme on peut le ressentir en sports mécaniques. On n’a jamais envie de dépasser la limite. On est toujours un peu sur un fil et il faut une concentrat­ion extrême pour ne pas tomber à côté et que ce soit dramatique. Celui qui dit qu’il n’a pas peur… Après une course, on est usés psychologi­quement parce qu’on ne peut pas dormir sur ses deux oreilles quand on est en train de voler. On passe dans un autre monde.

L’Ultim, c’est la plus belle expérience de votre vie ?

Pas forcément. La Coupe de l’America a eu les bateaux les plus poussés en termes de performanc­e pure. Ce sont ceux qui sont les plus avancés technologi­quement mais ils ne sont pas du tout adaptés à la course au large.

L’abandon d’un projet français pour la prochaine Coupe de l’America, c’est une déchirure ?

Ce n’est pas une cicatrice. J’ai trouvé notre expérience fabuleuse en  même si on n’avait pas tous les outils en main pour gagner la Coupe. Pendant deux ans, on a progressé. Je suis content de l’avoir fait et je ne suis pas fermé à un retour. J’espère qu’il y aura un gros projet avec des moyens dès -. C’est quelque chose que je vais suivre de près en tout cas. Pourquoi n’avez-vous jamais participé au Vendée Globe ? Ce n’est pas dans mes priorités, loin de là. Je n’en vois pas l’intérêt. Je préfère Né le  décembre  à Aix-en-Provence.  ans. Skipper de Gitana Ultim depuis fin avril. Conseiller technique d’Oman Sail depuis septembre . Palmarès : Solitaire du Figaro (), Transat Jacques Vabre (, , ), Record de l’Atlantique Nord (), Trophée Jules Verne (), Route du Rhum (), Volvo Océan Race -. Coupe de l’America : il porte le projet français avec Groupama lors de l’édition . Distinctio­n : élu marin de l’année en  et .

‘‘

La Coupe de l’America n’est pas une cicatrice”

la régate au contact, les machines un peu plus rapides qu’un Imoca, comme le sont les multicoque­s. Le Vendée Globe, quand on regarde le circuit sur le papier, il y a moins de grandes courses. L’aventure est moins présente qu’en Ultim. Armel Le Cléac’h, François Gabart et Thomas Coville ont fait le Vendée et sont venus en Ultim pour faire autre chose et voir plus grand. Si vous leur posez la question aujourd’hui, jamais ils ne reviendron­t sur le Vendée. Un Tour du monde en Ultim se veut un challenge largement plus important.

‘‘

L’aventure est moins présente sur le Vendée Globe qu’en Ultim”

Fastnet : lancée le 3 août, course en équipages. Parcours : Cowes, Fastnet Rock, Plymouth.

Brest Atlantique­s : lancée le 3 novembre, courseendo­uble.Parcours :Brest,Rio,LeCap, Brest (soit un demi-tour du monde).

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Monaco