Chute fatale à Puget-Théniers : l’accès aux secours en question
Les villageois restent choqués par la mort soudaine d’une employée municipale, Mylène Gisbert. Si l’issue semblait inéluctable, des intervenants s’inquiètent d’une carence de soins en milieu rural
Sept marches. Sept petites marches vieillissantes, qui forment un escalier d’un mètre de haut. C’est au pied de ces marches que Mylène Gisbert, 59 ans, employée municipale à Puget-Théniers, a trouvé la mort brutalement, mardi dernier. Suspendus à la rambarde, des bouquets de fleurs pleurent son absence, rappelant le drame survenu en début de soirée, ici, aux portes du complexe sportif de la Condamine.
« C’était épouvantable » ,témoigne Alexia Ferrari, encore choquée. Maître-nageuse à la piscine de Puget, elle est aussi infirmière. Elle a prodigué les premiers secours à Mylène, épaulée par plusieurs témoins au grand coeur, en attendant l’arrivée des sapeurs-pompiers. Mylène Gisbert, professeur de sport au complexe sportif, arrosait les plantes avant de partir en congés, quand sa cheville s’est dérobée. Sa tête a violemment heurté le sol en arrière. C’était un accident, un tragique accident. Mais au-delà de la peine de tout un village, c’est la question de l’accès aux soins en milieu rural qui, depuis, alimente les discussions.
Mylène est décédée dans la nuit à l’hôpital Pasteur 2, à Nice, après s’être abondamment vidée de son sang par la bouche et le nez. « Son traumatisme crânien était tellement grave que l’issue
était sans doute fatale. Mais on espère toujours, explique Alexia Ferrari. Nous avons été plusieurs à appeler les secours. On nous a dit : « On vous envoie les pompiers ». On pensait avoir le Samu tout de suite, l’hélicoptère... Mais c’est un désert médical, ici. On n’a même pas de médecin anesthésiste ! »
« Interminable... »
Certains s’étonnent que les secours ne soient pas arrivés plus tôt. Maryann Kalina, 66 ans, montre sur son téléphone portable l’heure d’appel (19 h 39) au 112. Fabien Ferrari, maître-nageur lui aussi, revoit sa femme Alexia soutenir la tête de Mylène avec l’énergie du désespoir : « Dans notre état de choc, on n’avait plus de notion d’heure. Les minutes étaient interminables... » Selon plusieurs témoins, les secours auraient mis plus d’une demi-heure à arriver. Ce que réfute le capitaine Eric Brocardi. Le chef du service communication du Sdis 06 évoque « une montée en puissance de manière logique. De nos jours, les gens trouvent très longs les temps d’intervention. Mais tout a été donné de manière normale en termes quantitatifs et qualitatifs ! Neuf sapeurs-pompiers de Puget-Théniers et Villars-sur-Var sont intervenus, dont un infirmier, ainsi qu’un médecin. »
« Sauver des vies »
Au moment où l’alerte a retenti, les pompiers pugétois, tous volontaires, conduisaient un homme vers le littoral, selon le maire, Robert Velay. « Dans ce cas, il faut constituer une autre équipe, et ils sont arrivés
un peu en retard. Mais ce n’est pas leur faute ! On a une très belle équipe de pompiers à Puget. Ils sont bien dirigés, ils font bien leur boulot. »
Les témoins acquiescent, à l’instar de Maryann : «Les pompiers ne sont absolument pas en cause ! Il faut saluer leur courage. » Pour Alexia, « Ils ont fait leur métier. Le problème, c’est qu’on ne consacre pas assez d’argent et de moyens à la sécurité pour sauver des vies. C’est l’organisation générale des secours qu’il faut améliorer. Ce n’est pas parce qu’on vit dans l’arrière-pays qu’on n’a pas le droit d’avoir un minimum de secours ! »
Certes, Puget-Théniers n’est pas la commune rurale la plus mal lotie, entre sa caserne de pompiers, celles de Villars-sur-Var, Gilette ou Carros. Mais le ressenti des habitants est là, nourri par la désaffection chronique des services publics. Dans le cas de Mylène, les pompiers ont néanmoins salué l’action des premiers intervenants : pour eux, on n’aurait rien pu faire de plus.