Monaco-Matin

Chute fatale à Puget-Théniers : l’accès aux secours en question

Les villageois restent choqués par la mort soudaine d’une employée municipale, Mylène Gisbert. Si l’issue semblait inéluctabl­e, des intervenan­ts s’inquiètent d’une carence de soins en milieu rural

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Sept marches. Sept petites marches vieillissa­ntes, qui forment un escalier d’un mètre de haut. C’est au pied de ces marches que Mylène Gisbert, 59 ans, employée municipale à Puget-Théniers, a trouvé la mort brutalemen­t, mardi dernier. Suspendus à la rambarde, des bouquets de fleurs pleurent son absence, rappelant le drame survenu en début de soirée, ici, aux portes du complexe sportif de la Condamine.

« C’était épouvantab­le » ,témoigne Alexia Ferrari, encore choquée. Maître-nageuse à la piscine de Puget, elle est aussi infirmière. Elle a prodigué les premiers secours à Mylène, épaulée par plusieurs témoins au grand coeur, en attendant l’arrivée des sapeurs-pompiers. Mylène Gisbert, professeur de sport au complexe sportif, arrosait les plantes avant de partir en congés, quand sa cheville s’est dérobée. Sa tête a violemment heurté le sol en arrière. C’était un accident, un tragique accident. Mais au-delà de la peine de tout un village, c’est la question de l’accès aux soins en milieu rural qui, depuis, alimente les discussion­s.

Mylène est décédée dans la nuit à l’hôpital Pasteur 2, à Nice, après s’être abondammen­t vidée de son sang par la bouche et le nez. « Son traumatism­e crânien était tellement grave que l’issue

était sans doute fatale. Mais on espère toujours, explique Alexia Ferrari. Nous avons été plusieurs à appeler les secours. On nous a dit : « On vous envoie les pompiers ». On pensait avoir le Samu tout de suite, l’hélicoptèr­e... Mais c’est un désert médical, ici. On n’a même pas de médecin anesthésis­te ! »

« Interminab­le... »

Certains s’étonnent que les secours ne soient pas arrivés plus tôt. Maryann Kalina, 66 ans, montre sur son téléphone portable l’heure d’appel (19 h 39) au 112. Fabien Ferrari, maître-nageur lui aussi, revoit sa femme Alexia soutenir la tête de Mylène avec l’énergie du désespoir : « Dans notre état de choc, on n’avait plus de notion d’heure. Les minutes étaient interminab­les... » Selon plusieurs témoins, les secours auraient mis plus d’une demi-heure à arriver. Ce que réfute le capitaine Eric Brocardi. Le chef du service communicat­ion du Sdis 06 évoque « une montée en puissance de manière logique. De nos jours, les gens trouvent très longs les temps d’interventi­on. Mais tout a été donné de manière normale en termes quantitati­fs et qualitatif­s ! Neuf sapeurs-pompiers de Puget-Théniers et Villars-sur-Var sont intervenus, dont un infirmier, ainsi qu’un médecin. »

« Sauver des vies »

Au moment où l’alerte a retenti, les pompiers pugétois, tous volontaire­s, conduisaie­nt un homme vers le littoral, selon le maire, Robert Velay. « Dans ce cas, il faut constituer une autre équipe, et ils sont arrivés

un peu en retard. Mais ce n’est pas leur faute ! On a une très belle équipe de pompiers à Puget. Ils sont bien dirigés, ils font bien leur boulot. »

Les témoins acquiescen­t, à l’instar de Maryann : «Les pompiers ne sont absolument pas en cause ! Il faut saluer leur courage. » Pour Alexia, « Ils ont fait leur métier. Le problème, c’est qu’on ne consacre pas assez d’argent et de moyens à la sécurité pour sauver des vies. C’est l’organisati­on générale des secours qu’il faut améliorer. Ce n’est pas parce qu’on vit dans l’arrière-pays qu’on n’a pas le droit d’avoir un minimum de secours ! »

Certes, Puget-Théniers n’est pas la commune rurale la plus mal lotie, entre sa caserne de pompiers, celles de Villars-sur-Var, Gilette ou Carros. Mais le ressenti des habitants est là, nourri par la désaffecti­on chronique des services publics. Dans le cas de Mylène, les pompiers ont néanmoins salué l’action des premiers intervenan­ts : pour eux, on n’aurait rien pu faire de plus.

 ??  ?? Des bouquets pleurent l’absence de celle qui a chuté en arrosant les fleurs en haut de l’escalier. (Photos Dylan Meiffret)
Des bouquets pleurent l’absence de celle qui a chuté en arrosant les fleurs en haut de l’escalier. (Photos Dylan Meiffret)

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