IL FAUT SAUVER LES GRANDES NACRES !
Le constat est terrifiant : la quasi-totalité des grandes nacres de Monaco a été décimée en quelques mois par un parasite. Des larves vont être prélevées et élevées pour repeupler les fonds marins.
C’est le deuxième plus gros coquillage du monde, juste après le bénitier des mers tropicales. Elles ont la même forme que les moules, mais mesurent jusqu’à plus d’1 m de haut, et sont en général enfouies jusqu’au tiers de leur taille. Les grandes nacres sont en train de disparaître des rivages de la Méditerranée. La faute à un parasite d’origine inconnue appelé haplosporidium pinnae , qui affecterait le système digestif de ces mollusques bivalve.
Faucheuse de fond
« Nous avions procédé à un comptage lors d’une opération de sciences participatives en novembre 2008. Nous avions alors compté environ un tiers de la réserve du Larvotto, et nous avions comptabilisé entre 650 et 700 nacres. Soit un total estimé de 1000 à 1200 individus sur la totalité de la réserve. Au début de l’été il ne restait que 2 ou 3 individus vivants », déplore Raphaël Simonet, chef de la division Patrimoine naturel à la Direction de l’Environnement. Deux autres sites comptés à l’été 2017 sous le Musée océanographique et à la sortie du port de Fontvieille, au niveau des Roches Saint-Nicolas, faisaient alors apparaître environ 200 individus. Raphaël Simonet est catégorique, aucun n’a survécu à cette épizootie (une épidémie pour les animaux). Une véritable hécatombe.
Et un drame pour l’environnement. « Chaque grande nacre filtre 100 à 150 litres d’eau chaque jour. Elles accumulent les métaux lourds et les radionucléides présents dans l’eau », explique Stéphanie Orengo, responsable vétérinaire à l’Institut océanographique. Un rôle capital, puisqu’elles sont considérées comme des témoins de la qualité de l’environnement.
Réparer le carnage
Alors, la Direction de l’Environnement a décidé d’anticiper le repeuplement de ces précieux auxiliaires. Pour cela, les scientifiques vont tester une méthode éprouvée par le professeur Nardo Vicente de l’institut Paul Ricard : « Nous avons immergé à six endroits différents, où des nacres avaient été observées, des filets remplis de ficelles de manière à capter d’éventuelles larves produites par des individus qui vivraient plus profondément, là où le parasite n’a pas frappé en raison de la température », explique Raphaël Simonet. Immergés en juin et juillet, les filets seront relevés en septembre et octobre. S’ils contiennent des individus juvéniles, ils seront installés dans des bassins du Centre monégasque de soins des espèces marines. Si, dans l’imaginaire collectif, ce centre situé au Musée océanographique, est plutôt associé aux tortues, il est en fait destiné à la protection et la sauvegarde de toutes les espèces méditerranéennes. Tout à fait dans son rôle dans le soin de ces grandes nacres juvéniles. « Elles pourront s’y développer sous étroite surveillance, jusqu’à atteindre une taille suffisante leur permettant d’être réintroduites dans leur milieu naturel », nous fait savoir le centre.
Et si ça ne fonctionne pas ? Raphaël Simonet est du genre persévérant : «Onrecommencera l’année prochaine. »