Gérard Louvin, toujours le feu sacré pour le divertissement
Ce néorésident mouginois préside le Festival pyrotechnique de Cannes. Ça tombe bien, le célèbre producteur adore le feu d’artifice !
Son CV est aussi imposant que sa stature. Bronzé comme un nouvel Azuréen récemment installé à Mougins, Gérard Louvin a la voix tonitruante et le ton du franc-parler. Une voyante lui avait jadis prédit qu’il deviendrait célèbre à travers les écrans. Elle ne croyait pas si bien lire l’avenir… Midas du divertissement « populaire », le producteur heureux (et comblé) de Sacrée soirée, Ciel mon mardi, Sans aucun doute… incarne un âge d’or de la télé, où l’audimat de « La Une » décrochait souvent la lune. Directeur de Star Academy, il fut l’ami de certaines des plus grandes étoiles du show-biz, de Cloclo à Johnny. Lui qui monta jadis les marches du Palais pour Les Patriotes au Festival de Cannes, est de retour sur la Croisette, plus de vingt ans après. À 73 ans, le voilà même président… du jury au Festival pyrotechnique de Cannes qui se déroule jusqu’au 24 août. La meilleure façon de conserver le feu sacré, pour ce maître de l’artifice. Son bagout aussi peut faire des étincelles…
Maintenant que vous êtes venu habiter à Mougins, vous voilà de retour à Cannes ?
Ça y est, ça fait quelques mois. J’étais déjà à Ramatuelle, mais il n’y avait pas de vie à part juilletaoût. Ici, je découvre une région formidable, à Cannes, mais aussi dans ses villages. Pour un Parisien, Cannes est
‘‘ souvent considérée comme une ville de vieux, mais depuis que je suis là, je constate que c’est tout le contraire, on s’y amuse tout le temps !
Et on y devient même président !
En plus, je suis passionné de feu d’artifice. Tous les ans au décembre, j’assiste à celui de Copacabana tiré depuis grosses barges, et en pour le juillet, j’en ai produit un gros sous la Tour Eiffel, sur le thème de Victor Hugo car on fêtait les deux cents ans de sa naissance. Il y avait Claude Brasseur pour la voix, quatre gros ballons sur scène et quand on a commencé avec le texte, il n’y avait plus un bruit parmi personnes !
Un feu d’artifice, c’est ça pour moi, un tout, de la diversité, pas uniquement envoyer des couleurs rouges ou vertes. C’est d’ailleurs le feu d’artifice et le cirque qui m’ont donné la passion de mon métier. Le divertissement, c’est ce qui a guidé toute votre vie ?
Moi, j’aime, j’adore le spectacle ! On m’a parfois traité de « gros ringard des paillettes », et je n’ai fait que des émissions populaires, mais ce n’est pas péjoratif.
Avec une part d’artifice là aussi ?
Le divertissement, ce n’est que de l’artifice ! J’ai même dit, et ça a choqué certains, que le journal télé, c’est aussi un spectacle, même quand il y a des mauvaises nouvelles. Tenez, la canicule aussi on en fait un spectacle : vingt-cinq minutes dessus aux infos, je suis navré, mais c’est encore de l’artifice.
Pour vous, tout a commencé par une rencontre avec Claude François ?
À l’époque, j’étais chanteur manager dans un orchestre de bal. Claude François cherchait un manager pour Alain Chamfort, qui venait d’enregistrer un tube. Entre Claude et moi, ce fut un coup de foudre artistique. Il m’a demandé tout de suite mon signe astrologique. Je suis vierge et lui verseau : on était fait pour s’entendre. Il m’a demandé d’être son directeur artistique chez Flèche. Je lui ai dit : « Je n’y connais rien ». Il m’a répondu : «Tuvas apprendre ! ». J’ai dû gérer ses enregistrements, trouver des titres, organiser ses spectacles… Ce fut une très belle rencontre.
Quelle image en gardez-vous ?
Pour moi, Clo-Clo n’est pas ce mec à paillettes et Clodettes, mais un type génial, avec son caractère, qui bossait comme un fou à ans. C’était un homme normal mais supermaniaque, toujours avec un chiffon pour effacer les traces de doigts sur les poignées de porte.
Y a-t-il encore des stars de variétés de cette dimension ?
Ce sont les anciens. J’ai découvert Florent Pagny quand il était serveur de bar, et Michel Leeb considéré comme un artiste ringard chez Guy Lux, et j’en ai fait de grosses vedettes. Ce sont des artistes avec lesquels on disait :
« On va bosser ». Aujourd’hui, les nouveaux demandent tout de suite : « Combien je vais gagner ? », ils n’ont plus la passion du spectacle, et vont souvent aux plus offrants.
C’est valable pour les vedettes del a Star Academy ?
Ah non, c’était formidable ! Il y a eu Jenifer, Nolwenn, Louane… Cette émission leur a donné un coup de projecteur, mais leur a aussi montré que ce métier n’est pas facile. J’ai produit cinq tournées de la Star Ac’ et avec moi, ce n’était pas tous les jours dimanche ! Ils ont vu ce qu’était le travail… Et The Voice alors ?
Je l’ai mise à l’antenne, car j’étais conseiller des programmes à TF. Mais l’émission commence à fatiguer…
Qu’est-ce qui fait un bon concept d’émission télé ?
Y’en a plus ! Toutes mes émissions ont été créées et inventées, alors qu’aujourd’hui, on va les chercher à l’étranger. Moi, j’ai eu la chance de travailler avec Étienne Mougeotte, qui me faisait confiance. Lagaf’, personne n’y croyait, et on a cartonné avec Le Bigdil. Courbet, on me disait :
« Ta tête de gondole, tu peux te la garder » : il compte vingt-cinq ans de succès !
Et l’élection de Miss France ?
Au départ, c’était sur France et je n’y croyais pas
‘‘ trop, je trouvais que ce que faisaient Madame de Fontenay et son fils était un peu ringard. Mais on a su moderniser le concept et on a eu millions de téléspectateurs.
Avec Ciel mon mardi et Dechavanne, l’innovation était aussi dans le ton ?
On a eu un procès de Jean-Marie Le Pen dès le premier soir ! Guy Bedos était invité, il était arrivé en se disant de bonne humeur parce qu’il avait marché du pied gauche sur une photo de Le Pen ! [rires] Moi, j’adore le direct, on ne peut pas couper, on peut dire ce qu’on veut, et tout peut se passer.
Aujourd’hui, on n’a plus cette liberté de ton à la télé ?
Oui, je trouve. Parce qu’on a peur que nos propos soient repris sur les réseaux sociaux, et archidéformés. Moi, j’ai fait deux ans chez Hanouna [N.D.L.R. : chroniqueur dans Touche pas à mon poste], et quand je rentrais chez moi le soir, j’étais lessivé, parce que j’avais passé deux heures à faire attention à tout ce que je dis. Mais la liberté de ton, c’est ce qui m’a permis de réussir.
Y a-t-il des émissions actuelles qui trouvent grâce à vos yeux ?
Pas trop. Je regarde un peu The Voice, Danse avec les stars, le foot… Mais moi, je vis avec l’âge de mon époque : est-ce qu’un jeune de ans regarde encore la télé ?
La téléréalité, on en a fait définitivement le tour ?
La téléréalité, c’est fini !
J’ai produit L’Île de la tentation ou Greg le millionnaire avec de vrais gens, alors qu’aujourd’hui, les candidats sont tous des acteurs. J’ai d’ailleurs un copain qui est casteur de cons ! On me disait que L’Île de la tentation, c’était pas bien ? Si, c’était un bienfait public. On rendait service à des couples qui s’étaient juré fidélité à vie : mieux valait qu’ils se séparent durant l’émission, que six mois après !
Pour moi, Claude François, c’est pas ce mec à paillettes »
Le cinéma ?
J’ai produit seize films, dont le dernier Pialat, et j’ai fait les films de Salvadori, Les Patriotes ,quiaeu une standing-ovation à Cannes. Au départ, le cinéma ne me plaisait pas plus que ça, car une fois que le producteur a dit oui, il n’est plus qu’un banquier en France, où le réalisateur fait le film qu’il veut. Mais j’ai un film en préparation avec Lionel Delplanque (Président )etune vedette américaine.
La téléréalité, c’est fini.
Les candidats sont des acteurs”
Et juré au Festival de Cannes ?
Ah, je ne suis pas assez bobo intello, j’ai trop de paillettes dans le dos !