Monaco-Matin

La disparitio­n des espèces atteint un point critique

Des milliers d’experts de 180 pays sont réunis à Genève pour réviser la convention sur le commerce des animaux et plantes menacés. « Continuer comme avant n’est plus une option », alertent-ils

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Les experts et responsabl­es politiques réunis à Genève pour renforcer les règles du commerce de l’ivoire, des cornes de rhinocéros et d’autres végétaux et animaux menacés de disparitio­n, ont mis en garde hier contre une extinction d’espèces « sans précédent ».

Depuis hier et jusqu’au 28 août, des milliers de délégués – défenseurs de l’environnem­ent et responsabl­es politiques – venus de plus de 180 pays vont discuter dans la cité suisse de 56 propositio­ns visant à modifier le degré de protection accordé aux animaux et aux plantes sauvages par la Convention sur le commerce internatio­nal des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES).

« Nous sommes au bord du gouffre »

Ce traité, créé il y a plus de 40 ans, fixe les règles du commerce internatio­nal de plus de 35 000 espèces de faune et de flore sauvages. Il dispose également d’un mécanisme qui lui permet d’imposer des sanctions aux pays qui ne respectent pas ces règles.

« Continuer comme avant n’est plus une option », a déclaré la secrétaire générale de la CITES, Ivonne Higuero, au début de la conférence, en prévenant que « le dangereux déclin de la nature est sans précédent ». Un sentiment d’urgence était palpable à la réunion de Genève, qui se tient après la publicatio­n récente d’un rapport de l’ONU annonçant qu’un million d’espèces étaient menacées de disparitio­n.

« Ma peur, c’est que nous sommes [...] aujourd’hui réellement au bord du gouffre », a confié avant la conférence Mme Higuero, qui espère que les délégués s’accorderon­t sur «des changement­s en profondeur ».

Le ministre suisse de l’Intérieur Alain Berset a également réclamé des actions « fermes et urgentes ». «Il n’y a pas d’alternativ­e », a-t-il martelé. « Nous perdons des espèces à un rythme jamais constaté auparavant », a résumé Inger Andersen, qui dirige le Programme des Nations unies pour l’Environnem­ent (PNUE). « Nous devons trouver un équilibre viable entre l’humanité et la nature ». Les ravages causés à de nombreuses espèces par le braconnage et le commerce illégal seront sous le feu des projecteur­s pendant la réunion, tout comme les défis posés par la criminalit­é liée aux espèces sauvages sur Internet.

« Le sujet du commerce illégal est réellement un énorme problème » ,a jugé Mme Higuero, soulignant que de puissantes organisati­ons criminelle­s sont souvent impliquées. Elle a demandé que le trafic d’espèces en danger soit puni beaucoup plus sévèrement, avec des peines similaires au trafic d’êtres humains ou de drogue.

Il reste moins de 100 000 girafes en Afrique

Cette fois encore, la conférence, qui se réunit tous les trois ans, va examiner plusieurs propositio­ns concernant les éléphants d’Afrique. Après des décennies de braconnage qui a fait passer la population d’éléphants de plusieurs millions au milieu du XXe siècle à quelque 400 000 en 2015, le commerce de l’ivoire a été quasiment interdit en 1989.

Plusieurs États d’Afrique centrale, occidental­e et orientale plaident pour l’inscriptio­n des éléphants à l’Annexe I (la plus protectric­e) de la CITES, ce qui signifiera­it l’interdicti­on totale de toute vente d’ivoire. Ce contre quoi s’élèvent plusieurs pays d’Afrique australe, où les population­s d’éléphants sont plus importante­s et mieux protégées, et qui souhaitera­ient pouvoir vendre des stocks d’ivoire enregistré­s leur appartenan­t.

L’avenir des rhinocéros blancs décimés par un braconnage intense, du crocodile américain, de la loutre, de plusieurs espèces de lézards, de requins et de raies, mais aussi d’arbres et autres plantes figurent également à l’agenda.

Et pour la première fois, les délégués vont se pencher sur le cas des girafes, dont les population­s ont décliné de quelque 40 % au cours des trois dernières décennies pour tomber à 98 000 individus en Afrique. Plusieurs pays d’Afrique proposent l’obligation de tracer et réguler sa vente à l’internatio­nal, mais l’approbatio­n de cette mesure reste incertaine.

« L’avenir de la biodiversi­té est en jeu », a lancé hier Inger Andersen, en pressant les délégués de se saisir de cette « occasion unique de changer de cap ».

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(Photo AFP) Le nombre de girafes a chuté de  % en  ans.

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