Les maisons de retraite sous tension
Les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) accueillent plus de personnes en France. Dans notre région, le Var compte Ehpad (pour places) et les Alpes-Maritimes
(pour places).
« La région n’est pas très bien dotée », reconnaît Lydie Renard, directrice adjointe de l’offre médicosociale à l’Agence régionale de santé (ARS) Paca. Au regard de la moyenne nationale, le taux d’équipement pour les personnes de ans et plus est en effet « un peu en dessous », comme le note pour sa part Fabien Marcangeli, responsable du département « personnes âgées » à l’ARS.
« L’explication est historique, avance Lydie Renard, dans la mesure où beaucoup de gens ici ont recours à des infirmiers libéraux, ce qui fait que l’on a accordé moins de crédits aux créations de places ces dernières années. »
Se pose aussi le « problème de l’accessibilité financière » : « Les Ehpad de la région sont souvent réservés à une population aisée, alors qu’on a aussi une forte proportion de revenus modestes », observe la directrice adjointe de l’offre médico-sociale. Or plus de la moitié des maisons de retraite de la région Sud Provence-Alpes-Côte d’Azur sont des établissements privés pour lesquels les droits d’entrée sont plus élevés que dans le public. Françoise Kaidomar regrette que «tousces établissements sont tenus par des grands groupes à but lucratif. Au bout du compte, poursuit-elle, le reste à charge est beaucoup trop lourd pour certaines familles. Les gens se déchirent, ne s’en sortent pas. Et cela fait même éclater certaines familles. »
« Un système maltraitant pour certains »
De son côté, Olivier Guérin n’hésite pas à mettre les pieds dans le plat. « En Ehpad, on a tout mélangé : on a mis un insuffisant cardiaque à côté d’un résident atteint de maladie d’Alzheimer avec des troubles du comportement. » Cette cohabitation entre personnes en perte d’autonomie physique et cognitive, pointe-t-il, ne fonctionne pas. « La moitié des pensionnaires qui présentent des troubles cognitifs, Alzheimer ou apparenté, n’ont rien à faire en Ehpad dans le modèle actuel. Pour ces résidents avec des troubles du comportement, le système est maltraitant par la force des choses. Ils n’ont pas besoin de docteurs, d’infirmières, mais de gens empathiques et formés. Or en Ehpad, pour qu’ils puissent vivre à côté des autres, le risque est la surprescription de médicaments, et les effets secondaires peuvent entraîner la fin de leur autonomie. »
La solution ?
« Accueillir dans ces établissements des patients qui nécessitent des soins, et, pour ceux qui n’en ont pas besoin, mettre en place des lieux de vie, des maisons, sur le modèle de Carpe Diem à Trois-Rivières, au Canada. » Des petites structures à ou résidents.
Mais cette nouvelle voie requiert de mobiliser des moyens : « Huit à neuf milliards d’euros immédiatement. Un jour férié qui saute, ça ne suffira pas, estime Olivier Guérin.
On a proposé d’utiliser la CRDS [Contribution à la réduction de la dette sociale, Ndlr] .»
Avant d’esquisser des pistes de solution, il détaille le diagnostic : «Laperte d’autonomie est liée à une mauvaise gestion des pathologies chroniques. » L’enjeu : prévenir cette perte d’autonomie, pour repousser le plus tard possible l’entrée dans la dépendance.
« L’idée, c’est qu’il y ait, en luttant contre la dépendance, moins de personnes en Ehpad. Si on ne mène pas d’action forte sur la prévention, on n’y arrivera pas. Ce n’est pas milliards qu’il faudra mais milliards, et ce, sans améliorer le système. »