Comment apaiser les angoisses… autrement
Soigner l’anxiété, l’agitation, l’angoisse… par une approche différente, en stimulant les sens : c’est l’expérience menée à l’Ehpad du CHU de Nice. L’objectif : réduire la prise de médicaments
Il est 10 h 10. Au 3e étage de l’hôpital de Cimiez, à Nice, Gisèle Cauchy, animatrice pousse un drôle de chariot. À l’avant, des filaments transparents s’éclairent pour diffuser une lumière douce ; derrière, des étagères contiennent huiles essentielles, diffuseur d’odeur, écran pour projeter des images. Badge « Docteur Sourire » accroché à sa blouse, elle pousse délicatement la porte de la chambre de Catherine, 88 ans. Cette résidente de l’Ehpad du CHU de Nice, a les mains posées sur son ventre. Deux à trois fois par semaine, Gisèle, lui propose une séance de « snoezelen ». Le principe : stimuler les sens pour soulager les maux. « Elle a des douleurs abdominales qui disparaissent après la séance », glisse l’animatrice avant de se diriger vers le lit.
« Ça m’apporte du calme, ça m’apaise »
Elle branche le diffuseur. Une odeur de lavande emplit l’air.
« Asseyez-vous sur le bord du lit. » Catherine se redresse. Gisèle l’invite à se concentrer sur sa respiration. « On inspire par le nez, et on souffle par la bouche. » Après quelques minutes, la résidente s’allonge. Les exercices sur le souffle se poursuivent. Puis Gisèle lui masse les mains. Avant de projeter, sur l’écran, l’image d’une cascade. « Imaginez : vous êtes allongée à côté de la cascade, vous entendez le chant des oiseaux, vous sentez l’odeur des fleurs. » Petit à petit, Catherine se détend et les douleurs s’estompent.
« Ça m’apporte du calme, ça m’apaise, surtout l’image de la cascade », confie l’octogénaire. Gisèle confirme l’effet de ces séances sur cette résidente. «À la fin de la séance, on peut voir qu’il n’y a plus de spasmes au niveau du ventre, ou très peu, et qu’elle redemande une nouvelle séance. »
À côté d’elle, Eléa Gaillard, psychologue de l’Ehpad, explique l’intérêt de cette méthode : «Le but de la mise en place de séances de snoezelen est de diminuer les troubles du comportement de type anxiété, agitation, angoisse… en rétablissant une communication avec les sens. C’est un moment privilégié avec la personne. Ce n’est pas une animation, c’est une thérapie en soi, avec de vrais effets sur le psychisme. »
Des maisons de retraite ont aménagé des salles pour proposer cette approche sur les sens, développée depuis les années 2000 en France. « Ici, nous avons fait un chariot, parce que c’est moins cher, mais aussi parce que nous pouvons ainsi nous déplacer vers tous les résidents. »
Les séances sont proposées deux à trois fois par semaine aux personnes âgées qui le souhaitent, pour obtenir un effet durable dans le temps.
« Si on arrive à apaiser l’anxiété, l’angoisse, ça nous permettra de diminuer la prise de médicaments destinés à traiter ce genre de troubles du comportement. Des traitements assez lourds, qui ne sont jamais dénués d’effets indésirables, surtout sur des personnes âgées », détaille le docteur Malek Zaafrane, médecin responsable de l’Ehpad et de l’unité de soin de longue durée.