Face aux limites des médicaments existants, de nouvelles recherches
Déremboursement des médicaments anti-Alzheimer, échecs des premiers essais cliniques : médecins et chercheurs changent leur fusil d’épaule en conservant leurs espoirs intacts
Philippe Robert est professeur de psychiatrie à l’université Côte d’Azur ; directeur du laboratoire de recherche CoBTeK (cognition Behavior Technology) et du centre mémoire (CM2R) à l’institut Claude Pompidou à Nice.
Avez-vous cessé de prescrire les médicaments anti-Alzheimer depuis leur déremboursement ?
Non. Je continue de les prescrire à certains patients atteints de formes modérées de la maladie. Par contre, et compte tenu des effets secondaires, je ne les prescris pas lorsqu’il s’agit de formes très sévères, sur lesquelles ils sont inefficaces.
Efficacité, déremboursement… On a du mal à comprendre ?
En France, on a tendance à associer de façon systématique efficacité et remboursement. Il existe en réalité de nombreux médicaments efficaces non remboursés. La décision de déremboursement repose sur des facteurs économiques.
Les malades peuvent-ils espérer l’arrivée prochaine de nouveaux médicaments ?
Pour l’heure, nous ne disposons pas de médicaments nouveaux. Certaines molécules sont à l’étude, mais nous n’en connaîtrons pas les résultats rapidement.
Sur quoi repose aujourd’hui le diagnostic ?
Il est surtout clinique. Il repose sur des tests qui utilisent de plus en plus les nouvelles technologies, et permettent d’évaluer les troubles de la mémoire, de l’attention et de la motivation qui altèrent l’autonomie au quotidien. À l’issue de ce bilan, on peut affirmer que le patient est atteint de troubles cognitifs mineurs ou majeurs, qu’ils touchent plutôt la mémoire, ou se manifestent plutôt par de l’apathie, etc. Reste ensuite à savoir si ces troubles sont dus à une neurodégénérescence de type Alzheimer, à une atteinte du système vasculaire, à une infection ou encore à un traumatisme. Les antécédents personnels et familiaux nous aident dans ce diagnostic.
Êtes-vous affirmatif sur la nature de la maladie ?
Non. Nous n’avons pas de certitude, et il faut l’expliquer au patient et à sa famille. On est, par contre, beaucoup plus affirmatif pour ce qui concerne le niveau de sévérité de la maladie et son retentissement sur l’autonomie.
Poser un diagnostic quand l’arsenal thérapeutique est si pauvre, est-ce pertinent ?
Oui, car la prise en charge ne repose pas seulement sur les médicaments ! On explique au moment du diagnostic que les médicaments existants ont une efficacité limitée, mais que des nouvelles molécules sont en développement. Ensuite, on consacre l’essentiel de la consultation à informer sur toutes les approches non pharmacologiques efficaces, qui vont permettre de stimuler les patients, mais aussi aider les familles. Certes, elles ne guérissent pas le malade, mais ralentissement l’évolution des symptômes. Je citerai l’exemple d’une application que nous avons développée, MeMo, à la demande des patients qui nous demandaient :
« Qu’est-ce que vous pouvez faire pour moi ? »
Il s’agit d’un ensemble d’exercices cognitifs qui permet d’exercer mémoire et concentration.
Mais attention, on obtient des résultats à la seule condition que l’on s’entraîne régulièrement. Comme c’est le cas pour toute rééducation.