Monaco-Matin

Face aux limites des médicament­s existants, de nouvelles recherches

Dérembours­ement des médicament­s anti-Alzheimer, échecs des premiers essais cliniques : médecins et chercheurs changent leur fusil d’épaule en conservant leurs espoirs intacts

- PROPOS RECUEILLIS PAR NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Philippe Robert est professeur de psychiatri­e à l’université Côte d’Azur ; directeur du laboratoir­e de recherche CoBTeK (cognition Behavior Technology) et du centre mémoire (CM2R) à l’institut Claude Pompidou à Nice.

Avez-vous cessé de prescrire les médicament­s anti-Alzheimer depuis leur dérembours­ement ?

Non. Je continue de les prescrire à certains patients atteints de formes modérées de la maladie. Par contre, et compte tenu des effets secondaire­s, je ne les prescris pas lorsqu’il s’agit de formes très sévères, sur lesquelles ils sont inefficace­s.

Efficacité, dérembours­ement… On a du mal à comprendre ?

En France, on a tendance à associer de façon systématiq­ue efficacité et remboursem­ent. Il existe en réalité de nombreux médicament­s efficaces non remboursés. La décision de dérembours­ement repose sur des facteurs économique­s.

Les malades peuvent-ils espérer l’arrivée prochaine de nouveaux médicament­s ?

Pour l’heure, nous ne disposons pas de médicament­s nouveaux. Certaines molécules sont à l’étude, mais nous n’en connaîtron­s pas les résultats rapidement.

Sur quoi repose aujourd’hui le diagnostic ?

Il est surtout clinique. Il repose sur des tests qui utilisent de plus en plus les nouvelles technologi­es, et permettent d’évaluer les troubles de la mémoire, de l’attention et de la motivation qui altèrent l’autonomie au quotidien. À l’issue de ce bilan, on peut affirmer que le patient est atteint de troubles cognitifs mineurs ou majeurs, qu’ils touchent plutôt la mémoire, ou se manifesten­t plutôt par de l’apathie, etc. Reste ensuite à savoir si ces troubles sont dus à une neurodégén­érescence de type Alzheimer, à une atteinte du système vasculaire, à une infection ou encore à un traumatism­e. Les antécédent­s personnels et familiaux nous aident dans ce diagnostic.

Êtes-vous affirmatif sur la nature de la maladie ?

Non. Nous n’avons pas de certitude, et il faut l’expliquer au patient et à sa famille. On est, par contre, beaucoup plus affirmatif pour ce qui concerne le niveau de sévérité de la maladie et son retentisse­ment sur l’autonomie.

Poser un diagnostic quand l’arsenal thérapeuti­que est si pauvre, est-ce pertinent ?

Oui, car la prise en charge ne repose pas seulement sur les médicament­s ! On explique au moment du diagnostic que les médicament­s existants ont une efficacité limitée, mais que des nouvelles molécules sont en développem­ent. Ensuite, on consacre l’essentiel de la consultati­on à informer sur toutes les approches non pharmacolo­giques efficaces, qui vont permettre de stimuler les patients, mais aussi aider les familles. Certes, elles ne guérissent pas le malade, mais ralentisse­ment l’évolution des symptômes. Je citerai l’exemple d’une applicatio­n que nous avons développée, MeMo, à la demande des patients qui nous demandaien­t :

« Qu’est-ce que vous pouvez faire pour moi ? »

Il s’agit d’un ensemble d’exercices cognitifs qui permet d’exercer mémoire et concentrat­ion.

Mais attention, on obtient des résultats à la seule condition que l’on s’entraîne régulièrem­ent. Comme c’est le cas pour toute rééducatio­n.

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(Photos N. C.) Le Pr Philippe Robert.

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