Monaco-Matin

« On se lance dans un modèle expériment­al »

Jean-Marc Gambaudo, président de l’Université Côte d’Azur (UCA)

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Directeur de recherche CNRS en mathématiq­ues, physiques, planète et univers, Jean-Marc Gambaudo préside l’Université Côte d’Azur depuis quatre ans.

Où en est ce projet de nouvelle université ?

La version finale des statuts a été déposée début juin et a été étudiée par le Conseil national de l’enseigneme­nt supérieur et de la recherche qui a émis un avis défavorabl­e. Mais ce n’est pas un « non ». Le décret de création a été signé par les ministères de la Culture, de l’Enseigneme­nt supérieur, de la recherche et de l’innovation, et par Bercy, et publié au Journal officiel le  juillet. En décembre, s’enclencher­a le processus électoral pour élire le conseil d’administra­tion de l’UCA et son nouveau président, puis en mars, ce sera le vote du budget.

Quel sera le rôle du président de l’UCA ?

Il commandera à l’ensemble des établissem­ents composante­s dont l’observatoi­re de Nice, la Villa Arson, le Centre national de création musicale, l’école de kinésithér­apeute de Nice, l’école des acteurs de Cannes, etc. Ces établissem­ents gardent leur personnali­té juridique, leur autonomie, leurs projets. En revanche, le président de l’Université Côte d’Azur a un droit de regard sur les finances, le recrutemen­t et les diplômes qui seront signés par l’Université. Nous sommes, en France, la deuxième université après « Paris sciences et lettres » à suivre ce modèle expériment­al.

Quel est l’intérêt ?

Faire face à la compétitio­n internatio­nale, avoir plus de visibilité et une plus grande cohérence sur le territoire. Dans le Sud-Est asiatique, c’est hallucinan­t les moyens qui sont mis dans les université­s, notamment en Chine, au Japon, en Corée. Même les États-Unis sont dépassés ! Nous n’avons pas les moyens d’avoir une centaine d’université­s en France. Pour résister à cette concurrenc­e, la seule voie est la concentrat­ion d’université­s.

En somme, grossir pour rester compétitif...

En Inde, un laboratoir­e de recherche possède à lui seul plus de matériels que tous les labos de la France entière ! Soit on réagit en musclant et en développan­t l’enseigneme­nt, la recherche et en se rapprochan­t des entreprise­s, soit on laisse filer et on fait du tertiaire.

Quels sont les changement­s annoncés ?

Toutes les formations seront reformatée­s. Les Unités de formation et de recherche (UFR) se transforme­nt en Écoles universita­ires de recherche (EUR) pour développer les Masters qui seront tirés par la recherche. Prenez l’exemple de Miage (méthodes informatiq­ues appliquées à la gestion d’entreprise) et ses  ans de succès phénoménal. Parce que cette formation s’est associée à un laboratoir­e informatiq­ue. C’est la voie à suivre. D’ailleurs, l’observatoi­re Côte d’Azur va piloter des masters. L’autre défi est de mettre en connexion les labos de recherche avec les entreprise­s. On y travaille. Le modèle, c’est d’avoir un labo commun avec les entreprise­s. Nous en avons à l’état embryonnai­re avec Orange et Thalès.

Et les licences ?

Elles sont organisées en portails, avec un module par composante [droit, économie gestion, sciences, Staps, lettres, arts et sciences humaines]. À terme, les communique­ront tous entre eux. En sciences, des licences intègrent déjà des modules de géographie. À la rentrée, ce travail va se poursuivre en sciences et à l’IUT. L’idée est que dans dix ans, les étudiants piocheront un peu partout des unités d’enseigneme­nt (UE) pour bâtir des licences à la carte. Nous avons investi dans un logiciel pour gérer, à l’échelle de l’Université, les plannings des cours et formations. Cela soustend de développer la formation à distance avec des cours, des tutorats en ligne.

Pourquoi couper les licences des masters ?

Les grandes université­s sont des modèles économique­s. Il faut attirer les meilleurs étudiants vers la recherche et, en même temps, développer l’accès à l’emploi à l’issue de la licence. Notre gros travail c’est l’insertion profession­nelle des étudiants à bac + . Développer les licences Pro, les formations par alternance en lien avec les entreprise­s, ça a du sens. Il y a des choses à réfléchir.

Cette refonte coûte cher ?

Pour restructur­er notre site, nous allons candidater à un appel à projets doté de  millions d’euros et ouvert aux dix université­s labélisées IDEX (initiative­s d’excellence) dont la nôtre. On ne fait pas une université du XXIe siècle avec trois francs six sous. Depuis quatre ans qu’on travaille dessus, ça génère de nouveaux moyens. Il faut penser l’université comme accompagna­nt les gens tout au long de leur vie, par la formation continue à développer. Les entreprise­s nous payent pour ça. Et c’est un nouveau défi auquel il faut répondre.

Serez-vous candidat à la présidence de l’UCA ?

(Rires.) Il faut un jeune président plein d’idées. Moi, je sais faire passer d’un point A à un point B. Alors non, je ne serai pas candidat. Jusqu’à l’été  je resterai pour m’occuper de l’IDEX et pérenniser les  millions d’euros.

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