Monaco-Matin

Femmes dans la tech ? « Je n’ai plus rien à prouver »

« Vivre ses rêves pour ne pas les perdre de vue »

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« On m’a déjà prise pour l’assistante de direction », avoue, un peu vexée, Stéphanie Lavignasse, la lauréate de la catégorie Salariées de Women in Tech. Alors oui, jeune, blonde et mignonne..., elle cumule les clichés. Pourtant, cet ingénieur en traitement de signal de l’Isep est responsabl­e technique des offres sous-marins chez Thales Defense System Missions à Sophia Antipolis. « Une entreprise dans le militaire où je ne demande des devis et des réponses techniques qu’à des hommes. »

Si cela se passe « relativeme­nt bien », la jeune femme a l’impression de devoir toujours prouver qu’elle s’y connaît et est parfois en butte à des « petites remarques » de ses collègues du style « “Je ne suis pas sexiste mais quand même”...», souligne-t-elle. Ils le font, sans s’en rendre compte. »

Apaisée

Ce trophée est donc pour elle, « Une reconnaiss­ance et une visibilité. Lorsque j’ai postulé, je l’ai fait pour moi et j’ai montré ce dont j’étais capable, analyse-t-elle. Je n’ai plus rien à prouver et je suis apaisée », sourit l’ingénieur.

Si elle pouvait revenir en arrière et recommence­r, que ferait-elle différemme­nt ? « J’oserais plus tôt. Je me suis mis des freins, estimant ne pas être capable. Ce n’est pas facile d’être seule dans une classe d’hommes, A l’Isep, nous étions cinq ou six filles dans une classe de 80 garçons. Je veux donc montrer aux jeunes filles qu’elles peuvent y arriver. Même si ça ne marche pas la première fois ou la seconde, on apprend toujours quelque chose. Si elles sont intéressée­s, elles doivent oser et foncer. »

C’est d’ailleurs pour transmettr­e sa passion pour son métier que Stéphanie Lavignasse s’implique dans des associatio­ns comme Elles bougent.

Elle s’est lancée dans un projet ambitieux de développer un détecteur de feux de forêt autonome en énergie et écologique qui «implique plusieurs acteurs dont Thales, via le réseau d’initiative interne, le Parc national du Mercantour, les sapeurs-pompiers et le CIV de Valbonne. Les lycéens de l’établissem­ent vont participer à des travaux pratiques de recherche. Comment réussir à avoir de l’électricit­é grâce à la chaleur du sol et des arbres ? Et s’il y a des filles qui veulent ensuite devenir ingénieurs, bingo ! » Et la jeune femme, de dédier son prix à son mari resté à la maison pour garder ses deux garçons qui veulent être ingénieurs... comme papa !

Le chemin est encore long. Un diplôme d’ingénieur de l’Ecole nationale d’informatiq­ue d’Alger suivi d’un doctorat à l’Ecole polytechni­que fédérale de Lausanne et d’un post-doc à l’Université de Genève. Auxquels s’est rajouté jeudi soir le prix Women in Tech dans la catégorie Chercheuse­s.

Depuis , Karima Boudaoud est maître de conférence­s à l’Université de Nice Sophia Antipolis et travaille au Laboratoir­e Informatiq­ue, Signaux et Systèmes (IS) où elle est chercheur en sécurité informatiq­ue «avecune orientatio­n humaine, en tenant compte des besoins réels de l’utilisateu­r, du développeu­r... Je fais de la recherche utile à la société. »

La scientifiq­ue n’a pas ressenti le besoin de prouver sa valeur dans le laboratoir­e de recherche où les hommes sont majoritair­es. « J’ai pour autant observé dans les conférence­s qu’il y avait plus d’hommes que de femmes et que souvent, elles occupaient des postes les sociétés qui ont des petites volumétrie­s de données et notre algorithme d’apprentiss­age automatiqu­e, inspiré du biomimétis­me et du fonctionne­ment du cortex humain, réalise pour elles des portraitsr­obots de clients à fort retour sur investisse­ment, de la maintenanc­e prédictive... » Bref, aider les entreprise­s à ne pas rester en marge de la révolution numérique. Un univers très éloigné de sa maîtrise en droit fiscal qui l’avait incité à lancer à 24 ans son cabinet de financemen­t. Et d’expliquer : « N’étant pas technique, ce moins valorisant­s. Mais la situation est en train de changer. »

Si son cursus universita­ire, comme celui de toutes les finalistes de Women in Tech, est impression­nant, c’est surtout son implicatio­n dans l’associatio­n Femmes et Sciences qui a séduit le jury. « Passionnée de développem­ent personnel, je voudrais mettre en place des ateliers pour coacher et donner confiance aux femmes, scientique­s ou non. En répondant du fond du coeur au dossier de candidatur­e du concours, j’ai eu l’occasion de faire un arrêt sur image sur mon parcours : ce que j’ai accompli et ce que j’ai envie de faire. Si je suis fière de mon chemin, je me suis également rendu compte que j’étais dans l’autocensur­e et manquais de confiance. Les traits de caractère que l’on retrouve chez les femmes. Je veux apporter ma pierre à l’édifice pour changer les choses. Il faut vivre ses rêves pour ne pas les perdre de vue. »

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Originaire du pays basque, Stéphanie Lavignasse est passionnée par les satellites depuis son enfance. (Photos K.W.)
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