Monaco-Matin

Anna Chromy, sculptrice de l’ombre

Avant qu’elle ne parte à Pise pour inaugurer son exposition le 20 septembre, nous avons rencontré l’artiste et résidente monégasque Anna Chromy. Une femme pleine de volonté et de caractère

- SARAH CIAMPA

Vous ne savez peutêtre pas à quoi elle ressemble mais vous avez sûrement déjà dû voir une de ses oeuvres. En Principaut­é, se cachent trois de ses sculptures. Une au Palais, réservée aux privilégié­s, une en face du Yachtclub, et la plus connue, Le Manteau de la conscience, sur l’esplanade du Larvotto ( voir ci-dessous).

Sa première sculpture date de 1985. Depuis, elle ne s’est pas arrêtée. À 79 ans, elle marque son grand retour en Europe avec une exposition dans les rues de Pise. Rencontre avec Anna Chromy.

« Je suis une femme dans un monde d’hommes »

Ce qui trahit son âge, c’est le nombre d’anecdotes qu’elle a à raconter. Les histoires se suivent mais ne se ressemblen­t pas. On passe d’une aventure avec sa soeur en Italie à son emménageme­nt en Principaut­é et d’autres souvenirs éparpillés.

Son mari, toujours attentif, est là pour remettre un peu d’ordre dans le fil de la conversati­on. Mariés depuis 54 ans. Ces deux-là forment un duo complément­aire. « Heureuseme­nt qu’il est là pour connaître les dates, les noms… Moi j’oublie tout », glisse Anna. « C’est normal je vis là-dedans » , lui répond du tac au tac son mari. Mais une chose est sûre, c’est elle l’artiste. Et elle tient à ce que tout le monde le sache. « Parfois, lors d’événements, les gens vont davantage parler à mon mari qu’à moi. Peut-être parce qu’il parle mieux français… ou parce que je suis une femme » , lâche l’artiste qui le reconnaît fort bien : « Je suis une femme dans un monde d’hommes, j’ai dû faire ma place. Aujourd’hui ils me respectent mais au début ce n’était pas gagné. » Précurseur­e, elle aura été la première femme à remporter certaines récompense­s, comme le prix Michelange­lo en 2008. Sa place, elle l’a faite, et pas qu’un peu.

De Monaco à Pékin

Aujourd’hui elle expose en Europe et en Chine, où le pays lui voue un culte. Vraie star dans l’Empire du Milieu, elle est la première artiste étrangère à présenter ses oeuvres au Musée national de Chine, à Pékin. Elle a fait le tour du monde, elle a également exposé à New York, à Prague ou encore à Jérusalem.

Et pourtant, « je ne suis pas connue à Monaco ». Mais ce n’est pas pour la déranger. « Je préfère qu’on s’intéresse à mon travail, qu’on tombe sur une de mes sculptures et qu’on se dise “Qui a fait ça ?” plutôt que de savoir qui je suis sans savoir ce que je fais. »

Aujourd’hui, elle revient en Europe avec l’exposition « Spiritual Archetypes » à Pise, du 20 septembre au 10 novembre. « C’est une exposition dans le centre de Pise, les sculptures sont réparties un peu partout dans la ville et forment un parcours », explique Wolfgang, le plan en mains. « Nous sommes attendus pour l’inaugurati­on, il y aura beaucoup de nos amis et collaborat­eurs » , poursuit-il.

« Nous mourrons ici, c’est certain »

Son histoire avec la Principaut­é commence un peu par hasard, à la suite d’une rencontre. « Nous vivions à Paris et j’étais souvent malade à cause de la pollution et de la ville. Mon mari, un jour, a rencontré un avocat, Maître Dié, qui travaillai­t au conseil d’administra­tion de Radio Monte-Carlo. Il nous a dit qu’il fallait qu’on vienne vivre à Monaco et qu’il pouvait nous aider en nous proposant sa villa sur le Rocher. On a refusé, on a choisi une maison à Cap-Martin avec un jardin pour avoir des animaux », raconte-elle.

« Vous voulez savoir à qui appartient la villa aujourd’hui ? À la princesse Caroline. Qu’est-ce qu’on a été cons à l’époque ! » , lâche son mari dans un éclat de rire. Mais ils ne regrettent rien. Aujourd’hui établis dans un appartemen­t boulevard d’Italie, ils apprécient leur vie monégasque. « Ça fait 40 ans que nous vivons ici, la moitié de notre vie. Nous mourrons ici, c’est certain. »

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(Photo S.C.) L’artiste possède ses ateliers à Pietrasant­a en Toscane.
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(Photo Cyril Dodergny) «Ulysse» sur la digue du Yach- Club de Monaco.

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