ANIMALISTES : QUI SONT-ILS VRAIMENT ?
Ces militants usent de vidéos-chocs et, pour les plus radicaux, d’actions spectaculaires voire illégales. Mais derrière certaines outrances, se dessine un nouveau rapport à la condition animale.
Vous ne regarderez plus un steak de la même façon. D’ailleurs, vous n’en mangerez peut-être plus du tout ! Telle est la conclusion implicite, quand arrive le générique de fin d’une vidéo signée L214. À force de coups d’éclats médiatiques, d’images glaçantes d’animaux malmenés ou agonisants, cette association a pris l’habitude de marquer les esprits. Et de faire ainsi réfléchir le consommateur sur son rapport aux autres mammifères. Avec, en filigrane, cette autre question : jusqu’où peut-on aller pour dénoncer la souffrance animale ?
« Il y a, globalement, une montée de l’attention portée à la condition des animaux, quels qu’ils soient. Les Français y sont de plus en plus sensibles », constate le député des AlpesMaritimes (LREM) Loïc Dombreval. Le petit Parti animaliste, fort de 2 % aux dernières européennes, ne saurait le contredire. Dans l’hémicycle du Palais Bourbon, Loïc Dombreval est le seul vétérinaire de formation. Il y préside le groupe d’études sur la condition animale, qui regroupe une cinquantaine de parlementaires de toutes sensibilités. Signe que cette cause dépasse les traditionnels clivages entre bipèdes.
« Des images terribles »
L’enjeu ? Accorder davantage de considération aux animaux. Plus seulement les animaux de compagnie. Mais aussi les animaux de production, destinés à finir dans notre assiette. Chez les députés comme les internautes, la prise de conscience est là. Et L214 n’est pas seule à mener ce combat. On connaissait aussi la Fondation 30 millions d’amis ou, bien sûr, la Fondation Brigitte Bardot. On découvre au fil des actualités de nouvelles associations, telles que 269 Life ou Boucherie Abolition. « Des mouvements animalistes qui ont des approches radicales, très spectaculaires, avec des images terribles de plus en plus relayées par les médias traditionnels », observe Loïc Dombreval.
Le débat tué dans l’oeuf
Ce vendredi, c’est Boucherie Abolition qui a eu droit à son coup de projecteur. Quatorze militants, dont un Niçois, comparaissaient devant le tribunal d’Evreux pour avoir « libéré » des dindes par centaines dans des fermes normandes. L’accusation a requis jusqu’à 6 mois de prison ferme. Les militants, droits dans leurs bottes, ont voulu faire le « procès de l’élevage », qu’ils assimilent à la dictature nazie. Exaltés ? Sectaires ? Outranciers ? « Nous ne sommes pas des fous, nous sommes des lanceurs d’alerte », corrigent-ils. « Libération » anarchique d’animaux, vandalisme de boucheries... Ces méthodes radicales, prônées par une minorité, brouillent le message du mouvement animaliste. Au risque de tuer le débat dans l’oeuf. Résultat : certains acteurs de la filière viande ont refusé de s’exprimer dans ce dossier, par peur de représailles. Dans un autre registre, Marineland a récemment déposé plainte contre X pour des menaces de mort contre son directeur, et une autre plainte pour des dégradations de biens subies pendant l’été. Le delphinarium antibois avait, déjà, retiré les logos des voitures de service pour assurer la protection de ses employés.
L’alimentation, sujet tabou
L’extrémisme d’une minorité ne doit pas occulter la question de fond : quelle place pour les animaux dans notre société ? Pour les antispécistes, la question est tranchée, si l’on peu dire : aucune espèce ne peut en asservir une autre. Signe des temps : ces adeptes du végétalisme ou du véganisme se sont réunis, hier, au premier festival antispéciste de Saint-Cézaire, dans la région de Grasse (lire en pages 4 et 5).
Comme bien d’autres, Christabel Claudin, référente de L214 pour le bassin cannois, milite pour l’abolition de l’élevage. Donc des abattoirs. Un combat de longue haleine, elle le sait. « Tout changement demande de gros efforts pour sortir de sa zone de confort. Il est difficile de toucher à l’alimentation. Mais on ne peut pas parler de choix personnel, quand ce choix implique la mort d’un individu. »