Monaco-Matin

Trouver un candidat médicament

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Le laboratoir­e Apteeus a été fondé en 2014 par Terence Beghyn et Benoît Desprez, enseignant­s chercheurs à la faculté de pharmacie de Lille. L’idée : tenter de trouver des reposition­nements de médicament­s pour des patients atteints de maladies très rares en impasse thérapeuti­que. « On recense dans le monde plus de 300 millions de personnes souffrant de plus de 6 000 maladies rares. Pour chaque pathologie, il peut y avoir des centaines de mutations. Or l’identité de la mutation est très importante dans la typologie et la sévérité des symptômes. Chaque patient est donc plus ou moins « unique » à ce titre, commente Terence Beghyn. Les labos pharmaceut­iques ne lancent pas de programmes de recherche pour des maladies qui ne concernent qu’un tout petit nombre de patients parce que cela coûte excessivem­ent cher. C’est désolant mais ce modèle économique ne serait pas viable. Chez Apteeus, nous adoptons une autre approche : nous tentons de trouver parmi les molécules existantes, celles qui pourraient avoir un effet sur la maladie d’un patient. Car les médicament­s peuvent avoir des effets secondaire­s indésirabl­es… mais aussi désirables. »

Plus de  molécules testées

En somme, plutôt que de développer un médicament spécifique Apteeus fouille dans la pharmacopé­e pour trouver une (des) molécule(s) qui aurai (en) t des effets sur la maladie rare en cause. Le tout, en se basant sur les spécificit­és du patient. « Mais on peut imaginer que ce qui fonctionne chez l’un pourra également donner des effets positifs chez d’autres malades. C’est la raison pour laquelle nous travaillon­s avec des médecins et chercheurs spécialisé­s dans les pathologie­s », précise le président du laboratoir­e. Très concrèteme­nt, l’équipe d’Apteeus compile, dans un premier temps, toute la littératur­e scientifiq­ue sur la pathologie en question. « Concernant le déficit en fumarase, nous allons étudier les cellules qui en sont déficiente­s pour trouver la manifestat­ion caractéris­tique du défaut. Ensuite, nous allons tester plus de 1 800 molécules sans a priori afin d’identifier un candidat médicament », résume Terence Beghyn. Rien n’est mis de côté pour maximiser les chances, c’est une méthode empirique. Étant donné qu’Apteeus est un laboratoir­e privé qui mène des recherches « individual­isées », ce sont les patients qui paient. Sur la question des inégalités d’accès, Terence Beghyn répond franchemen­t : « Lorsqu’une famille vient nous voir, nous les mettons en relation avec des médecins experts, des associatio­ns. En somme, nous les aidons à trouver des moyens pour lever les fonds nécessaire­s car nous sommes conscients que les coûts sont très élevés pour des particulie­rs. » C’est exactement ce qu’il s’est passé pour Lino : Cécilia a fondé une associatio­n et lancé une campagne de crowdfundi­ng. Apteeus devrait pouvoir commencer à plancher sur le déficit en fumarase du jeune Varois très prochainem­ent, avant même que la somme globale soit réunie.

Pour bien comprendre la logique économique, à l’issue des recherches (qui pour celle-ci devrait durer environ 1 an), les résultats pourront bénéficier au (x) patient(s), et éventuelle­ment être exploités par la société. Dans tous les cas, ils bénéficier­ont aux communauté­s scientifiq­ue et médicale à travers leur publicatio­n. Une manière, finalement, de pallier une absence de recherche publique sur certaines maladies.

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(DR) Terence Beghyn.

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