Monaco-Matin

Monaco : des milliers de salariés pris en otage

- ARNAULT COHEN acohen@nicematin.fr

Du jamais vu, ou presque. Hier matin, aucun train n’est arrivé en gare de Monaco/MonteCarlo. Toute une partie de la journée, les quais, les couloirs, les escalators, les ascenseurs et le parvis de la gare sont restés totalement déserts. « En raison d’un mouvement de grève inopiné, aucun train ne circulera jusqu’à nouvel ordre. » Le message, encadré par le célèbre jingle de la SNCF, était diffusé à fréquence régulière, dans cette gare fantôme, en ce vendredi noir sur le rail azuréen. À Monaco, cette ville-Etat dont les entreprise­s et administra­tions accueillen­t chaque jour quelque 50 000 salariés originaire­s de Nice, Menton et d’Italie, les conséquenc­es de cette grève surprise sont considérab­les. On estime ainsi à 10 000 le nombre de salariés, dans les secteurs public et privé, qui viennent travailler en train.

Stress, retard et perte de salaire

Les conséquenc­es d’une grève inopinée et totale, fait rarissime, ont empêché tous ces actifs de prendre leurs dispositio­ns. Les conséquenc­es du mouvement des cheminots sont ainsi de trois ordres. Humaines, d’abord. « Le stress et le désarroi de ces milliers de salariés qui ne trouvent pas de train pour venir travailler à Monaco sont, à mes yeux, le plus grave problème, réagit Philippe Ortelli, le président de la Fedem, la Fédération des entreprise­s monégasque­s. Tous ces employés ont besoin de pouvoir compter sur la SNCF, d’avoir confiance dans leur moyen de transport. » Les conséquenc­es sont financière­s, ensuite, pour ces mêmes salariés. Car, comme le rappelle le responsabl­e patronal, sauf accord particulie­r, «les entreprise­s acceptent les retards mais ne paient pas ceux qui ne viennent pas travailler. Les salariés perdront ainsi une journée de salaire ». Et d’enfoncer le clou : « Les cheminots doivent prendre conscience qu’ils enquiquine­nt non pas leur direction ni des grands patrons par ce mode d’action, mais de simples employés qui travaillen­t dans des boutiques, des administra­tions et des sociétés monégasque­s. »

Impact économique difficile à évaluer Reste la troisième conséquenc­e, difficile à évaluer : l’impact économique de l’absence totale de train sur une journée de semaine. Il est évident. Mais aucune étude globale n’existe en Principaut­é pour le chiffrer. On ne peut donc que se fier aux avis de dirigeants interrogés. « Nous sommes particuliè­rement touchés aujourd’hui car la grève n’était pas prévue et nos salariés n’ont pas pu s’organiser en amont », soupire Johanna Houdrouge, directrice administra­tive et juridique chez Mercure Internatio­nal. Le groupe emploie une centaine de personnes à Monaco, dont la plupart vivent du côté de Nice – 60 % des salariés de Mercure prennent le train. Comment ont-ils fait ? « Quarante pour cent ont pris le Thello, le train privé de 8 h, qui était bondé, indique Céline Bouzinac, responsabl­e ressources humaines de la société. Cinquante pour cent sont venus en covoiturag­e et 9 % ont pris le bus. Une seule personne était absente. » Résultat, des retards et des coûts supplément­aires pour réussir à venir travailler.

« Entre   et   € de perte » D’autres entreprise­s monégasque­s avancent des chiffres de pertes. C’est le cas de Cruiseline, leader européen de la vente de croisières en ligne, qui emploie 338 salariés sur ses trois sites à Monaco. Hier matin, Pierre Pélissier, le président administra­teur délégué, croulait sous les SMS de ses employés pris au dépourvu. « J’ai dit à ceux qui sont équipés de rentrer chez eux et de passer en mode télétravai­l. Mais tous nos commerciau­x ne le peuvent pas. » La perte estimée ? «Ilvaut mieux que cette grève tombe un vendredi, c’est moins lourd qu’un lundi. Environ 20 % des commerciau­x ne travaillen­t pas, ce qui correspond à une perte, sur la journée, de 10 000 à 15 000 € .» Un exemple parmi cent…

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(Photo A.C.) La gare de Monaco, hier à  h . Le désert de Gobi.

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